Euronaval : préparation au retour du combat de haute intensité

Matériels plus lourds, systèmes d’armes plus complexes, drones de surface et sous-marins ainsi que les luttes anti-drones et anti-mines caractérisent l’édition 2024 du salon international Euronaval.

Ce dernier a fait l’objet d’une visioconférence de presse le 24 octobre 2024, où sont notamment intervenus : l’ingénieur général de l’armement François Watteau, sur les programmes français ; le délégué général du Groupement des industries de construction et activités navales (GICAN) Philippe Missoffe, sur le marché naval dans le monde. Le salon, qui se déroule du 4 au 7 novembre à Villepinte (banlieue parisienne), accueille 480 exposants de 30 pays et environ 150 délégations françaises et étrangères.

Les grands programmes français. Premier investisseur de l’État avec 20 Mds€ par an, la Délégation générale de l’armement (DGA) garantit l’autonomie stratégique des armées en matière d’équipements. L’unité de « management combat naval », à laquelle appartient l’ingénieur général Watteau, pilote l’ensemble des opérations relatives au renouvellement ou à la modernisation des moyens de la Marine nationale, à savoir le porte-avions, les sous-marins nucléaires d’attaque (SNA), les drones jusqu’à 6 m de long et tous les équipements et armements associés. Elle doit garantir la cohérence des futurs systèmes avec ceux en service, conduire leurs travaux d’architecture et de conception pour répondre aux besoins, définir l’organisation industrielle, passer des contrats et en assurer la bonne exécution par la réception des matériels dans les centres d’essais de la DGA, répartis dans toute la France. Parmi les 100 programmes en cours, le principal concerne le remplacement du porte-avions Charles-de-Gaulle, qui arrivera en fin de vie en 2038. La DGA et le Commissariat à l’énergie atomique assureront la maîtrise d’ouvrage étatique du porte-avions de nouvelle génération, qui sera équipé de deux chaufferies nucléaires. Les études en projet ont été initiées dès 2019, les gros équipements de chaufferie ont été commandés en 2024 et le contrat de réalisation sera signé en 2025. Outre l’évolution du Rafale Marine, les innovations technologiques majeures seront prises en compte pendant toute la durée de vie du futur porte-avions, notamment les drones et le domaine quantique (comportements des atomes et des particules dans le rayonnement électromagnétique). Le programme des nouveaux SNA « Barracuda » se poursuit. Après les Suffren et Duguay-Trouin déjà en service, le Tourville le sera à la fin de 2024. Les De-Grasse, Casabianca et Rubis suivront d’ici à 2030. A cette date, trois des cinq frégates du programme franco-grec « FDI » (frégates de défense et d’intervention) seront livrées. La première, dénommée Amiral-Ronarc’h, a commencé ses essais à la mer le 7 octobre 2024. Les frégates anti-aériennes du programme franco-italien « Horizon » seront renouvelées. Enfin, un programme de drones sous-marins, capables d’opérer à 6.000 m de profondeur, sera lancé pour assurer la maîtrise des fonds marins.

Le marché naval mondial. Selon l’édition 2024 de l’étude « World Defence Shipbuilding» du GICAN, présentée par Philippe Missoffe, les données récupérées depuis 2016 montrent une évolution de la construction navale militaire. Les risques de tensions maritimes entraînent les constructions de frégates, corvettes, sous-marins à propulsion diesel-électrique, SNA et sous-marins nucléaires lanceurs d’engins fortement armés. La guerre d’attrition nécessite de nouvelles armes bon marché (lasers). Des armes plus rapides (torpilles) et lointaines (missiles hypersoniques) arrivent. Le marché naval mondial est estimé à 82,5 Mds€ pour les années 2022-2023, dont 20 Mds€ dépensés par les États-Unis et 16 Mds€ par la Chine. Celle-ci construit davantage de navires que les États-Unis mais n’en exporte pas, alors que la France vend 35 % de sa production navale à l’étranger.

Loïc Salmon

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Défense : renforcement industriel en armement et munitions

Les commandes d’armement aux industriels ont atteint 20 Mds€ en 2023. Les livraisons de missiles et d’obus, prévues pour 2024-2030 s’échelonneront entre l’été 2024 et le 2ème semestre 2025.

Le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, les a annoncées au cours d’une conférence de presse, organisée le 26 mars 2024 à Paris, en présence des hautes autorités militaires et civiles, dont le chef d’État-major des armées, le général d’armée Thierry Burkhard, et le délégué général pour l’armement, Emmanuel Chiva (photo).

Accélération des commandes. Le montant de 20 Mds€ des commandes effectives de 2023 dépassent d’un tiers celui de la moyenne de 15 Mds€ sur la période 2017-2022 et de plus du double celui de la moyenne de 9,5 Mds€ sur la période 2012-2016. Cela donne beaucoup de visibilité aux industriels de l’armement, explique le ministre, qui reconnaît des segments en tension dont les missiles Aster 30. Ces derniers équipent le dispositif sol-air Mamba, installé en Roumanie dans le cadre des missions OTAN de réassurance à l’Ukraine. Ce besoin de missiles concerne aussi la France. Ainsi, les frégates déployées en mer Rouge pour sécuriser le trafic maritime, ont tiré 22 missiles Aster 15 et 30 contre les drones et missiles balistiques lancés par les rebelles Houthis en réponse à l’offensive d’Israël à Gaza. Les commandes de divers types de missiles sol-air s’accélèrent. La livraison prévue en 2026 de 200 missiles longue portée Aster, commande d’un montant de 900 M€, aura lieu au 2ème semestre 2024. Celle de 1.500 missiles antichars MMP (400 M€) prévue fin 2024, sera avancée à l’été 2024, comme celle de 300 missiles courte portée Mistral (150 M€). Celle de 500 missiles air-air Mica-NG (700 M€), prévue fin 2026, aura lieu au 2ème semestre 2025. La livraison de 55.000 obus de 155 mm (600 M€) pour le canon Caesar, prévue de 2024 à 2030, sera avancée à l’été 2024. En outre, le ministre annoncé une commande anticipée de 200 missiles Aster, portant le montant total à 2 Mds€ et une autre similaire pour le Mica-NG. Au 31 décembre 2023, les principales commandes se répartissent ainsi : MBDA (missiles), 3 Md€ ; Naval Group (construction navale), 4 Mds€ ; Thalès (électronique), 6 Mds€ ; Arquus (véhicules terrestres), 1 Md€ ; Nexter (systémier terrestre), 1,5 Md€ ; Safran (aéronautique et espace), 2 Mds€. A l’export, le succès des canons Caesar offerts à l’Ukraine suscite de l’intérêt au Moyen Orient et en Europe, de même que les radars GM200 ou GM400. Toutefois, certains contrats n’ont pu aboutir en raison de délais de livraison trop longs.

