Opération Serval, notes de guerre, Mali 2013

Véritable immersion dans l’opération « Serval », ce livre lève le voile sur les multiples préoccupations, et les émotions, du général qui doit suivre les événements, être joint à tout moment et prendre les bonnes décisions à temps.

Bernard Barrera l’a rédigé à partir de ses lectures, de son expérience et de ses notes quotidiennes du 12 janvier, quand il reçoit un appel du Centre de planification et de conduite des opérations à Paris, au 7 mai à son retour en France. Il vient de tourner une des pages les plus intenses de sa vie d’officier. Il a dû mener des combats aéroterrestres, en liaison avec les contingents africains, et s’occuper des affaires civilo-militaires. Après les brèves interventions des forces spéciales, il s’agit de reprendre les villes de Tombouctou, Tessalit et Gao aux djihadistes, de les pourchasser et de les neutraliser, en vue d’une normalisation politique du Mali. La manœuvre retenue ressemble aux exercices de l’École de guerre et l’itinéraire à celui de l’expédition française de Bamako à Tombouctou …en 1894 ! Dans une précédente affectation au cabinet militaire du Premier ministre, le colonel Barrera a étudié les données opérationnelles de la région. Devenu général, il fait présenter la situation, par son PC, au ministre de la Défense venu à Gao le 26 avril, avec les moyens de renseignement (écoutes électromagnétiques tactiques, drones et échanges avec la population), le repérage d’un groupe adverse et sa destruction par un tir d’artillerie. Il présente régulièrement aux médias les missions en cours et les possibilités de reportage au sein des unités, en fonction des contraintes opérationnelles et des consignes reçues. La brigade « Serval » doit aussi tenter de libérer les otages français, détenus à l’époque dans la région, et éviter que les journalistes présents sur place ne le soient à leur tour. Depuis le début de l’opération, s’y ajoute la pression des autorités politiques pour accélérer l’opération et aller plus loin et plus vite. Après la reconquête des villes, l’adversaire fuit le combat. Pour garder l’initiative sur lui, l’état-major doit déterminer zones et actions successives. Grâce à la méthode de raisonnement tactique, les options sont identifiées à partir de l’étude des djihadistes, du terrain, du cadre espace-temps et de la mission. Chaque mouvement est pensé selon les moyens logistiques et d’évacuation sanitaire. Dans les situations d’urgence en zone urbaine, il s’agit de bien se coordonner avec les alliés, afin d’éviter les tirs fratricides et les pertes collatérales parmi la population omniprésente. Avec sa conseillère juridique, le général élabore les règles d’ouverture du feu, variables selon les cas de figure, et les conduites à tenir vis-à-vis des prisonniers et des enfants-soldats. La découverte de ces derniers par les militaires français, qui ont des enfants du même âge, provoque chez eux un choc comparable aux pertes, subies et assumées, dans leurs rangs. Outre la chaleur, la gastro-entérite à répétition et l’usure précoce des matériels, ils font face aux attaques « asymétriques » : pistes minées, assassinats et attentats-suicides de djihadistes drogués à la kétamine, qui inhibe la peur et anesthésie la douleur des blessures. Les soldats de la brigade « Serval » ont réussi leurs missions grâce à leur courage et leur professionnalisme, souligne le général Barrera. Jeune lieutenant, il avait d’abord commandé des appelés en Allemagne, face à la menace soviétique.

Loïc Salmon

Armée de Terre : retour d’expérience de l’opération « Serval » au Mali

Armée de Terre : l’arme blindée cavalerie de demain après l’intervention au Mali

Lieutenants en Afghanistan, retour d’expérience

« Opération Serval notes de guerre Mali 2013 » par le général Bernard Barrera. Éditions du Seuil, 448 pages, 21,50 €




Churchill De Gaulle

De leur rencontre en 1940 à leurs héritages, de leur « mésentente cordiale » à leur admiration réciproque, le catalogue de l’exposition « Churchill-De Gaulle » retrace le parcours de ces personnages historiques.

