Devant la demande croissante de justice et de dialogue, la communauté militaire a été dotée de « médiateurs » en 2015. Leur premier rapport a été présenté à la presse, le 12 mai 2016 à Paris, par le général d’armée (Gendarmerie) Jean-Régis Véchambre et le médecin général des armées Ronan Tymen.
La médiation. Annoncée le 12 décembre 2013 par le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, la médiation militaire a été définie par décret le 30 mars 2015. Son article D.4121-2 stipule : « Tout militaire peut saisir les officiers généraux inspecteurs d’une question relative à sa situation personnelle, aux conditions d’exécution du service ou à la vie de la communauté. Les motifs de la demande n’ont pas à être fournis d’avance ». Cette action, indique le général Véchambre, contribue à la prévention des risques psycho-sociaux. Hors hiérarchie et avec le grade militaire le plus élevé, les inspecteurs généraux effectuent notamment des enquêtes de commandement pour identifier un éventuel dysfonctionnement ou des risques au sein d’organismes ou de forces relevant du chef d’État-major des armées. Directement subordonnés au ministre de la Défense, ils sont six : armée de Terre ; Armement ; Marine nationale ; armée de l’Air, Gendarmerie ; Service de santé des armées. Le rapport 2015 précise les compétences du médiateur, qui a reçu une formation spécifique ainsi que son équipe. Il ne prend ni n’impose de décision et n’est ni juge, ni arbitre, ni expert. Il cherche à déterminer clairement l’objet du litige dans la réalité concrète des situations et à le faire partager en toute liberté, neutralité, confidentialité, impartialité et bienveillance. Il cherche une solution équitable et acceptable par les parties, en préservant leurs intérêts respectifs. Le recours au médiateur, qui ne se limite pas à un simple acte administratif, exclut le traitement de la solde, les pensions, les sanctions disciplinaires et le recrutement. Il est également accessible aux réservistes, personnels civils et retraités militaires.
Comment procéder. Un contact informel (courriel et rencontre) est pris avec l’équipe du médiateur, pour s’assurer que le cas en question entre bien dans le champ de compétence de la médiation. Le militaire rend compte à sa hiérarchie de sa demande de médiation, sans obligation d’en fournir le motif. La médiation se déroule en 4 phases avec demandes éventuelles d’avis d’experts : recevabilité et saisine (prise en compte officielle) ; écoute des parties et instruction du dossier ; audiences et analyses complémentaires ; avis du médiateur et clôture. En 2015, les médiateurs ont été saisis 147 fois : 92 cas traités en un mois ; 22 en deux mois ; 4 en trois mois ; 4 en quatre mois ; 9 en plus de 4 mois ; 16 en cours depuis le 31 décembre 2012. Les réponses apportées varient : 33 extinctions du conflit pendant la médiation ; 36 extinctions après ; 7 cas ont concerné d’autres services ; 17 classés sans suite ; 10 non extinctions de conflit ; 6 cas en cours depuis le 31 décembre 2012. Les motifs de médiation divergent : 42 conflits interpersonnels ; 36 relatifs à la mobilité ; 17 portent sur l’avancement ; 15 sur la notation ; 19 raisons médico-statutaires ; 37 autres que les cas précédents ; 11 hors du champ de compétences de la médiation. Le rapport 2015 a mis en lumière l’isolement géographique de certains personnels, les restructurations successives et le déficit de dialogue sur les affectations et mutations. Le commandement doit prendre en compte les difficultés des subalternes et collaborateurs, conclut le général Véchambre.
Loïc Salmon
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