Économie de guerre. Il s’agit de produire plus vite et en plus grande quantité, souligne le ministre, en s’appuyant sur une base industrielle et technologique de défense complètement autonome et performante à l’exportation. Les difficultés résultent de la diminution des crédits budgétaires et de contrats opérationnels, notamment au Sahel, ne nécessitant pas la même masse d’équipements ou de munitions qu’un conflit de haute intensité. Les industriels ont alors investi dans l’innovation et le développement d’armes nouvelles pour ne pas perdre des avancées technologiques. Toutefois, la production faisant la différence sur le terrain opérationnel, des travaux sont en cours sur les simplifications administratives et le financement, notamment au niveau de l’Union européenne. Enfin, le ministère des Armées va investir 10 M€ dans une usine de fabrication de poudre, filière perdue depuis 2007, pour produire l’équivalent à terme de 150.000 obus de 155 mm par an.

Aide à l’Ukraine. En deux ans de guerre, la France a livré environ 30.000 obus de 155 mm à l’Ukraine et lui en fournira 80.000 en 2024 ainsi que 78 canons Caesar (financement international bouclé). La France et l’Allemagne lui ont livré 400 équipements, qui auront besoin de maintenance. Un dialogue se poursuit avec les partenaires anglo-saxons pour adapter des bombes françaises A2SM sur les avions américains F16 destinés à l’Ukraine.

Loïc Salmon

Armement : produire plus et plus vite en temps de guerre

Ukraine : les enseignements de deux ans de guerre

Armement : la coalition « Artillerie pour l’Ukraine »




Armement : les commandes majeures de 2023

Le 1er février 2024, la Délégation générale de l’armement (DGA) a annoncé des commandes, passées en 2023 et totalisant 20,3 Mds€, pour renouveler et moderniser les capacités aérienne, terrestre, navale, forces spéciales et missiles.

Armée de l’Air et de l’Espace. Un contrat de 42 avions Rafale en version monoplace au standard F4 a été notifié aux sociétés Dassault Aviation, Thales, Safran et MBDA. Le standard F4 comprend l’intégration du poste radio Contact, du missile Mica de nouvelle génération et du brouilleur autonome numérique intégré au système d’autoprotection Spectra. Le premier appareil sera livré en 2027. Les avions évolueront vers le standard F5 après 2030.

Armée de Terre. La société Nexter Systems, filiale du groupe franco-allemand KNDS, a reçu commande de 109 systèmes d’artillerie Caesar nouvelle génération (Mk II), dont la première livraison aura lieu en 2026. Le système Caesar se compose d’un canon de 155 mm d’une portée de 40 km et monté sur un camion 6X6 à cabine blindée. Sa mobilité lui permet d’atteindre plus de 80 km/h sur route sur une distance supérieure à 600 km. Le Caesar Mk II disposera d’une cabine au blindage renforcé contre les engins explosifs improvisés, mines, munitions de petit calibre et éclats d’artillerie. Il sera équipé d’une motorisation de 460 cv, contre 2015 cv auparavant, d’une boîte de vitesses automatiques, d’un nouveau châssis et d’un logiciel de conduite de tir de nouvelle génération. Compatible avec les munitions actuelles, il pourra utiliser les futures munitions de précision. Il sera compatible avec les matériels des programmes Scorpion interconnectés, grâce à une « vétronique » commune, à savoir l’architecture des systèmes de navigation, de contrôle, de communications, d’observation et de protection.

Marine nationale. La DGA a commandé 7 patrouilleurs hauturiers pour remplacer les patrouilleurs de haute mer basés à Brest et Toulon et les patrouilleurs de service public de Cherbourg. Leurs missions portent sur le soutien à la dissuasion nucléaire, la présence dans les zones de souveraineté et d’intérêt national, l’évacuation de personnels, l’escorte et l’intervention pour l’action de l’État en mer. Outre leur capacité de traitement de l’information et une tenue à la mer performante, ils pourront mettre en œuvre un hélicoptère ou un drone dans la durée. La première livraison aura lieu en 2026, en vue de la mise en service de 10 unités vers 2035. Naval Group a obtenu le contrat de modernisation du porte-avions Charles-de-Gaulle lors de son troisième arrêt technique majeur en 2027-2028. Les travaux porteront sur la mise en place du nouveau système de combat Setis 3.0 de Naval Group, du nouveau radar à quatre panneaux fixes Sea Fire (Thales) pour la lutte antimissile et du système de tir reconfigurable (MBDA) pour les missiles Aster. Après les Courbet et La-Fayette, la frégate Aconit a terminé sa modernisation et ses essais à la mer pour rester en service au-delà de 2030. Les travaux ont porté sur le système de combat, la veille optronique et le système de défense anti-aérienne.

Forces spéciales. La DGA a commandé 8 hélicoptères NH90 Caïman standard 2 pour remplacer les Caracal et Cougar du 4ème Régiment d’hélicoptères des forces spéciales en 2026-2029. Le standard 2 étendra les capacités d’insertion et d’extraction de commandos, d’appui-feu et de communications tactiques, grâce à une caméra infrarouge avec pointeur et désignateur laser, de nouveaux armements et un kit de communications.

Missiles. La DGA a commandé à MBDA 1.300 missiles moyenne portée Akeron et 329 missiles très courte portée Mistral 3. Outre une précision métrique et son mode « tire et oublie », l’Akeron neutralise des cibles statiques ou mobiles à 4 km, de jour comme de nuit, et conserve l’homme dans la boucle de décision. Le Mistral 3 fonctionne en « tire et oublie » contre les avions, hélicoptères, drones, missiles de croisière et munitions rôdeuses.

Loïc Salmon

Guerres : bilan 2022 et transferts mondiaux d’armements

Armement : la coalition « Artillerie pour l’Ukraine »

04ème Régiment d’hélicoptères des forces spéciales




Armement : la coalition « Artillerie pour l’Ukraine »

Une coalition, dirigée par la France et les États-Unis, vise à orienter, fédérer et coordonner les initiatives des pays participants pour équiper, former et structurer l’artillerie de l’Ukraine.

Annoncée le 18 janvier 2024 par le ministre des Armées Sébastien Lecornu, cette coalition a été présentée à la presse le 25 janvier par le général de division Jean-Michel Guilloton, commandant de l’entraînement au combat interarmes et de la base de défense de Mourmelon-Mailly.

Selon le ministère des Armées, la France propose à l’Ukraine une offre complète de soutien militaire : livraisons capacitaires, de l’équipement individuel au char de combat ; maintien des matériels en condition opérationnelle ; munitions ; formation. Elle lui fournira 3.000 obus de 155 mm par mois, une quarantaine de missiles de croisière Scalp et plusieurs centaines de bombes A2SM longue portée.

La situation du front. Depuis l’invasion russe du 22 février 2022, indique le général Guilloton, l’armée ukrainienne montre des signes d’usure avec l’échec de la contre-offensive du printemps 2023, malgré la livraison importante de matériels occidentaux. En matière d’artillerie, l’armée russe tire six fois plus d’obus que la partie ukrainienne et accentue sa pression sur le front. Elle impose son tempo opérationnel et conserve l’initiative. A l’arrière, la Russie a transformé son industrie en économie et de guerre et, grâce à des partenariats, aurait reçu près d’un million d’obus de la Corée du Nord et des drones armés de l’Iran. Depuis la seconde guerre mondiale, l’armée russe compte sur son artillerie pour conduire la guerre avec une masse très variée de canons, lance-roquettes multiples, missiles longue portée et drones armés. Elle frappe, très loin dans la profondeur, les points névralgiques ukrainiens, les centres énergétiques et la population. Le champ de bataille devient transparent par la connexion directe des capteurs à l’artillerie longue portée et fait l’objet d’une guerre hybride via la propagande et l’influence. De son côté, l’Ukraine va bientôt atteindre son maximum en matière d’équipements, de logistique, de capacité de combat et de munitions. En face, la Russie s’est organisée en ordre de marche pour favoriser son rapport de force dans la durée.