Leur heure de gloire sonne le 9 juin 1940, quand Winston Churchill (65 ans), qualifié dans ses mémoires de « romantique » par Charles De Gaulle (49 ans), rencontre celui qu’il appellera plus tard « l’Homme du Destin ». Dans son enfance, Winston souffre du manque d’affection de ses parents. Son père, grand aristocrate, ne pense qu’à sa carrière politique, et sa mère, riche héritière américaine, est accaparée par ses amants. Charles naît dans une famille bourgeoise de Lille. Son père, professeur, lui fait découvrir l’Histoire  et sa mère voue à la patrie une passion égale à sa piété religieuse. Élève exemplaire, Charles se transforme en  intellectuel doté d’une solide formation classique, alors que Winston, « cancre » aux lectures éclectiques et hétéroclites, devient un autodidacte brillant. Nantis d’une mémoire phénoménale, tous deux partagent la même passion pour le métier des armes et l’histoire militaire de leurs pays respectifs et entament une carrière militaire. Pour Churchill, ce ne sera qu’un tremplin pour réussir très jeune en politique, où De Gaulle, soldat par vocation, n’entrera que par défaut et sur le tard. Ce dernier portera des jugements mitigés sur Napoléon, que le premier admirera profondément toute sa vie. Leur formation initiale d’officier les prépare à servir l’État avec passion. La première guerre mondiale est leur première expérience commune. Premier Lord de l’Amirauté dès 1911, Churchill  a modernisé la flotte, amélioré les conditions de vie des marins et créé une aviation navale, mais porte, en 1915, la responsabilité de l’échec de l’expédition des Dardanelles. Il rejoint alors le front en Flandre, de novembre 1915 à mai 1916. Le lieutenant De Gaulle, trois fois blessé et fait prisonnier en 1916, ne sera libéré que le 11 novembre 1918. Une vingtaine d’années plus tard, l’accès aux responsabilités suprêmes les transforme en chefs de guerre, où le pouvoir civil décide en dernier ressort en matière militaire. Tout en reconnaissant en De Gaulle « la France en lutte »,  le gouvernement britannique maintient des contacts avec celui de Vichy en 1940 et 1941. La méfiance entre le général et le Premier ministre s’installe après l’échec du débarquement à Dakar en 1940 et les conquêtes, réalisées uniquement sous commandement britannique, de la Syrie (sous tutelle française) en 1941 et de Madagascar (colonie française) en 1942. Elle sera exacerbée après l’entrée en guerre des États-Unis en 1941, dont le président, Franklin Roosevelt, ignore De Gaulle. Comme pour le débarquement en Afrique du Nord en 1942, Roosevelt refuse de l’associer aux préparatifs de celui du 6 juin 1944 en Normandie. Toutefois, l’accueil enthousiaste des Français réservé au général le 14 juin incite Roosevelt à reconnaître le chef du gouvernement provisoire de la République française en octobre. Le 11 novembre suivant, Churchill et De Gaulle descendent ensemble les Champs-Élysées (photo) et s’inclinent devant la statue de Clemenceau, la tombe du maréchal Foch et le tombeau de Napoléon. A son retour au pouvoir en 1958, De Gaulle exprimera sa reconnaissance à Churchill en lui décernant la croix de la Libération. Ce dernier aurait déclaré un jour que la croix de Lorraine…aurait été « la plus lourde » des croix qu’il ait eu à porter !

Loïc Salmon

Exposition « Churchill-De Gaulle » aux Invalides

Les généraux français de 1940

Maréchaux du Reich

« CHURCHILL DE GAULLE », ouvrage collectif de 35 auteurs. Fondation Charles De Gaulle, Musée de l’Armée et Éditions de La Martinière, 288 pages, 28 €




Exposition « Churchill-De Gaulle » aux Invalides

Cette exposition retrace les destins, hors du commun, de ceux qui ont incarné la résistance pendant le second conflit mondial et dirigé leur pays au début de la guerre froide : Winston Churchill (1874-1965) en Grande-Bretagne et Charles De Gaulle (1890-1970) en France.

A cette occasion, le musée des blindés de Saumur a prêté deux chars de 1940, placés de chaque côté de l’entrée du porche de la façade des Invalides. Le char lourd français BI bis a équipé les bataillons commandés au feu par le colonel De Gaulle. Le nouveau char lourd britannique Matilda II affrontera plus tard l’Afrikakorps du maréchal Rommel. Deux halls retracent le contexte historique. Extraits d’actualités cinématographiques et documents sonores font revivre le général français « à titre temporaire » et le « bouledogue » britannique. L’exposition commence avec l’enfance de ces chefs et se termine par leurs obsèques présentées simultanément, solennelles pour Churchill (30 janvier 1965) et très simples pour De Gaulle (12 novembre 1970). Leur existence aura été partagée entre le métier des armes, la politique et l’écriture.

Les soldats. Le lieutenant Winston Churchill choisit la cavalerie à sa sortie de l’École royale militaire de Sandhurst. Il reçoit le baptême du feu en 1895  à Cuba…au service des forces loyalistes espagnoles pour mater une révolte ! Deux ans plus tard, il sert dans le Nord de l’Inde et obtient son premier commandement au feu contre des tribus afghanes. Pendant la guerre des Madhistes au Soudan, il prend part à la bataille d’Omdurman (2 septembre 1898), l’une des dernières charges de cavalerie de l’histoire militaire britannique. Il participe ensuite à la très meurtrière guerre des Boers (1899-1900) contre l’État libre d’Orange et la République du Transvaal. Capturé, il parvient à s’évader et à rejoindre l’unité de cavalerie « South African Light Horse ». Sa tête est même mise à prix par les Boers pour 25 £, somme importante pour l’époque. Premier lord de l’Amirauté en 1914, Churchill doit démissionner l’année suivante après la bataille désastreuse des Dardanelles. Il revêt alors l’uniforme de lieutenant-colonel pour se battre dans les tranchées des Flandres. Il y rencontre son cousin, le 9ème duc de Malborough. Tous deux échappent à la mort au cours d’un bombardement et gravent leurs initiales sur un éclat d’obus. A l’été 1940, Churchill, Premier ministre, met sur pied un service secret d’action subversive, le « Special Operations Executive » (SOE), composé de deux sections : la « F » avec une organisation et un commandement uniquement britanniques ; la « RF » pour coopérer avec son homologue gaulliste, le « Bureau central de renseignements et d’actions » (BCRA). Entré à Saint-Cyr en 1908, le lieutenant Charles De Gaulle est affecté en 1912 au 33ème Régiment d’infanterie, commandé par le colonel Philippe Pétain. Il reçoit le baptême du feu à la bataille de Dinant, en 1914. Blessé pour la  troisième fois à Verdun en 1916, il est capturé par les Allemands. Malgré cinq tentatives d’évasion, il reste prisonnier jusqu’à la fin de la guerre. Dans les années 1920 et 1930, il sert en Pologne, dans l’armée française du Rhin et au Levant. Devenu colonel, il ne parvient pas à faire adopter son projet de corps blindé mécanisé par sa hiérarchie. Après l’appel du 18 juin 1940, le tribunal de Clermont-Ferrand le condamne par contumace « à la peine de mort, à la dégradation militaire et à la confiscation de ses biens » (2 août).

