Fruit du croisement de races et de cultures de pays différents, le cheval de guerre a symbolisé la force, le commandement et le prestige social pendant 25 siècles. Son emploi a nécessité un long apprentissage, pour lui et son cavalier, afin de résister au fracas et à la confusion des combats.
Les Grecs de l’Antiquité ne connaissient pas la selle et montent à cheval sur une simple matelassure. Ils lui donnent des indications précises par le poids de leur corps, en variant imperceptiblement la position des hanches et des épaules et en déplaçant leurs jambes. La cavalerie sert à harceler l’ennemi, sauf à la bataille d’Issos (333 avant J.-C.) où la charge conduite par Alexandre le Grand disloque le dispositif perse. Les Romains inventent une selle constituée d’un gros coussin rembourré sur un arçon de bois avec quatre cornes pour le maintien du cavalier. L’étrier et le fer à cheval n’apparaissent que vers la fin de l’Empire (IIIème siècle). Les Celtes utilisent le fer à cheval et la cotte de maille dès le IIIème siècle avant J.-C. et chargent avec la lance ou l’épée. Au cours du VIIIème siècle, l’infanterie, jusque-là prédominante, est supplantée par la cavalerie, instrument de choc, de manœuvre et de vitesse. Le cavalier combat avec une lance, une épée ou un arc. La conquête de l’Angleterre (1066) inclut les charges au galop des cavaliers normands, en rangs serrés et lances horizontales. Dès le XIème siècle, les tournois de chevaliers combinent le sport, la formation et l’entraînement au combat. Rendus méconnaissables par le port de l’armure et du heaume, les chevaliers appliquent un blason sur leur tunique et leur bouclier pour se différencier. Lors de la bataille d’Azincourt (1415), les archers anglais massacrent les chevaux de la cavalerie française. Cette défaite marque le déclin de la chevalerie comme ordre militaire d’élite. Pendant les guerres d’Italie (1494-1559), la cavalerie lourde, dont les chevaux sont protégés par une armure, affronte les troupes à pied armées de piques et d’armes à feu. En outre, une nouvelle cavalerie, équipée plus légèrement et constituée d’archers, se développe pour évoluer loin en avant et sur les flancs d’une armée en marche. Par la suite, le pistolet remplace l’arc et impose la charge au trot, assurant la stabilité du cavalier tireur. Au XVIIème siècle, l’infanterie est réorganisée en compagnies et la cavalerie en escadrons « lourds », avec les cuirassiers et les dragons, et « légers » avec les hussards et les lanciers des chevau-légers. Après les défaites contre les cavaleries anglaises et prussiennes, Louis XV crée une école d’équitation militaire à Angers, qui sera déplacée à Saumur. Les cavaliers chargent à nouveau au galop, mais sabre au clair, botte à botte et sur trois ou deux rangs. Napoléon conquiert l’Europe, grâce notamment à sa cavalerie, indispensable pour les patrouilles, les reconnaissances, les charges et l’acheminement des vivres et du matériel. Il lui faut donc toujours plus de chevaux. L’artillerie, de plus en plus nombreuse sur les champs de bataille, nécessite huit chevaux pour tirer un seul canon. Pendant une longue campagne militaire, le fourrage s’épuise vite et son volume le rend difficile à faire venir et à emmagasiner. Loin de ses quartiers, la cavalerie impériale rencontre des difficultés pour le ferrage des chevaux. En outre, 30 % à 40% des chevaux meurent au combat. Pour améliorer les races des chevaux de selle et de trait, six haras sont créés en 1806 avec intégration des écoles vétérinaires de Lyon et d’Alfort. En raison des moteurs, camions et chars, la guerre de 1914-1918 marque la fin de la cavalerie traditionnelle, qui ne peut se déployer à cause des barbelés. Outre les maladies et le surmenage, la mitrailleuse et le canon à tir rapide tuent beaucoup de chevaux. Entre les deux guerres mondiales, seules les troupes coloniales d’Afrique et d’Asie conservent des unités montées. Enfin deux chevaux sont entrés dans l’Histoire, à savoir Bucéphale avec Alexandre le Grand et La Belle avec Napoléon.
Loïc Salmon
« Cheval de bataille », Jean-Michel Derex. Éditions Pierre de Taillac, 104 pages, illustrations, 19,90 €.