La coalition « Artillerie ». Sur proposition des États-Unis, les 54 nations alliées pour la défense de l’Ukraine (31 membres de l’OTAN et 23 hors OTAN), réunies sur la base aérienne de l’OTAN à Ramstein (Allemagne), ont constitué un groupe de contact, dit « format Ramstein ». Le 19 septembre 2023 et afin de mieux coordonner l’aide apportée à l’Ukraine, rappelle le général Guilloton, elles ont défini cinq coalitions capacitaires majeures, à savoir maritime, aérienne, blindée, défense sol-air et artillerie sol-sol. Dans ce cadre, la France a pris la direction de la coalition de l’artillerie sol-sol. Actuellement, l’artillerie ukrainienne compte plusieurs milliers de pièces, dont 30 canons Caesar français et 19 Caesar danois. Le ministre des Armés a annoncé la livraison prochaine de 6 Caesar et une offre de 72 autres, dont 12 financés par la France et les autres par les diverses nations alliées. Une vingtaine d’États ont manifesté leur intérêt pour cette coalition, co-dirigée par les États-Unis qui ont déjà proposé plusieurs centaines de milliers d’obus. L’aide inclut tous les systèmes d’artillerie de 105 mm à 155 mm, les lance-roquettes et les capacités émergentes. En 2023, la France a formé 5.000 combattants ukrainiens, dont 350 artilleurs. L’objectif de 2024 porte sur 7.000-9.000 combattants, dont 220 artilleurs. A court terme, il s’agit de répondre aux besoins urgents en munitions et en maintenance et réparations des matériels cédés. Le moyen terme concerne la création d’une nouvelle armée ukrainienne interopérable au standard OTAN. Le long terme porte sur la mise en œuvre d’une production nationale ukrainienne, sous licence étrangère, de lanceurs, de munitions, de pièces détachées et de matériels logistiques.

Loïc Salmon

Russie : confit en Ukraine, mobilisation partielle et fragilités

Ukraine : ascendant opérationnel incertain dans le conflit en cours

Armements terrestres : enjeux capacitaires et industriels dans le contexte du conflit en Ukraine




Guerres : bilan 2022 et transferts mondiaux d’armements

Le nombre de conflits armés a progressé en 2022, alors que les transferts internationaux d’armes ont diminué. Toutefois, le nombre d’ogives nucléaires en alerte opérationnelle est resté stable.

C’est ce qui ressort du rapport annuel du Sipri (Institut international de Stockholm sur la paix), dont un résumé en français a été publié, début décembre 2023 à Bruxelles, par le Grip (Groupe de recherche et d’information sur la paix et la sécurité).

Conflits armés. La guerre en Ukraine a été le seul conflit interétatique majeur impliquant des armées permanentes. Hors d’Europe, les conflits ont continué entre États aux frontières poreuses avec la participation de groupes armés non-étatiques, à savoir réseaux djihadistes, organisations criminelles, forces séparatistes et groupes rebelles. En tout, 56 pays se sont trouvés en état de guerre, soit 5 de plus qu’en 2021, avec plus de 147.600 morts, soit un peu moins qu’en 2021. Les combats ont causé plus de 10.000 morts en Ukraine, au Myanmar (Birmanie) et au Nigeria. Outre des conflits armés causant moins de 1.000 morts, l’Afrique a connu deux coups d’État réussis et trois tentatives infructueuses. Encore considéré comme un canal valable de coopération, le Conseil de sécurité de l’ONU a continué de mandater, au même rythme qu’en 2021, des opérations de paix, des régimes de sanctions et des initiatives de médiation, notamment en Afghanistan, en Haïti et au Myanmar. En Afrique, les forces armées nationales et multinationales sont parvenues à repousser les groupes djihadistes en Somalie et au Mozambique.

Privatisation croissante des conflits. Aucune définition universellement acceptée et juridiquement contraignante ne caractérise les sociétés militaires et de sécurité privées (SMSP), apparues lors des guerres en Irak (2003-2011) et d’Afghanistan (2001-2021). Actives dans le monde entier pour des clients très divers, les SMSP assument des responsabilités de sécurité mais aussi dans des fonctions essentielles de l’État et d’entreprises clés des pays d’accueil. Ceux-ci se procurent ainsi des compétences et des services à moindre coût. Selon le Sipri, les États-Unis, la Grande-Bretagne, la Chine et l’Afrique du Sud abriteraient 70 % des SMSP. Chine et Russie déploient les leurs en Afrique, en vue du contrôle et de l’extraction des ressources naturelles. Toutefois, la Russie, a utilisé ses SMSP au combat en Libye, Syrie, Ukraine et Afrique subsaharienne. L’une d’elles, le groupe Wagner, est connue pour ses violations des droits de l’homme et du droit humanitaire, contrats abusifs et ingérences dans les élections locales.

Transferts d’armements. Les États soumis à des conflits armés ou des tensions politiques internes ont tendance à acquérir de l’armement à l’étranger. Selon le Sipri, le volume de transferts internationaux d’armes majeures de la période 2018-2022 a diminué de 5,1 % par rapport à 2013-2017. Parmi les 63 États exportateurs, les États-Unis, la Russie, la France, la Chine et l’Allemagne contrôlent 76 % du marché mondial. En 2018-2022, la part des États-Unis est passée à 40 % du total mondial (+ 14 % par rapport à 2013-2017) et celle de la Russie à 16 % (- 31 %). Pendant la même période, les exportations d’armes de la France ont augmenté de 44 %, tandis que celles de la Chine ont diminué de 23 % et celles de l’Allemagne de 35 %. Parmi les 167 États acheteurs d’armes, l’Inde, l’Arabie saoudite, le Qatar, l’Australie et la Chine ont acquis 36 % du total. Par zones d’importation, l’Asie-Pacifique arrive en tête avec 41 % du total, suivie du Moyen-Orient (31 %), de l’Europe (16 %), des Amériques (5,8 %) et de l’Afrique (5 %). Le Sipri évalue le commerce des armes à 127 milliards de dollars en 2021, soit…0,5 % du commerce international mondial !

Forces nucléaires. Début 2023, États-Unis, Russie, Grande-Bretagne, France, Chine, Inde, Pakistan, Corée du Nord et Israël totalisent 12.512 armes nucléaires, dont 9.576 potentiellement disponibles sur le plan opérationnel. Les forces armées en déploient 3.844, dont 2.000 en état d’alerte.