Les hommes politiques. Élu député du parti Conservateur en 1900, Churchill occupe divers postes ministériels importants, avant et après la Grande Guerre, jusqu’en 1929. A nouveau Premier lord de l’Amirauté en 1939, il devient Premier ministre en 1940. En juin, il rencontre De Gaulle, alors sous-secrétaire d’État à la Guerre et à la Défense nationale dans le gouvernement Raynaud et envoyé à Londres pour négocier l’aide britannique, afin de pouvoir continuer la guerre. A l’annonce radiodiffusée de l’armistice français, Churchill l’autorise à utiliser le micro de la BBC pour lancer un appel à la résistance. Les deux hommes concluent un accord sur la constitution de la « France Libre », mouvement militaire et entité politique représentant la France, avec son siège à Londres. La plupart des volontaires français combattent aux côtés des armées britanniques. A Brazzaville, De Gaulle institue un « Conseil de défense de l’Empire », afin d’établir des relations d’État à État avec le gouvernement britannique. L’image de chacun se dessine. Churchill se caractérisera par le chapeau, le gros cigare, le nœud papillon et le pistolet mitrailleur. Quant à De Gaulle, sa voix entendue régulièrement à la BBC sera vite associée à un général en uniforme. Malgré le bombardement de la flotte française de Mers-El-Kébir par la Marine britannique (3 juillet 1940) et l’échec de la tentative de ralliement de Dakar par une flotte anglo-française libre (23-25 septembre), Churchill et De Gaulle conservent leur confiance réciproque. Par la suite, leurs relations seront tendues et même au bord de la rupture. Finalement, grâce à l’unification de la Résistance et au soutien populaire, De Gaulle s’impose et écarte le risque d’une guerre civile en France. En 1944, celle-ci se voit attribuer une zone d’occupation en Allemagne. Le 26 juillet 1945, Churchill perd les élections. Six mois plus tard, De Gaulle démissionne du gouvernement provisoire de la République française. Le premier revient au pouvoir de 1951 à 1955 et le second de 1958 à 1969.

Les écrivains. Contre tous les usages, Churchill mène une double carrière d’officier et de correspondant de guerre pendant cinq ans (1895-1900). Ses articles assurent sa renommée en Grande-Bretagne et lui inspirent la rédaction de plusieurs livres, dont il tire l’essentiel de ses revenus. Après 1945, il écrit le premier tome de « La seconde guerre mondiale », qui en comptera six. Il reçoit le prix Nobel de littérature en 1953. De Gaulle publie son premier livre en 1938 : « La France et son armée », rédigé dix ans plus tôt à la demande du maréchal Pétain. Il se remet à l’ouvrage après la guerre et publie ses « Mémoires de guerre » entre 1954 et 1959. Churchill travaille avec une équipe de chercheurs et dicte, la nuit, à sa secrétaire qui tape à la machine. De son côté, De Gaulle écrit à la main et rature beaucoup. Deux ou trois personnes effectuent des recherches et vérifient l’exactitude des événements. Sa fille Élisabeth tape l’épreuve finale, qu’il aura réécrite… plus lisiblement !

Loïc Salmon

Churchill De Gaulle

Parachutée au clair de lune

L’exposition « Churchill-De Gaulle » (10 avril-26 juillet 2015), organisée par le musée de l’Armée avec le concours de la Fondation Charles De Gaulle, se tient aux Invalides à Paris. Elle rassemble photos, tableaux, documents, affiches, lettres, uniformes, appareils et objets provenant notamment du Churchill Archives Centre de Cambridge et du musée de l’Ordre de la Libération. Parallèlement, ont été programmés : des conférences en avril et mai ; un cycle cinématographique « Churchill-De Gaulle » du 4 au 8 juin ; des concerts d’avril à juin dans la cathédrale Saint-Louis des Invalides, pour rappeler la fin de  la seconde guerre mondiale et découvrir les grands compositeurs du XXème siècle, de Benjamin Britten au « Beatle » Paul Mc Cartney. Renseignements : www.musee-armee.fr




La puissance au XXIème siècle : le poids de l’Histoire

La force militaire suffit-elle à garantir la puissance d’un État ? Russie, OTAN, Grande-Bretagne et Allemagne conservent-elles leur puissance ?

Ces questions ont fait l’objet d’un colloque organisé, le 13 avril 2015 à Paris, par l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire (IRSEM), EuroDéfense-France, l’Institut Jean Lecanuet et la revue France Forum. Y ont notamment participé : le général de brigade Benoît Durieux, directeur du Centre des hautes études militaires ; Gabriel Bernier du secrétariat international de l’OTAN ; Arnaud Dubien, directeur de l’Observatoire franco-russe ; le général (2S) Maurice de Langlois de l’IRSEM.

