L’Institut de recherche biomédicale des armées (IRBA) participe à la préservation de la santé des militaires en opérations extérieures (Opex) par son expertise en matière de maladies infectieuses.
Le médecin chef des services Jean-Nicolas Tournier, chef de la division défense NRBC (nucléaire, radiologique, biologique et chimique), l’a expliqué à la presse le 21 septembre 2023 à Paris.
Crises sanitaires. En 1918, le virus H1N1, connu sous le nom de grippe espagnole, a tué plus de 20 millions de personnes. En 1957, est survenu le virus H2N2 ou grippe asiatique, suivi en 1968 du H3N2 ou grippe de Hong-Kong. Au début du XXème siècle, arrivent d’autres virus, dont le risque est pris en compte par les armées : SARS-coronavirus en 2003 ; Chikungunya en 2005 ; H1N1 ou grippe porcine en 2009 ; MERS-covid en 2012 ; Ébola en 2015 ; Zika en 2016 ; covid-19 en 2019. Les virus de la Chikungunya, du Zika et de la dengue, appelés « arbovirus », sont transmis par les moustiques. La dengue menace entre 2 milliards et 3,7 milliards de personnes. Elle a déjà causé 2.000 morts en France, où 883 cas ont été détectés entre 15 mai et le 15 septembre 2023. Le paludisme, également transmis par les moustiques, tue encore 500.000 personnes par an. Ce parasite, découvert par le médecin militaire Alphonse Laveran, premier prix Nobel français de médecine en1888, a causé plus de 5.000 morts parmi les troupes françaises lors de l’expédition de Madagascar en 1895, contre 25 tués au combat. Aujourd’hui, le réchauffement climatique élargit le domaine d’infection virale et le transport aérien en facilite la diffusion, notamment celle du covid-19. L’IRBA travaille sur les maladies virales, très difficiles à détecter et qui prennent une forme asymptomatique. Ainsi, des patients porteurs du virus ne présentant aucun symptôme ne se savent pas infectés.
« Piège à moustiques ». Très peu d’arbovirus ont été découverts chez les moustiques, mais beaucoup dans leurs déjections. Partant de cette observation scientifique, deux jeunes chercheurs de l’IRBA, récompensés par le prix de l’Audace en 2022, l’ont appliquée à la surveillance de ces maladies virales en capturant et gardant en vie des moustiques pour récupérer leurs déjections. Ces moustiques constituent un échantillon de l’environnement facile à transporter et ne nécessitant pas de compétence particulière en entomologie. Des tests ont été effectués en Camargue et au Mali en 2020 et à Djibouti et en Gironde en 2023. Un virus a été identifié en 1937 en Ouganda dans la sous-région du Nil occidental. Transmis par les moustiques, il se reproduit chez les oiseaux, notamment migrateurs, et infecte les chevaux et même les hommes, dont 80 % sont asymptomatiques. Seuls les plus fragiles, soit 1 %, peuvent souffrir de maladies neurologiques comme la méningite ou l’encéphalite. Cet outil dénommé « projet MX », souligne le médecin chef des services Tournier, permet de savoir ce qui se passe en matière de maladies virales avec leurs conséquences importantes sur les forces armées françaises déployées en Opex dans des territoires en zone tropicales, où circulent les arbovirus. Des infections par arbovirus ont été détectées sur le territoire métropolitain. L’évaluation du projet MX se poursuit dans les armées pendant les Opex.
Autres axes de recherche. L’IRBA développe des programmes de recherche centrés en priorité sur le combattant, placé au cœur de la capacité de défense, avec des retombées pour la santé publique. Parmi eux, l’un porte sur les réponses adaptatives aux environnements extrêmes, dont les milieux d’emploi subaquatique et aéronautique et les climats contraignants. Un autre concerne la prévention des conséquences de la fatigue et la gestion du rythme veille-sommeil. Un troisième programme porte sur la neurobiologie des états de stress et la prévention de leurs conséquences. Un quatrième concerne la médecine régénérative, à savoir la thérapie cellulaire et la réparation tissulaire.
Loïc Salmon
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