Loïc Salmon

La nouvelle guerre secrète

Russie : partenariats en Afrique, son principal marché d’exportation d’armement

Afrique : zone d’intérêt stratégique accru pour la Chine

 




Indopacifique : trafics d’armes à feu légères en hausse

Les trafics d’armes légères et de petit calibre (ALPC), liés à ceux de la drogue et d’êtres humains, au braconnage et à la piraterie, augmentent dans la zone Indopacifique, qui ne bénéficie d’aucune institution régionale de coordination de lutte et de prévention.

C’est ce qui ressort d’une étude, publiée, en mars 2023 à Paris, par l’Institut de recherche stratégique de l’Éole militaire. Y ont notamment contribué : Marie-Pierre Arnold, section de lutte contre les armes à feu, Office des Nations unies contre les drogues et le crime (ONUDC) ; Himayu Shiotani, directeur de la politique internationale à l’organisation britannique non gouvernementale Conflict Armement Research (CAR) ; Cyrille Poirier-Coutansais, directeur de recherche au Centre d’études stratégiques de la marine.

Les menaces. Selon un rapport du secrétaire général des Nations unies, les ALPC ont causé environ 30 % des décès civils dans les conflits armés en 2020 et ont été utilisées pour mener plus de 85.000 attaques terroristes entre 2011 et 2020. Des liens directs existent entre trafics d’armes, terrorisme et conflits armés, souligne Marie-Pierre Arnold. Les organisations criminelles, actives dans les trafics d’armes, d’ivoire, d’écailles de pangolin, d’animaux sauvages et de bois, vendent aux groupes terroristes les armes qu’ils auraient de grandes difficultés à acquérir, comme des missiles air-sol américains en échange de drogue d’origine sri-lankaise. En Asie du Sud-Est, le trafic illégal de bois nécessite des ALPC pour assurer la protection des sites déboisés et du transport du bois. En outre, certains États vendent légalement des bois à des groupes de criminalité organisée en échange d’armement. Par ailleurs, le Pakistan et l’Afghanistan jouent un rôle majeur dans les trafics d’armes dans la zone Indopacifique. Depuis les années 1980, de nombreuses armes en parfait état ont été laissées en Afghanistan par les forces armées soviétiques puis de l’OTAN. Puis, les talibans vendent ces armes, trop modernes pour eux, à des groupes terroristes capables de les utiliser. Les circuits des armes suivent ceux de la drogue d’Afghanistan vers l’Asie du Sud et l’Asie du Sud-Est. Contrairement à CAR (voir plus loin), l’ONUDC ne peut effectuer d’enquêtes sur le terrain. Il se base sur les informations transmises par les États eux-mêmes et en disposent peu pour la zone Indopacifique. L’ONUDC est chargé du respect du Protocole contre la fabrication et le trafic illicite d’armes à feu, de leurs pièces éléments et munitions mais pas de celui du Traité sur le commerce des armes (TCA). Or ces instruments juridiques, très complémentaires, suscitent peu d’adhésions dans la zone. Ainsi, l’Australie, l’Archipel des Palaos et la Corée du Sud ont ratifié les deux, le Japon n’a pas ratifié le Protocole, l’Inde n’a pas signé le TCA et la Thaïlande n’a signé aucun des deux. Enfin, l’ONUDC a élaboré un programme d’enquêtes sur les flux financiers relatifs aux trafics d’ALPC, car les réseaux criminels ne sont pas toujours situés sur le territoire de certains États, mais utilisés au sein de leur diaspora à l’étranger.

Les détournements d’armes. Selon Himayu Shiotani, les enquêtes de terrain de CAR ont identifié plus de 600.000 armes, munitions et matériels connexes détournés dans 26 États. Ces détournements se classent en quatre catégories. La première porte sur la mauvaise gestion des stocks nationaux d’armes, facilitant des détournements accidentels ou volontaires par manque de suivi des livraisons, dont ont profité les talibans et d’autres groupes armés. La deuxième catégorie concerne les re-transferts non autorisés. Un importateur officiel redirige les armes vers un autre importateur, mais sans l’accord de l’exportateur initial. Des missiles antichars bulgares ont ainsi été exportés vers un pays tiers, d’où ils ont été retransférés à des destinataires irakiens. Soit l’exportateur initial n’avait pas demandé de garanties suffisantes quant à la réexportation des armes vendues, soit cela résulte de lacunes dans les contrôles post-livraisons, de difficultés posées par le traçage des armes détournées ou du manque de partage d’informations. La troisième catégorie porte sur la captation d’armes sur le champ de bataille. Ainsi, des systèmes portatifs de défense aérienne polonais, issus d’un lot envoyé en Géorgie pendant la guerre contre la Russie en 2008, ont été retrouvés en 2018 chez des groupes armés illégaux dans la région du Donbass (Ukraine). La quatrième catégorie concerne les détournements consécutifs à l’effondrement d’un État. Par exemple, des grenades antichars RPG-7 nord-coréennes, volées dans une caserne libyenne après la chute du régime Kadhafi en 2011, ont été interceptées en 2014 au Liban à bord d’un cargo venu de Libye. D’autres grenades, issues du même lot, ont été retrouvées en Centrafrique. Selon CAR, ce risque de détournement d’armes peut être évalué par des indices relatifs à l’importateur, à l’entité finançant l’achat, au destinataire ou à la logistique du transfert. Une enquête approfondie sur les réseaux de fournitures d’armes à l’État islamique, en Syrie et en Irak, a établi son intérêt pour le développement de moteurs d’aéronefs capables de larguer des engins explosifs improvisés, en montant de fausses entreprises dans des pays voisins et en y détournant des composants d’explosifs à l’insu des producteurs. En cas de détournement d’armes, souligne CAR, il faut d’abord identifier celles-ci. Les analyses de saisies d’ALPC ont identifié des copies non enregistrées d’armes, des oblitérations de leurs éléments d’identification ou des assemblages, sur place, d’armes envoyées en pièces détachées. En 2021-2022, CAR a répondu à plus de 4.500 demandes de traçage d’armes avec un taux de réussite de 42 %.