Capacité militaire durable. Le discrédit moral et juridique de la guerre perdure depuis 1945 dans une Europe qui se démilitarise, alors que les violences armées s’en rapprochent, note le général Durieux. Mais, la réflexion sur la puissance militaire se poursuit depuis une quinzaine d’années. Après leurs interventions en Afghanistan et en Irak, les États-Unis ont compris l’inadaptation de leur force militaire, dans un environnement mal perçu et un mode de combat déconnecté de la réalité du terrain et de la situation politique. Un débat s’est ouvert sur l’offensive et la défensive. Celle-ci l’emporte avec la dissuasion nucléaire et des armées conventionnelles qui coûtent de plus en plus cher. L’offensive repose sur la faiblesse conceptuelle de la puissance militaire. La destruction de l’adversaire rassure, mais c’est un résultat à court terme. Il faut donc repenser le concept de puissance militaire, estime le général. En raison de la nature politique de la guerre, les militaires ne peuvent pas régler des problèmes non militaires. La singularité de la guerre nécessite une approche globale : contrôle des milieux marin et aérien et destruction de l’adversaire. S’y ajoute le temps long du développement de la puissance militaire. Le premier effort porte sur « l’intelligence stratégique » : comprendre l’adversaire et ses motivations pour éviter la « facilité tactique », uniquement militaire, et la tentation de la « morale », conception étrangère à la politique. Le deuxième effort concerne la capacité d’un pays à s’engager de façon autonome sur un théâtre d’opérations, comme les États-Unis dans le passé, la France au Mali ou le Tchad contre l’organisation terroriste Boko Haram. Enfin, la pérennité de l’action militaire dépend de la capacité industrielle du pays et de la formation des personnels.

L’OTAN, outil de puissance. Pour l’opinion publique, l’OTAN se présente comme un multiplicateur de forces militaires entraînées et constitue un saut qualitatif en terme de puissance  avec la dissuasion nucléaire, indique Gabriel Bernier. Cela implique : un partage du fardeau transatlantique et intereuropéen, avec une plus grande autonomie pour l’Union européenne ; l’élaboration d’une politique de défense et d’une doctrine pour le contrôle de l’espace stratégique ; une approche internationale en matière d’équipements par la mutualisation et le partage des moyens. Le retour de la menace russe et l’apparition de Daech ont conduit à l’adaptation de la capacité de réaction rapide de l’OTAN, qui doit d’abord éviter tout conflit en Europe.

Résurgence de la Russie. Puissance régionale moyenne, la Russie s’étend de la Baltique au Pacifique. Inquiète pour sa sécurité, elle s’attend à une confrontation avec l’Occident, notamment au Moyen-Orient, estime Arnaud Dubien. En outre, elle ne s’estime pas vaincue à l’issue de la guerre froide (1947-1991). La dissuasion nucléaire a été modernisée, mais les forces conventionnelles devront être mises à niveau d’ici à 2020. Depuis les années 2000, la Russie souhaite la prise en considération de ses intérêts stratégiques, ignorés depuis 1990, surtout l’élargissement de l’OTAN aux pays de l’Europe de l’Est. Pour la Russie, l’Ukraine, dont elle est frontalière, ne doit appartenir ni à l’OTAN, ni à l’Union européenne. Considérant que son intérêt stratégique vital y est engagé, elle entend maintenir son rang dans les décennies à venir et est prête à en payer le prix, malgré les sanctions  économiques. La crise semble durable avec les États-Unis, malgré l’absence de véritable confrontation idéologique. L’attitude des autres pays est variable. Grande-Bretagne, Suède, Pologne et Pays Baltes prônent une ligne dure en matière de sanctions économiques. L’Espagne, l’Italie, la Grèce, Chypre, la République Tchèque et la Hongrie préfèrent un assouplissement. L’Allemagne adopte une position médiane. La Russie, pour qui l’Occident a cessé d’être la référence, se tourne d’abord vers la Chine, qui représente 17 % de ses échanges extérieurs. Elle recherche des partenariats dans les domaines nucléaire et militaire avec l’Afrique du Sud et le Brésil. Enfin, elle développe ses relations diplomatiques et économiques avec l’Inde, le Viêt Nam, l’Égypte, la Turquie et l’Iran.

Prise de conscience de l’Allemagne. L’Allemagne se considère comme une puissance « civile », sceptique sur l’emploi de la force, explique le général Maurice de Langlois. Privilégiant une approche multilatérale pour éviter les risques, son Livre Blanc 2006 sur la sécurité n’évoque pas la notion d’intérêt national et manque de réflexion stratégique, selon le général. Intégrée à l’OTAN dès 1955, la Bundeswher est pourtant intervenue en ex-Yougoslavie, Afrique et Afghanistan, quoique souvent soumise au « caveat » national (limitation des missions opérationnelles par le gouvernement). Mais en 2011, l’opinion publique a pris conscience de la nécessité de maintenir la violence en cas de remise en cause de la co-existence pacifique. Le délai d’alerte opérationnelle de la Bundeswehr est passé à 48 h. Le budget de la Défense doit croître de 8 Md€ d’ici à 2019, notamment pour augmenter ses investissements et améliorer la disponibilité de ses équipements.

Réticences de la Grande-Bretagne. Malgré l’hésitation de son opinion publique à l’envoi de troupes en opérations extérieures, la Grande-Bretagne se croit encore une grande puissance et veut étendre son influence dans le monde, souligne le général de Langlois. Elle préfère envoyer des experts militaires et civils, à titre préventif. La force armée, quoique considérée comme la clé de voûte de la sécurité, ne doit être employée qu’après tous les autres moyens. De leur côté, les États-Unis estiment que la Grande-Bretagne ne remplit plus son rôle dans les grandes opérations qu’ils mènent.

