Un accident aérien résulte de diverses failles dans la sécurité, dont l’analyse fine et le traitement permettent de sauver des vies, de préserver des aéronefs et de renforcer la « culture » de l’unité.
Le général de brigade aérienne Franck Mollard, directeur du Bureau Enquêtes Accidents pour la sécurité de l’aéronautique d’État (BEA-É, créé en 2003) l’a expliqué au cours d’un point de presse tenu le 6 avril 2023 à Paris. Le BEA-É traite les aéronefs (avions, hélicoptères, drones et planeurs) de sept institutions : armée de Terre ; Marine nationale ; armée de l’Air et de l’Espace ; Délégation générale de l’armement ; Gendarmerie nationale et Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (ministère de l’Intérieur) ; Douane et droits indirects (ministère de l’Économie et des Finances). Dans le cadre d’une activité de défense, il intervient au niveau interministériel quand des événements graves impliquent les opérations de largage, le contrôle aérien et l’armement embarqué si l’aéronef ou son équipage peut être identifié parmi les causes. Le BEA-É traite aussi les accidents et incidents relatifs aux aéronefs non immatriculés à l’Organisation de l’aviation civile internationale (prototypes et vols de réception) ou affrétés pour des missions d’État. Enfin, il conduit de enquêtes sur les aéronefs étrangers concernés par un événement aérien survenu en France.
Les accidents. Un accident aérien se définit par un appareil détruit. Il est considéré comme grave s’il aurait pu en causer un autre encore pire, indique le général Mollard. Le nombre d’accidents aériens a beaucoup diminué depuis vingt ans, par suite des progrès techniques et de l’automatisation des systèmes. L’erreur organisationnelle ou humaine se trouve à l’origine de 80 %-85 % d’entre eux, contre 20 %-25 % pour une raison technique et 15 % pour une cause environnementale ou d’infrastructures. Le total dépasse 100 % car un accident peut résulter de plusieurs facteurs. En cas de morts ou de blessés graves, il faut assurer la communication aux familles. Dans le contexte actuel du conflit de haute intensité en Ukraine, souligne le général Mollard, il s’agit de ne pas perdre des équipages, lors de l’entraînement et de la préparation opérationnelle, et de diminuer l’attrition des parcs aériens, afin de contribuer à la résilience des forces.
Les missions. Les BEA-É doit réaliser : la collecte et l’analyse des informations utiles ; la détermination des circonstances et causes certaines ou possibles ; l’établissement des recommandations de sécurité et d’un rapport d’enquête public. Depuis sa création en 2003, le BEA-É a effectué 377 enquêtes de sécurité, soit 12 à 27 par an, et émis 2.700 recommandations de sécurité. Totalement indépendant des autorités d’emploi, sa crédibilité lui permet d’être écouté dans la durée. Selon le général Mollard, il contribue à celle de la France lorsqu’elle exporte des aéronefs. En effet, le partenaire étranger sait qu’il pourra bénéficier de l’expertise, de la discrétion et de la neutralité du BEA-É en cas d’événement grave au sein de ses propres forces armées ou de sécurité.
Les enquêtes. En cas d’accident aérien, trois enquêtes sont lancées simultanément : celle du BEA-É pour la sécurité ; celle du commandement au sein de l’institution militaire concernée ; l’enquête judiciaire. Le BEA-É coopère avec divers organismes : Direction des services de la navigation aérienne ; Direction générale de l’aviation civile ; Direction de la sécurité de l’aviation civile ; Direction de la sécurité aéronautique d’État ; Institut de recherche biomédicale des armées ; Office national d’études et de recherches aérospatiales ; Délégation générale de l’armement ; Bureau d’enquêtes et d’analyses pour la sécurité de l’aviation civile ; Agence européenne de la sécurité aérienne. Un protocole de procédures communes et de partage d’informations existe avec les bureaux enquêtes accidents aéronautiques britannique, belge, néerlandais, espagnol et italien.
Loïc Salmon
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