La voie maritime. La mondialisation et l’internet ont entraîné une extension considérable des trafics illicites par voie maritime sur toute la planète, indique Cyrille Poirier-Coutansais. La cocaïne entre massivement en Europe à bord de porte-conteneurs, car l’économie à flux tendus rend impossible un contrôle approfondi et facilite la dissimulation de quelques conteneurs remplis de drogue parmi des centaines d’autres. Par ailleurs, avec la fin de la guerre froide (1991), les États-Unis, la Russie et les pays européens ont réduit leur présence navale partout. Toutefois, un réarmement naval des pays asiatiques se manifeste dans toute la zone Indopacifique. En outre, depuis la crise financière de 2007-2008, la production industrielle se relocalise dans de grandes aires régionales. Malgré une reprise du transport maritime en 2020-2021 après la pandémie du Covid-19, sa croissance reste inférieure à celle du produit intérieur brut mondial depuis 2007-2008. La numérisation de l’industrie, qui accompagne la relocalisation de la production, renforce les compétitivités européenne et américaine face à la concurrence asiatique. Par ailleurs, la vision universaliste fait place à un raisonnement réduit à l’échelle d’un continent, estime Cyrille Poirier-Coutansais. Ainsi en matière de lutte contre le réchauffement climatique, l’Union européenne envisage l’instauration d’une taxe carbone à ses frontières, qui constitue, de fait, une barrière douanière et protège le fonctionnement propre à son organisation. Parmi les autres États européens, seule la France possède des intérêts directs dans la zone Indopacifique. La lutte contre la piraterie somalienne a nécessité une coopération entre les Marines européennes, américaine, indienne, chinoise, japonaise et russe dans la zone Indopacifique. Mais la guerre en Ukraine révèle déjà une forme d’indifférence vis-à-vis des événements internationaux dans certaines régions éloignées. En outre, les adoptions de convention internationales d’intérêt commun, comme l’utilisation durable de la biodiversité marine en haute mer, deviennent très difficiles, même dans le cadre de l’ONU. Or la lutte contre les trafics d’ALPC en Indopacifique nécessite un accord international pour la mise en œuvre d’outils juridiques et de moyens efficaces de surveillance des conteneurs (traqueurs de localisation et drones).

Loïc Salmon

Sécurité : les armes légères et la lutte contre leurs trafics

Stratégie : l’action de la France dans la zone indopacifique

Asie-Pacifique : Inde, Chine et Taïwan, acteurs de la sécurité




Armement : l’IA dans l’emploi des drones aériens et sous-marins

L’intelligence artificielle (IA) va inverser la logique d’utilisation des drones aériens. Elle doit devenir un équipier de confiance de l’humain dans la coordination des véhicules sous-marins semi-autonomes.

Cette problématique a été abordée lors du colloque « Intelligence artificielle et commandement militaire » organisé, le 28 septembre 2023 à Paris, par le Centre de recherche Saint-Cyr Coëtquidan (CReC) et le groupe Nexter, spécialisé dans les systèmes pour les forces terrestres. Y sont notamment intervenus : Jean-Marc Moschetta, professeur à l’Isae-Supaéro (Institut supérieur d’aéronautique et de l’espace) ; Jean-Michel Tran, directeur du domaine technique IA chez Naval Group (construction navale de défense).

Les essaims de drones aériens. Alors que la mise en œuvre d’un drone de combat de grandes dimensions mobilise plusieurs personnels, celle d’un essaim de petits drones ne nécessite qu’un seul opérateur, explique Jean-Marc Moschetta. Le rapport de mars 2021 du groupe d’experts du Conseil de sécurité de l’ONU sur la Libye indique que les forces armées et les convois logistiques de la faction du maréchal Khalifa Haftar ont été pourchassés et pris à partie à distance par des drones de combat ou des systèmes d’armes létaux autonomes et autres munitions rôdeuses, programmés pour attaquer des cibles en mode de guidage automatique. Cela a été possible grâce à la miniaturisation de drones peu onéreux et aux progrès réalisés dans l’informatique distribuée et dans l’information à fréquences millimétriques (60 GHz+ et très large bande). Les essaims de drones présentent des avantages : discrétion, facilitée par une faible signature visuelle ou radar ; saturation, qui désorganise la défense adverse par leur surnombre ; coût peu élevé, comme les drones en carton de 120 km de portée ; résilience par des réseaux « ad hoc » de relais d’information et des calculs en essaim. Toutefois, des faiblesses persistent : déploiement simultané à proximité de l’adversaire ; élongation et endurance réduites nécessitant des remplacements ou l’insertion de nouveaux drones ; sensibilité au vent limitant la vitesse d’évolution ; emport de charge utile réduite par la miniaturisation ; risque de piratage informatique. Déployés en masse par avion ou véhicule terrestre, les essaims de drones évoluent en patrouille avec une réduction des 30 % – 40 % de la traînée induite de chacun. Ils ne tirent pas leur efficacité de chacun d’eux mais de leurs relations et favorisent plus d’IA et d’intelligence collective, non traçable et capable d’initiatives. L’intelligence collective, indique Jean-Marc Moschetta, ne résulte pas du travail à plusieurs ni de la somme des intelligences individuelles. Elle existe dans la nature : dynamiques de groupes des oiseaux migrateurs, qui évitent la collision, conservent le cap par alignement et non-éloignement des individus ; saturation pratiquée par les gnous africains lors du passage d’un rivière infestée de crocodiles ; allocation dynamique des tâches parmi les « travailleurs à bec rouge », oiseaux sauvages d’Afrique. Selon Jean-Marc Moschetta, l’emploi de l’IA avec les essaims de drones présente certains risques. Le premier concerne la perte de contrôle sur l’exécution précise de l’action militaire, en raison de l’impossibilité de contrôler chaque drone et de la dispersion des sous-munitions avec des effets collatéraux. S’y ajoute l’effet d’emballement où plus rien ne fonctionne bien. Le deuxième risque porte sur l’infraction aux règles d’engagement en raison de l’absence de discrimination entre combattants et non-combattants et de l’obligation de nombreuses mises en situation.

Les véhicules sous-marins autonomes. L’autonomie d’un drone sous-marin repose sur une interdépendance entre la décision de l’opérateur, la communication avec le drone et la position du drone, explique Jean-Michel Tran. L’organe de décision mène la mission opérationnelle. Celui de la communication transmet les informations relatives au besoin opérationnel, les intentions et un possible recouvrement des communications après une période d’interruption. L’organe de positionnement permet une garantie contre une erreur de position. L’emploi des drones sous-marins rencontre des difficultés spécifiques : absence de système de positionnement externe type GPS ; impossibilité d’équiper la zone d’intervention de moyens de repères fixes ; soumission des mesures inertielles à la dérive du drone ; présence de courants, variables dans le temps et l’espace ; impossibilité d’utiliser parfois certains senseurs par souci de discrétion ; coûts très élevés des senseurs performants ; portée limitée à quelques kilomètres ; débits très réduits de l’ordre de 50 bits/s utiles ; absence de communication simultanée ; interférences avec certains senseurs acoustiques ; impossibilité de maintenir une ouverture permanente du canal de communication ; délai de propagation de plusieurs secondes ; variabilité de la qualité du canal en raison de trajets multiples, de la bathycélérimétrie, de l’environnement biologique, du trafic maritime et des conditions météorologiques (pluie ou vent). Dans ces conditions, le suivi humain s’avère difficile pour les missions de longue durée, en raison des évolutions imprévisibles dans un environnement non structuré, dynamique et pas ou partiellement connu. Le déplacement d’un drone coûte cher et prend du temps. Il convient donc de bien planifier une mission de haut niveau selon des objectifs et des contraintes. En effet, le drone « comprend » ses objectifs et peut s’adapter à des situations changeantes et imprévisibles durant toute la durée de sa mission. Par ailleurs, la doctrine militaire doit être prise en compte. Par exemple, dans le golfe Arabo-Persique, un drone pourrait devoir intercepter un navire transportant des véhicules et effectuer une recherche dans une zone présentant des endroits interdits à la navigation et des navires à éviter. L’opérateur a accepté la planification initiale, puis le drone effectue sa mission en ré-évaluant régulièrement différentes options. Il n’existe pas nécessairement de solution optimale, afin de respecter la doctrine militaire qui doit être facilement reprogrammable. Il convient donc de conserver une certaine part d’audace et de proposer des solutions alternatives plus efficaces, mais qui ne respectent pas strictement la doctrine. En intelligence artificielle, l’apprentissage par renforcement permet à un robot ou un drone d’apprendre à prendre des décisions dans un environnement dynamique, en tenant compte du temps, de l’incertitude et des conséquences, non immédiates, de ses actions. Au niveau de l’apprentissage, le drone est entraîné à résoudre les problèmes que rencontrent les marins. Lorsqu’il définit la mission du drone, l’opérateur doit en préciser les contraintes (navigation, émissions électromagnétiques et acoustiques), les marges à respecter (énergie, position) et les traits de caractères (curiosité, discrétion). Il doit aussi délivrer des autorisations d’autonomie pour une replanification de la mission : altération des paramètres des objectifs de mission ; abandon total ou partiel de certaines parties ; réengagement de la mission ; éloignement plus ou moins temporel et spatial du contrat initial. Vu le coût onéreux des drones sous-marins, leur emploi en essaim nécessitera une hétérogénéité de drones performants et chers avec d’autres qui le sont moins, mais qui sont spécialisés dans une mission précise pour un temps donné. La complexité d’emploi de tels systèmes nécessitera des systèmes d’aide à la décision et l’utilisation de grosses unités porte-drones ou porte-armes pour remplir la mission. Le déploiement des drones plus petits et perdables sera probablement laissé à ces grosses unités et échappera complètement aux opérateurs, afin de limiter la complexité de la mission. Grâce à des séquences d’action de haut niveau pour chaque drone, l’essaim pourra atteindre son objectif via une coopération entre les drones, malgré des communications marines limitées. Naval Group y travaille.