Loïc Salmon

Selon Falashadé Soulé-Kohndou, le Brésil, l’Inde et l’Afrique du Sud constituent un groupe « d’États émergents », qui recherchent une influence politique internationale, basée sur leur statut de puissance régionale. Ils développent leur capacité militaire et préfèrent l’action collective à l’initiative individuelle. Ils utilisent la diplomatie selon les enjeux : système financier international, droits de l’Homme, gouvernance internationale ou réforme du Conseil de sécurité de l’ONU. Ils s’impliquent dans les médiations entre pays en litige et dans les opérations de maintien de la paix. Toutefois, leur influence politique reste limitée. Ainsi, l’Inde et l’Afrique du Sud s’abstiennent régulièrement lors du vote sur des résolutions des Nations unies mettant en cause la Russie ou la Chine.




Défense : actualisation de la LPM 2014-2019

Le projet d’actualisation de la Loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019, adopté par le Conseil des ministres le 20 mai 2015, sera présenté à l’Assemblée nationale début juin. Jean-Claude Mallet, conseiller spécial du ministre de la Défense, l’a présenté à la presse le même jour. Le budget du ministère de la Défense augmentera de3,8 Md€ par rapport à la LPM initiale pour totaliser 162,41 Md€ sur 2015-2019, grâce à des crédits budgétaires supplémentaires et des cessions immobilières et de matériels militaires. La Force opérationnelle terrestre augmentera de 11.000 hommes pour totaliser 77.000 personnels. Compte tenu des engagements extérieurs depuis trois ans (reliquat Afghanistan, Mali et Centrafrique), un investissement de 1,5 Md€  portera sur les équipements clés. Ainsi, pour l’aérocombat notamment dans la bande sahélo-saharienne, 7 hélicoptères Tigre supplémentaires seront commandés et la cadence de livraison des hélicoptères de transport tactique NH90 sera accélérée. Les trois derniers avions ravitailleurs MRTT seront livrés entre 2018 et 2025, pour compenser le retrait du service des C 135, âgés en moyenne de 51 ans. Compte tenu des aléas de l’avion de transport tactique A 400 M, 4 avions C 130 Hercules doivent être acquis, dont 2 capables de ravitailler des hélicoptères en vol. Les forces spéciales recevront 2 avions C 130 et renouvelleront leur parc de jumelles à vision nocturne. En 2023 aura lieu la première livraison du programme de frégates de taille intermédiaire, complémentaires des frégates multi missions (FREMM), dont 6 auront été livrées en 2019. D’ici là, les frégates furtives seront rénovées avec l’ajout d’un sonar, lors de leurs arrêts techniques programmés. En matière de renseignement, la capacité d’observation spatiale sera renforcée par l’acquisition d’un troisième satellite, en coopération avec l’Allemagne dans le cadre du programme MUSIS (système multinational pour la surveillance, la reconnaissance et l’observation). En outre, une charge utile ROEM (renseignement d’origine électromagnétique) sera installée sur les drones Reaper. Pour garantir la souveraineté française dans le Sud-Est de l’océan Indien, la Marine nationale recevra un 4ème bâtiment multimissions, qui sera basé à La Réunion. En outre, elle va acquérir 4 bâtiments de soutien et d’assistance hauturier pour la surveillance des approches maritimes métropolitaines. La capacité d’intervention aérienne sera renforcée par l’acquisition de 25 nacelles TALIOS (système optronique de ciblage et d’identification à longue distance) destinées aux Mirage 2000 et Rafale, dont 152 appareils auront été livrés en 2019 sur les 180 commandés. En matière de cyberdéfense, 1.000 personnels civils et militaires supplémentaires seront recrutés sur la période 2014-2019. De plus, les organisations et les capacités d’analyse et de surveillance du ministère de la Défense seront renforcées. Dans ce dernier domaine et afin d’améliorer la protection du territoire national, des partenariats seront conclus avec les entreprises, en vue de recruter 28.000 à 40.000 réservistes pour servir de 30 à 210 jours/an pendant au moins 3 ans. Par ailleurs, le projet d’actualisation de la LPM 2014-2019 autorise la création et l’adhésion libre à des « associations professionnelles nationales de militaires ». Toutefois, sont interdites actions collectives (grèves) ou initiatives individuelles pour défendre des intérêts professionnels de la part de militaires engagés en opérations, afin de garantir  la disponibilité des armées.

Loïc Salmon

Défense : conserver les capacités nécessaires dans un budget contraint

Cyberdéfense militaire : DEFNET 2015, exercice interarmées à tous les niveaux

Renseignement militaire : clé de l’autonomie stratégique et de l’efficacité opérationnelle




Marine nationale : en opérations sur toutes les mers

En posture permanente de sûreté, la Marine agit, dès le temps de paix, sur l’espace marin de liberté stratégique et de manœuvre. Responsable de l’action de l’État en mer, elle participe aussi aux opérations sur les théâtres extérieurs.

Ce thème a fait l’objet d’une conférence-débat organisée, le 15 avril 2015 à Paris, par le Centre d’études stratégiques de la marine. Y sont notamment intervenus : la contre-amirale Anne Cullerre, sous-chef d’état-major « Opérations aéronavales » ; le capitaine de vaisseau (R) Lars Wedin, chercheur à l’Institut français d’analyse stratégique ; le capitaine de vaisseau Jacques Rivière, chef du bureau « Opérations aéronavales ».

