Outre sa dimension guerrière, la notion de victoire s’applique aussi à la littérature et à la politique, mais surtout au sport de compétition. Elle y acquiert la même aura, après une longue préparation et des efforts intenses pour se dépasser et l’emporter.
Décidée selon des modalités diverses, la victoire sportive s’intègre dans une hiérarchie des valeurs et fait l’objet de réjouissances, allant des stades aux palais présidentiels, et renouvelle les expressions du sentiment national. La célébration de la victoire prend une place particulière dans le cadre des Jeux Olympiques, où les médailles acquises donnent une renommée plus durable que celles des championnats du monde. Dans l’Antiquité, les cités grecques organisaient des jeux sportifs dans à Olympie en l’honneur de Zeus olympien, du VIIIème siècle avant J.-C au IVème siècle après J.-C. Elles récompensaient uniquement les vainqueurs par un rameau d’olivier sauvage, symbole de la sagesse, de la gloire et de la paix. Lors de ses propres jeux, Athènes offrait aussi des amphores spécifiques remplies de l’huile des oliviers sacrés, produit très précieux et donc cher. Le vainqueur revendait alors l’huile et gagnait une importante somme d’argent. En 1894, le baron français Pierre de Coubertin fonde le Comité international olympique qui structure les Jeux dans le cadre de la Charte olympique. Le premiers Jeux olympiques modernes commencent en 1896 à Athènes avec un sacre sommaire. Le vainqueur est couronné d’olivier et reçoit une médaille d’argent. Le second obtient une couronne de laurier et une médaille de bronze. Ce n’est qu’en 1904, lors des Jeux de Saint Louis (États-Unis), que l’or, l’argent et le bronze sont remis aux athlètes. Le podium apparaît en1932, durant les Jeux d’hiver à Lake Placid (États-Unis), Désormais, la remise des médailles s’effectue sur une estrade selon un protocole strict. Le premier athlète, au centre, reçoit une médaille d’or et le titre de champion olympique. Le deuxième, placé à sa droite, obtient une médaille d’argent et le troisième, à sa gauche, une médaille de bronze. Les drapeaux des pays des trois vainqueurs sont hissés, mais seul l’hymne national du médaillé d’or retentit. Dans certains cas, les vaincus sont honorés presqu’à l’égal des vainqueurs : glorification des Spartiates défaits aux Thermopyles par l’armée perse (480 avant J.-C.) ; siège de Fort Alamo (Texas, 1836) ; résistance d’une compagnie de la Légion étrangère française à Camerone (Mexique, 1863). Ce goût des perdants magnifiques se retrouve dans le sport. Ainsi, lors de la Coupe de football des clubs de champions européens à Glasgow (Écosse) en 1975-1976, l’équipe française des Verts de Saint-Étienne, battue par l’équipe allemande du Bayern de Munich, est ovationnée le lendemain sur les Champs-Élysées à Paris. Quoique souvent associé aujourd’hui au monde du sport, le trophée témoigne d’abord d’une victoire militaire par l’exposition d’armes ou d’objets symboliques du vaincu, comme l’épée du roi François 1er, fait prisonnier à Pavie en 1525 par le général Juan de Aldana. Échangée par son fils contre une pension du roi d’Espagne Philippe II en 1585, elle sera récupérée par la France…en 1808, pendant la guerre de l’armée napoléonienne contre l’Espagne. Le trophée se perpétue dans le domaine de la chasse par la tête, naturalisée et montée sur un écusson, d’un animal d’une exceptionnelle splendeur, puissance ou rareté. Récompense de portée internationale, le prix Nobel, créé par le Suédois Alfred Nobel inventeur de la dynamite, honore une personnalité ou une organisation pour son action en faveur du bien-être de l’humanité. Il concerne six domaines : physique ; chimie ; littérature (Annie Ernaux, première Française en 2022) ; médecine ; économie ; paix (l e Sud-Africain Nelson Mandela en 1993, entré dans l’Histoire par la défaite).
Loïc Salmon
« Victoire ! La fabrique des héros », ouvrage collectif. Éditions In Fine et Musée de l’Armée, 344 pages, 275 illustrations, 35 €
Exposition « Victoire ! La fabrique des héros » aux Invalides