Loïc Salmon

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Russie : partenariats en Afrique, son principal marché d’exportation d’armement

La coopération entre la Russie et les pays africains porte sur la sécurité, la défense et les ressources stratégiques. Elle s’inscrit dans une opposition commune aux pays occidentaux soupçonnés de « néo-colonialisme », notamment lors des coups d’État militaires au Mali (2021), au Burkina Faso (2022) et au Niger (2023).

Les relations russo-africaines ont fait l’objet de deux notes d’analyse : l’une sur la coopération proprement dite, publiée en juillet 2023 à Paris par Djenabou Cisse, chargée de recherche à la Fondation pour la recherche stratégique ; l’autre intitulée « Ventes d’armes russes en Afrique, les effets contrariés des sanctions occidentales », publiée le 31 mai 2023 à Bruxelles par Agatha Verdebout du Groupe de recherche et d’information sur la paix et la sécurité (GRIP).

Partenariats anciens réactivés. Dès la fin du XVIIIème siècle, la Russie ouvre deux consulats en Égypte (Alexandrie et Le Caire), rappelle Djenabou Cisse. En 1898, elle établit des relations diplomatiques avec l’Éthiopie et la République sud-africaine (Transvaal) et ouvre un consulat général au Maroc. Après la révolution bolchévique de 1917, la Russie attire de nombreux activistes africains, désireux d’y acquérir une formation politique. Pendant la guerre froide (1947-1991), l’Union soviétique soutient les mouvements indépendantistes contre les puissances coloniales occidentales, à savoir en Guinée et au Mali contre la France et au Ghana contre la Grande-Bretagne. Dans les années 1970, elle signe des accords de coopération avec l’Algérie, la Libye, le Mali, le Kenya et la Somalie. Outre la vente d’armes, elle apporte une assistance économique, sous formes de prêts, crédits et programmes de bourses d’études, et forme des milliers d’Africains dans ses universités, académies politiques et écoles militaires. Toutefois, Moscou n’est pas parvenu à transformer la plupart de ses partenariats africains en alliances stratégiques solides, en raison du nombre croissant d’États africains non-alignés. La dissolution de l’URSS, fin 1991, entraîne la fermeture de ses points d’appui militaires et de certaines représentations diplomatiques et culturelles en Afrique. La Russie abandonne même son projet d’aide au complexe sidérurgique d’Ajaokuta au Nigeria, pourtant construit à à 98 %. En 1993, la part africaine des échanges est tombée à 2 % de son commerce extérieur. Le retour de la Russie en Afrique, amorcé entre 2004 et 2008, s’accélère après son annexion de la Crimée en 2014, début des tensions avec l’Occident. Sa nouvelle politique d’influence met en avant son absence de passé colonial en Afrique et inclut l’offre de son expérience opérationnelle, acquise lors de son intervention en Syrie à partir de septembre 2015. Depuis 2017, Moscou a signé une vingtaine d’accords bilatéraux de défense, avec des pays africains (voir encadré). Un premier sommet entre la Russie et une quarantaine de pays africains est organisé à Sotchi, au bord de la mer Noire, en octobre 2019. En Centrafrique et au Mali, la Russie est devenue le principal partenaire de sécurité des régimes en place, isolés sur la scène internationale. De leur côté, les pays africains veulent diversifier leurs partenariats pour réduire leurs dépendances à certains alliés occidentaux, dans un contexte de réduction de l’aide publique européenne depuis plusieurs décennies. Actuellement, de nombreux pays africains maintiennent une coopération avec la Russie, mais aussi avec la Chine et quelques pays occidentaux.

Sécurité contre ressources stratégiques. La Russie, indique Djenabou Cisse, ne dispose pas de base militaire permanente en Afrique mais a conclu, avec le Soudan en 2020, un projet de construction d’un « point d’appui technique et matériel » à Port-Soudan, qui lui offrira un accès au golfe d’Aden et à la mer Rouge. Conformément à sa doctrine de non-ingérence dans les affaires intérieures des États souverains, la Russie ne déploie pas de forces armées régulières en Afrique mais recourt à des sociétés militaires privées, dont le groupe Wagner. La République centrafricaine (RCA) a servi de laboratoire à Wagner, qui assure la sécurité du régime en place en échange d’un accès direct aux ressources minières (diamants et or). Le groupe se déploie dans les pays où la Russie a des intérêts et où une crise politique et sécuritaire survient. Son intervention en Libye, en 2019, permet à la Russie de pérenniser sa présence au Soudan et en RCA. Au Mali, la junte militaire a sollicité Wagner pour lutter contre les groupes armés terroristes, après le départ des troupes françaises en 2016, et lui fournit des moyens logistiques (vivres, carburant et matériels). Actif dans l’orpaillage artisanal, Wagner y a créé deux sociétés minières en vue d’exploiter les mines d’or du pays, pour pallier les difficultés de paiement de la junte malienne. En outre, Wagner participe à la guerre informationnelle de la Russie en Afrique, basée sur une rhétorique anticoloniale, anti-occidentale et panafricaniste. Au réseau diplomatique et de coopération internationale de la Russie, s’ajoutent les médias Sputnik et Russia Today à l’audience significative dans de nombreux pays. Par ailleurs, l’entreprise d’exploration géologique russe Rosgeo a conclu un mémorandum d’accord avec le ministère malgache des Mines, de l’Industrie et du Pétrole en 2018. Dans le nucléaire civil, la Russie a signé des protocoles d’accord avec 18 pays africains, dont l’Éthiopie, le Nigeria, le Rwanda et la Zambie. En juin 2022, l’entreprise publique russe Rosatom a commencé la construction de la première centrale nucléaire d’Égypte pour un coût de 30 Mds$, financé à 85 % par un prêt russe.