Enjeux et menaces. Outre ses ressources halieutiques et son importance pour le transport de marchandises dans le monde (90 % des échanges), la mer devient un enjeu énergétique, explique le capitaine de vaisseau Wedin. Le parc d’environ 170.000 plates-formes de production d’hydrocarbures (pétrole et gaz) s’accroît de 400 unités par an. S’y ajoutent les éoliennes et hydroliennes (sous-marines), génératrices d’électricité. Or, ces infrastructures affectent l’emploi des radars et les trajectoires de manœuvre des navires marchands pour les éviter. Ces entraves à la circulation maritime se répercutent sur la liberté de navigation. Certains pays riverains, notamment en mer de Chine, créent des zones d’interdiction pour les protéger, notamment des organisations terroristes susceptibles d’utiliser vedettes rapides ou sous-marins de poche pour les endommager, avec des conséquences écologiques et médiatiques. Le commandant Wedin en déduit une stratégie maritime pour le XXIème siècle avec ses composantes économique, financière, industrielle, de défense (OTAN et accords bilatéraux), diplomatique et morale, à savoir la prise en compte de l’importance de la mer par l’opinion publique. L’amirale Cullère rappelle que tous les pays commerçants disposent de Marines militaires pour défendre leurs intérêts maritimes. Ainsi, la Chine et les pays d’Asie du Sud-Est développent leur Marine pour s’assurer la maîtrise des mers environnantes. La guerre froide (1947-1991) semble de retour. Si un bâtiment étranger se rapproche trop près de la Crimée, des unités russes vont immédiatement à sa rencontre. La Russie reconstruit en effet sa Marine, qui montre son pavillon en océan Indien et en Méditerranée. Parallèlement, des avions russes se manifestent le long des côtes atlantiques, indique le capitaine de vaisseau Rivière.

Missions permanentes. Pour garantir la crédibilité de la dissuasion nucléaire, le programme « Cœlacanthe » poursuit la modernisation de la Force océanique stratégique par la mise au format du missile balistique M51 du 3ème SNLE. Pour participer à la protection de ses 80.000 ressortissants français dans le golfe de Guinée, l’opération « Corymbe » combine surveillance maritime et coopération avec les pays riverains pour la prise en charge de leur propre sécurité dans leurs eaux territoriales, explique l’amirale Cullerre. Sur le territoire national (métropole et outre-mer), l’action de l’État en mer (55 missions) inclut la protection des approches maritimes (sémaphores et renseignement). En 2014, 350 personnes ont été secourues, 500 kg de cocaïne saisis et 2.000 engins explosifs neutralisés. En outre, 3.280 marins et gendarmes maritimes ont assuré la sécurité d’enceintes militaires et des installations de la dissuasion. Début 2015, la Marine n’a donc pu fournir de personnels au-delà d’un mois à l’opération « Sentinelle » en Ile-de-France (10.000 personnels mobilisés). En conséquence, l’État-major des armées réfléchit aux nouveaux formats de la défense maritime, opérationnelle et aérienne du territoire. La France participe déjà à la lutte contre l’immigration clandestine dans le cadre de la mission européenne Frontex (renseignement et récupération de naufragés). La France dispose du plus grand réseau d’attachés de défense du monde. Les Commandements supérieurs en Nouvelle-Calédonie (armée de Terre) et en Polynésie française (Marine) remplissent, au sein des pays de l’Asie du Sud-Est et du Pacifique, des missions de rayonnement, mais avec de plus en plus de difficultés car les moyens financiers diminuent. Les escales de deux frégates de surveillance y contribuent, notamment aux Mexique, Chili, Pérou et en mer de Chine. Si le ministère des Affaires étrangères décide, par exemple, l’envoi de secours aux victimes d’un cyclone aux Philippines, la Marine peut déjà en réaliser la planification sur place. En raison de la présence d’entreprises françaises (CMA et Total) dans la région, des bâtiments militaires français  s’y rendent, mais sans prendre parti dans les litiges territoriaux entre les pays riverains et la Chine, qui se pose en rivale des États-Unis. Par ailleurs, la Marine américaine doit assurer, en permanence, l’ouverture des détroits de Bab-el-Mandeb et d’Ormuz, où la Grande-Bretagne a envoyé des unités et la France un chasseur de mines en avril 2015.

Opérations ponctuelles. Avec ses bâtiments, aéronefs (avion radar Atlantique 2 ou Falcon 50 notamment) et commandos (forces spéciales), la Marine participe aux opérations extérieures, dans un cadre interarmées et en coalition : « Chammal » contre Daech en Irak, « Atalante » contre la piraterie en océan Indien et « Serval » puis « Barkhane » dans la bande sahélo-saharienne. Elle dispose de : 3 bases navales à Cherbourg, Brest et Toulon ; 4 stations navales au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Gabon ; 2 bases interarmées à Djibouti et aux Émirats arabes unis. L’opération « Corymbe » dans le golfe de Guinée est dirigée par l’amiral préfet maritime de Brest, également commandant en chef pour l’Atlantique, en coordination avec ses homologues au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Gabon. Auparavant uniquement effectuées en liaison directe avec la présidence de la République, les projections de forces sur des théâtres extérieurs intègrent la communication opérationnelle, en raison de l’accélération du temps « politico-médiatique », souligne l’amirale Cullerre. En échange du soutien des États-Unis à la France en matière de renseignement et de ravitaillement en vol pendant les opérations « Harmattan » (Libye, 2011) et « Serval » (Mali, 2013), le groupe aéronaval français a assuré la relève d’un porte-avions américain au cours de l’opération « Chammal » (Irak, avril 2015).

