D’Azincourt à Marignan, Chevaliers & Bombardes

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La France et l’Angleterre, passées du Moyen-Age lors de la bataille d’Azincourt (1415) à la Renaissance avec celle de Marignan (1515), ont connu les mutations de l’art de la guerre.

A Azincourt, leur supériorité numérique a conforté les Français dans la conviction d’une victoire bientôt acquise. Ce sentiment était renforcé par le mépris de leur chevalerie à l’égard de la « piétaille » anglaise, qui osait la défier. Leur défaite s’explique notamment par l’inadaptation de la cavalerie lourde face à la mobilité de l’infanterie et la profusion des hommes au regard de l’étroitesse du terrain. Par la suite, le modèle des fantassins suisses, en rangs serrés et équipés de longues piques, sera imité dans toute l’Europe. Cette émergence de l’infanterie favorise la promotion sociale par le métier des armes. Par ailleurs, l’artillerie, apparue dès 1338 en France pour la défense des villes et châteaux, s’améliore au cours du siècle suivant : canons en fer ou en bronze, boulets métalliques et affuts sur roues. Pendant la trêve de la guerre avec l’Angleterre entre 1444 et 1449, Charles VII constitue une armée permanente payée chaque mois. Il crée d’abord 15 « compagnies d’ordonnance » de 100 « lances » chacune, soit environ 6.000 combattants. Une lance compte un « homme d’armes », cavalier lourd en armure, et quelques piétons et cavaliers légers en nombre variable. Le roi institue ensuite les « francs-archers », soit 8.000 hommes recrutés parmi les roturiers. Chaque paroisse doit désigner un habitant, en principe volontaire, qui, exempté de l’impôt de la taille, doit s’équiper et s’exercer régulièrement au tir à l’arc et à l’arbalète. Il doit répondre à l’appel en cas de conflit et reçoit une rémunération pour la durée de son service actif. Le roi crée aussi « l’arrière-ban », à savoir un service militaire réorganisé des nobles qui doivent s’équiper d’une armure, d’armes et d’un cheval et se préparer à la guerre selon leur statut et leur fief. En raison de leurs compétences financière, administrative et militaire, les frères Bureau modernisent l’artillerie royale, qui devient plus nombreuse et mobile avec le recrutement ponctuel de charretiers et de pionniers. La garde du corps du roi, où prédominent les archers écossais, assure sa protection rapprochée et prend part au conflit en cas de besoin. Lors de sa longue guerre contre Charles le Téméraire, Louis XI développe le camp militaire mobile, car la capture ou le pillage du camp de l’ennemi demeure un enjeu tactique. Ordonné avec rues et quartiers autour d’une place d’armes pour le rassemblement des fantassins et des cavaliers, il est clos par des palissades et des chariots avec un fossé où les pièces d’artillerie légère prennent position. Les chevaux de combat sont utilisés d’abord pour la reconnaissance, le harcèlement, la poursuite et les expéditions en pays ennemi (« chevauchées »). En bataille rangée, la cavalerie sert surtout à prendre l’ennemi à revers (Castillon, 1453) et charge rarement de front (Marignan, 1515). Le nombre de chevaux d’attelage suit l’accroissement des effectifs des armées, des vivres, des bagages, du nombre de pièces d’artillerie et de la masse des munitions. Quoique fier de son artillerie lourde et de sa cavalerie, François Ier prévoit de les renforcer par 42.000 piquiers et hallebardiers et 12.000 arquebusiers et d’appliquer une discipline très sévère. Pourtant, ses successeurs devront longtemps recruter des mercenaires pour disposer d’une infanterie de qualité.

Loïc Salmon

Exposition « D’Azincourt à Marignan » aux Invalides

Histoires d’armes

« D’Azincourt à Marignan, Chevaliers & Bombardes 1415-1515 », ouvrage collectif. Éditions Gallimard/Musée de l’Armée, 272 pages, 35 €

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