Effets des sanctions occidentales. Selon Agatha Verdebout, la portée géographique des sanctions contre la Russie, prises à la suite de son attaque contre l’Ukraine en 2022, reste limitée. La Russie les contourne par des mécanismes d’importation via des pays tiers, de réexportation directe ou indirecte, de revente en cours de route ou de faux transits, notamment en Arménie et au Kazakhstan. En quelques mois, elle a ainsi rétabli ses approvisionnements en micro-puces et semi-conducteurs, indispensables à son industrie militaire. Elle en a aussi acquis en Chine, son principal fournisseur avant la guerre, et a lancé, en avril 2022, un plan massif d’investissement dans la production locale (38,6 Mds$ sur 8 ans). En outre, dans le cadre de son projet d’un ordre mondial multipolaire et pour briser son isolement économique et diplomatique, la Russie a réitéré ses propositions de ventes d’armement aux pays africains…qui disposent de 54 sièges à l’ONU ! Toutefois, souligne Agatha Verdebout, les États africains entendent maintenir une neutralité sur la question ukrainienne et préserver leurs intérêts stratégiques par des achats d’armement aux pays leur offrant les conditions les plus favorables.

Loïc Salmon

Selon l’Institut international de Stockholm de recherche sur la paix et pour la période 2018-2022, 40 % des importations africaines d’armes lourdes proviennent de la Russie, 16 % des États-Unis, 9,8 % de la Chine et 7,6 % de la France. La Russie vend des armes à 18 pays, dont l’Algérie, l’Égypte et l’Angola. En Afrique sub-saharienne, la part russe est passée de 23 % en 2013-2017 à 26 % en 2018-2022. Fournisseur des flottes aériennes de plusieurs pays africains depuis les années 1970, la Russie leur propose de réparer ou de remplacer leurs avions. Depuis 2017, elle a livré au Mali des hélicoptères de combat Mi-35, Mi-171 et Mi-8 ainsi que des avions de combat Su-25 et d’entraînement Albatros L-39. En 2019, elle a vendu 12 chasseurs Su-30K d’un montant d’un milliard de dollars à l’Angola, qui souhaite pouvoir assembler des matériels russes sur son territoire. Par ailleurs, selon le GRIP, la Russie a signé ou renouvelé des accords de coopération : en 2017 avec le Tchad, le Niger, le Nigeria, la Zambie et le Mozambique ; en 2018 avec la Guinée, le Soudan, l’Éthiopie, la Centrafrique, la République démocratique du Congo, le Botswana et Madagascar ; en 2019 avec le Mali, le Congo et l’Angola ; en 2021 avec la Mauritanie et le Gabon.

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Espace : résurgence de la menace antisatellites

Le développement d’armes antisatellites aux effets potentiellement coercitifs permet à la Russie de manifester sa capacité de nuisance vis-à-vis des nombreux satellites en orbite basse.

Christian Maire, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique, l’explique dans une note publiée le 15 décembre 2022 à Paris.

Les orbites. En orbite basse jusqu’à 2.000 km d’altitude, les satellites tournent autour de la terre à la vitesse d’environ 8 km/seconde et ne restent que quelques minutes en visibilité d’un point donné. La Station spatiale internationale se trouve à 400 km d’altitude et la constellation américaine privée Starlink à 550 km. Sur cette orbite, les satellites assurent trois types de missions : civiles à buts technologiques, scientifiques, d’observation et de communications ; militaires pour l’observation, l’écoute et la météorologie ; duales pour l’observation et les communications. En orbite moyenne à plus ou moins 20.000 km d’altitude, les constellations d’au moins 24 satellites de navigation offrent une couverture mondiale permanente aux grandes puissances : Glonass (19.100 km) pour la Russie ; GPS (20.200 km) pour les Etats-Unis ; Galileo (23.222 km) pour l’Union européenne ; Beidou/Compass (27.878 km) pour la Chine. En orbite géostationnaire à 36.000 km au-dessus de l’équateur, les satellites tournent à la vitesse de la terre et restent fixes par rapport au sol. Les satellites civils relaient les télécommunications (télédiffusion directe, téléphonie et internet) et recueillent des données météorologiques. Les satellites militaires remplissent des missions d’alerte précoce, de communications, d’écoute, de météorologie, d’observation et de détection d’explosions nucléaires. Ceux à vocation duale servent à la navigation et aux communications. L’application militaire des satellites de navigation concerne notamment les missiles balistiques, les armes de précision et les planeurs hypersoniques. Entre janvier et septembre 2022, 68 satellites de toutes catégories ont été lancés par les Etats-Unis, 44 par la Chine, mais seulement 11 par la Russie.

Les armes antisatellites. Connues depuis les années 1960, les armes antisatellites se répartissent ainsi : celles à ascension directe ; celles à charge nucléaire ; celles à énergie dirigée, basées au sol ou dans l’espace ; brouillage électronique ; moyens cybers. Il n’y a pas encore eu d’essais de destruction de cibles dans les orbites moyenne et géostationnaire. L’orbite basse, plus accessible sur les plans technique et temporel par les armes antisatellites à ascension directe (DA-ASAT), reste la plus fréquentée et donc la plus vulnérable (voir encadré). Toutefois, l’espacement entre satellites constitue une contrainte pour une DA-ASAT qui, en outre, mettrait plusieurs heures à atteindre sa cible, donnant ainsi un préavis important au pays menacé. En 1985, les États-Unis effectuent le premier essai de DA-SAT avec un missile ASM-135 tiré depuis un avion de chasse F-15A modifié, qui a détruit un satellite à 555 km d’altitude. En 2007, la Chine détruit un satellite météorologique à 865 km d’altitude, provoquant la projection de plusieurs milliers de débris en orbite basse. En 2019, l’Inde détruit un satellite en orbite très basse, pour limiter la production de débris de longue durée de vie. En 2021, la Russie détruit un vieux satellite militaire d’écoute électronique de 1.750 kg à environ 465 km d’altitude. Elle a utilisé un missile antibalistique Nudol, à charge non nucléaire et équipé d’un vecteur terminal montant jusqu’à 850 km. Ce dernier aurait été muni d’un véhicule « tueur » avec une charge militaire à fragmentation ou un dispositif d’amélioration de la létalité ou bien encore sa précision aurait suffi pour percuter le satellite. Par ailleurs, la Russie dispose du système mobile de défense atérienne et antimissile S-400, supérieur au MIM-104 Patriot américain. Elle développe son successeur, le S-500, qui serait doté de l’intercepteur extra-atmosphérique 77NG-N1 capable de détruire missiles balistiques et satellites. A la fin des années 1980, le Nariad, vecteur dérivé du missile balistique intercontinental SS-19 tiré d’un silo, avait été conçu pour cibler des satellites en orbites de 150 km à 40.000 km. Après trois essais en 1990, 1991 et 1994, il a été transformé en lanceur de satellites en orbite basse et renommé Rokot. Le système DA-ASAT Burevestnik 14K168, inspiré du missile 78M6 Kontakt avec un véhicule tueur, est aérotransportable par l’avion de chasse MiG-31BM. Enfin, les systèmes antimissiles exo-atmosphériques soviétiques à charge nucléaire Galosh et Gorgon auraient pu constituer des DA-ASAT. Mais ils ont été démantelés, car une charge nucléaire explosant dans l’espace aurait affecté tous les satellites.