Loïc Salmon

Asie-Pacifique : rivalités et négociations sur les enjeux stratégiques

L’océan Indien : espace sous tension

Golfe de Guinée : zone de crises pour longtemps

Avec 11 Mkm2 de zones économiques exclusives réparties sur 7.000 km de côtes sur tous les océans, la France dispose du 2ème domaine maritime mondial, après les États-Unis. Sa Marine compte : 10 sous-marins, dont 6 d’attaque (SNA) et 4 lanceurs d’engins (SNLE) ; 42 bâtiments de combat et de soutien ; près de 200 avions de chasse, de patrouille et de surveillance ainsi que des hélicoptères ; 15 unités de fusiliers et commandos Marine ; 34.000 hommes et femmes, dont 3.000 civils. Le taux de féminisation atteint 13,8 %. Dès 2017, l’équipage du premier SNA Barracuda intégrera 3 officiers féminins. Toutes les spécialités sont ouvertes aux femmes, y compris celles de pilote de chasse embarquée et de commando Marine, si elles réussissent les mêmes tests que les hommes.




Piraterie : encore présente sur mer et en expansion dans le cyberespace

Transport maritime, production pétrolière et flux de données informatiques tirent profit de la mondialisation… avec la menace récurrente d’attaques de pirates, imprévisibles et difficilement identifiables.

Ce parallèle a fait l’objet d’une conférence-débat organisée, le 8 avril 2015 à Paris, par le Master 212 de l’Université Paris-Dauphine et l’Association nationale des auditeurs jeunes de l’Institut des hautes études de défense nationale. Y sont notamment intervenus : le vice-amiral Arnaud Coustillière, officier général cyberdéfense à l’État-major des armées ; Thierry Bourgeois, directeur de la sûreté du groupe Total (hydrocarbures) ; Jacques de Chateauvieux, président de Bourbon (services maritimes pour l’offshore pétrolier) ; Philippe Sathoud, directeur opérationnel au groupe DCNS (équipementier naval) ; Patrick Simon, avocat au barreau de Paris et président de l’Association française du droit maritime ; Patrick de la Morinerie, directeur général adjoint chez Axa Corporate Solutions (assurances).

État des lieux. La technologie informatique embarquée d’un navire civil et les infrastructures portuaires restent vulnérables aux cyberattaques. Via internet, un « hacker » (pirate informatique) pourrait en effet modifier les paramètres de conditionnement de sa cargaison ou, pire, ceux de ses automates et le dérouter de sa destination. Les risques encourus diffèrent pour les porte-conteneurs (CMA), les unités de servitude offshore (Bourbon) ou les navires spécialisés (Louis-Dreyfus Armateurs), souligne l’amiral Coustillière. Présent dans 132 pays où il produit (à terre ou au large) ou distribue pétrole ou gaz, Total les classe selon le niveau d’insécurité ordinaire, l’instabilité politique et le terrorisme. Il exclut toute activité en Somalie, Syrie et Afghanistan, classés « rouges ». Au Nigeria, les personnels de ses plates-formes en mer sont acheminés par hélicoptère et les matériels par chalands, escortés par des patrouilleurs militaires. Faute de moyens suffisants des États riverains, la piraterie perdure dans le golfe de Guinée. Un centre de coordination anti-piraterie est en cours d’installation. Comme pour le détroit de Malacca, les navires doivent y être connectés par le système d’identification AIS, qui permet de connaître leur position exacte en permanence. Toutefois, les pirates, très bien renseignés, peuvent ainsi les localiser et, en cas d’attaque réussie, commencent par déconnecter l’AIS. Selon AXA, la piraterie diminue dans le monde, mais devient plus efficace : pour un trafic annuel moyen de  150.000-200.000 passages dans les zones dangereuses (détroit de Malacca et golfes d’Aden et de Guinée), le taux de succès est passé de 66 % sur 445 attaques en 2009 à 95% sur 245 attaques en 2014. Il reste encore 400 marins détenus à terre par des pirates en mars 2015, contre 1.000 en 2005. Bourbon, qui déploie 90 bateaux-navettes au Nigeria et 300 dans le golfe de Guinée, n’y envoie que des volontaires parmi ses 12.000 marins. La Norvège et les Philippines ont interdit à leurs ressortissants de travailler au Nigeria. Les compagnies d’assurances prennent en charge les dommages en mutualisant les risques en fonction des données statistiques. Mais, indique AXA, comme ces dernières n’existent pas en cybercriminalité, elles établissent… des scénarios de risques !