Les conséquences stratégiques. Depuis la guerre du Golfe (1990-1991), les capacités spatiales assurent la collecte de renseignements et apportent aussi un soutien direct aux forces militaires engagées sur un théâtre d’opérations. Avec le Nudol, la Russie peut cibler la plupart des satellites militaires, météorologiques et de communications à 500 km d’altitude avec un préavis de quelques minutes. Déjà, la Station internationale et de nombreux satellites, dont ceux de la société privée américaine Starlink, ont dû manœuvrer pour éviter les débris consécutifs à l’essai de 2021. En complément du Nudol, le système aéroporté Burevestnik apporterait une souplesse opérationnelle accrue. En outre, le risque existe que les débris deviennent des projectiles susceptibles d’entrer en collision avec les objets à proximité, provoquant une réaction en chaîne. Par ailleurs, l’identification de l’agresseur, facile à déterminer depuis une base de lancement fixe, sera plus difficile à partir d’un lanceur mobile au sol ou aéroporté. Dans ce contexte, un État qui se sentirait menacé pourrait adopter des postures d’escalade miliaire pour compenser l’effet redouté. Selon une analyse du think tank américain Rand Corporation, publiée en octobre 2022, la Russie et la Chine ressentent les activités spatiales américaines comme une menace pour leur dissuasion nucléaire et veulent s’en protéger. Les Etats-Unis développent des contre-mesures portant sur la furtivité, le durcissement des systèmes de communications et la constitution de constellations. L’intelligence artificielle va aider à la prise de décision, grâce aux bibliothèques de caractéristiques de la menace et à l’analyse des informations des senseurs, des trajectoires de vol et des données de ciblage et de navigation.

Loïc Salmon

En août 2022, le système américain de surveillance de l’espace a dénombré 25.556 objets (taille supérieure à 10 cm) en orbite : 9.201 satellites opérationnels ou inactifs ; 16.355 débris des corps de propulsion et des résidus de satellites. En juin 2022, il a compté 5.465 satellites opérationnels, dont 86 % en orbite basse, 2.6 % en orbite moyenne et 10,3 % en orbite géostationnaire. A cette date, la répartition s’établit ainsi : 3.433 satellites opérationnels dont 123 militaires pour les Etats-Unis ; 156 satellites pour la Russie (56 satellites militaires) ; 536 pour la Chine (nombre de satellites militaires inconnu). Enfin, la société américaine privée Starlink, qui a lancé plus de 2.500 satellites depuis 2018, disposait de 2.219 satellites opérationnels en juin 2022.

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Armement : produire plus et plus vite en temps de guerre

Le soutien d’un effort de guerre dans la durée au profit des armées nécessite une visibilité pour les industriels et la sécurisation de leurs chaînes d’approvisionnement. L’économie « militaire » intervient avant, pendant et après un conflit comme celui de l’Ukraine.

L’économie de guerre a été présentée, le 9 février 2023 à Paris, par l’ingénieur général de 2ème classe Alexandre Lahousse, chef du service des affaires industrielles et de l’intelligence économique à la Direction générale de l’armement (DGA, photo). L’économie militaire a fait l’objet d’une conférence organisée, le 22 novembre 2022 à Paris, par l’association 3AED-IHEDN avec la participation de Grégory Chigolet, conseiller économique du chef d’État-major des armées.

L’économie de guerre. Les conséquences du conflit en Ukraine confirment ce que prescrit la Revue nationale stratégique 2022 sur l’économie de guerre, indique l’ingénieur général Lahousse. Les capacités de production de systèmes d’armes, de munitions et de maintien en condition opérationnelle doivent évoluer pour répondre aux besoins d’un éventuel engagement dans un conflit majeur. En conséquence, la DGA, les armées et les industriels de défense ont défini cinq chantiers prioritaires. Le premier concerne les contrats de longue durée relatifs aux équipements de première nécessité. La future loi de programmation militaire (2024-2030) va offrir aux industriels une visibilité sur sept ans à partager avec les petites et moyennes entreprises sous-traitantes, en vue d’une montée en puissance conjointe. Le deuxième chantier porte sur l’analyse des besoins des armées, leur chiffrage et l’évaluation de l’impact en termes de délais et de coûts. Le niveau d’exigence sera réduit de 20 %, dès la conception du besoin, pour simplifier le travail des industriels avec un partage du risque avec l’État. Le troisième chantier porte sur la chaîne d’approvisionnement. Les délais de la sous-traitance représentent 50 % de ceux de la production. Or 4 % des 4.000 entreprises de défense, ne pouvant accélérer leur cadence, bloquent la chaîne. Des études de réponses adaptées sont en cours. Les dépendances étrangères seront limitées par la constitution de stocks de matières premières, la multiplication des sources étrangères et la relocalisation d’activités en France. Le quatrième chantier concerne la formation en compétences critiques, comme les métiers de soudeur ou d’ajusteur en mécanique. Un dialogue sera engagé entre les entreprises, les écoles de formation et le ministère de l’Éducation nationale. Enfin, le cinquième chantier porte sur l’accès des entreprises de défense aux financements privés. Outre la mise en place d’un réseau de référents bancaires français, des initiatives sont à l’étude au niveau européen.

L’économie militaire. Le Fonds monétaire international a évalué l’impact du conflit en Ukraine sur les produits intérieurs bruts : Ukraine, une baisse de – 35 % en 2022 contre une croissance de + 3,4 % en 2021 ; Russie, une baisse de – 3,4 % en 2022 contre une croissance de + 4,7 % en 2021. Selon Grégory Chigolet, le conflit coûte à l’Ukraine : une baisse de la production des céréales, minerais et produits transformés ; la destruction d’infrastructures industrielles et minières ; le transfert de la main-d’œuvre vers les armées au détriment de la production ; un délitement des relations commerciales avec la Russie et la Biélorussie : la désorganisation des exportations via la mer Noire. Face aux sanctions économiques, la Russie a accéléré la montée en puissance de la production locale, confisqué les outils de production des firmes étrangères partantes et réorienté ses partenariats commerciaux. Face aux attaques contre sa monnaie par l’épuisement de ses réserves de change et l’embargo sur ses exportations, elle a imposé le paiement en roubles de certains biens fondamentaux. Face aux obstacles de financement sur les marchés internationaux, elle a menacé de dérégler le système financier mondial.

Loïc Salmon

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