Sûreté et protection. Total se prémunit de la cybercriminalité à bord de ses installations de diverses façons : anti-virus ; mesures des flux en entrée et sortie pour détecter les comportements anormaux ; recours aux agences de protection pour identifier les programmes malveillants et les éliminer. Des « passerelles » protégées relient l’informatique de gestion (connectée à internet) à celle, dite « industrielle », des installations techniques. Le manque de vigilance des personnels se trouve souvent à l’origine des dégâts mineurs constatés. De son côté, DCNS a établi une procédure réglementant l’accès à l’informatique du bord, a mis au point des logiciels de repérage et forme les équipages à la détection ou l’intervention. En ce qui concerne les attaques physiques, Total se protège différemment selon le contexte juridique. Dans les pays où l’État est actionnaire ou propriétaire des installations de production, il met des gendarmes à la disposition de Total, qui assure l’exploitation du site. Pour les forages en mer par grande profondeur, l’État riverain est unique propriétaire des installations, dont le coût d’exploitation est partagé entre les différents partenaires. Face à la menace de la piraterie maritime, Bourbon a équipé ses navires d’une « citadelle » à l’épreuve des balles du fusil d’assaut de type kalachnikov et où l’équipage se réfugie jusqu’au départ des pirates, incapables alors de conduire le navire. En outre, les équipages sont formés et entraînés pour prendre conscience du danger et s’habituer à la discipline. En cas d’attaque, une procédure permet à l’équipage  d’informer les autorités compétentes. Pour ce type d’opération, DCNS dispose du patrouilleur de sauvegarde maritime L’Adroit, équipé de moyens de communication sécurisés et qui embarque un hélicoptère, des drones de surveillance et des commandos. Concrètement, sur la base de renseignements, la Marine du pays riverain intervient, de jour comme de nuit et quelles que soient les conditions météorologiques. L’avocat Patrick Simon estime nécessaire l’embarquement de sociétés militaires privées, comme aux États-Unis et comme la loi l’autorise  en France. De son côté, l’amiral Coustillière, rappelle que les mers, où sévit la piraterie, doivent être occupées par des navires de l’État, seuls autorisés à employer la force en cas de légitime défense. Or, aux États-Unis, celle-ci correspond à l’anticipation, alors qu’en France l’analyse de la situation reste un impératif préalable. Au large de la côte somalienne, la piraterie est contenue, mais pas éradiquée, en raison notamment d’une coordination des patrouilles de Marines de divers pays et de la constitution de convois escortés, particulièrement dissuasifs. Toutefois, les pirates, bien renseignés, attaqueront tout navire qui, par indiscipline, s’aventurerait seul dans une zone réputée dangereuse.

Loïc Salmon

Piraterie maritime : l’action d’Europol

Cyberdéfense : une complexité exponentielle

Cyberdéfense militaire : DEFNET 2015, exercice interarmées à tous les niveaux

En matière de piraterie maritime, le Centre d’étude et de pratique de la survie (CEPS) recommande de : s’informer au préalable 0auprès des ambassades et consulats français et des autorités portuaires ou maritimes compétentes ; s’inscrire au contrôle naval volontaire en océan Indien ; s’assurer du fonctionnement optimal des moyens de communications (valises satellites, radio HF) et des moyens électroniques du bord (GPS, balise d’alerte, radar) ; maintenir une veille permanente anti-piraterie 24h sur 24 ; assurer des tours de garde dans les ports les plus sensibles. Le CEPS préconise aussi des mesures de protection à bord : leurres sur le pont avec des mannequins en tenue d’équipage ; protection du pont par un grillage ; barrière physique (barbelés par exemple) pour éviter l’abordage du navire par l’accrochage d’échelle ; panneaux et pictogrammes dissuasifs autour du navire ; diffuseur d’eau à haute pression autour du navire.




Marine nationale : opération « Arromanches » en Méditerranée et océan Indien

Pour la première fois, le porte-avions Charles-de-Gaulle a été placé sous contrôle opérationnel américain et a assuré la permanence aéronavale d’une coalition engagée dans le golfe Arabo-Persique. L’opération « Arromanches » (janvier-mai 2015) a été présentée à la presse le 7 mai 2015, au cours d’une visioconférence entre le ministère de la Défense à Paris et le contre-amiral Éric Chaperon, commandant la « Task Force 473 » (TF 473), à bord du Charles-de-Gaulle. Au cours de son déploiement, la TF 473 a participé à l’opération « Chammal » à proximité de l’Iran (23 février-18 avril), de concert avec 2 frégates britanniques ainsi que 3 frégates et 1 porte-avions et américains. Outre le Charles-de-Gaulle, la TF 473 a mis en œuvre 2.600 personnels, 12 Rafale, 9 Super Étendard Modernisés, 1 avion de guet aérien Hawkeye, 4 hélicoptères, la frégate de défense aérienne Chevalier-Paul, la frégate britannique anti-sous-marine Kent intégrée à son dispositif, le pétrolier-ravitailleur Meuse, le sous-marin nucléaire d’attaque Améthyste, l’état-major de la TF 473 et un avion de patrouille maritime Atlantique 2. Chaque jour, son aviation embarquée a réalisé 10 à 15 missions de combat dans la profondeur de l’ensemble du territoire irakien, avec des vols de 6 h et à plus de 1.000 km du Charles-de-Gaulle. La disponibilité des Rafale a été de 84 %, un peu moins pour les Super Étendard Modernisés. « La coalition fait tout pour éviter les dommages collatéraux », souligne l’amiral. Selon lui, l’avancée de l’organisation terroriste Daech a été arrêtée, mais l’engagement sera encore long pour les avions de l’armée de l’Air française encore là-bas. En 4 mois de déploiement, la TF 473  aura passé 100 jours à la mer. Mission de présence opérationnelle dans des zones d’intérêt stratégique, l’opération « Arromanches » avait pour but de sécuriser les espaces maritimes et d’offrir aux autorités politico-militaires des options de diplomatie, de défense et de renseignement au Moyen-Orient. En janvier, la TF 473 a participé à des exercices et des patrouilles opérationnelles, en Italie et en Grèce, avec la force navale multinationale de l’OTAN en Méditerranée, composante maritime de sa Force de réaction rapide. Après avoir franchi le canal de Suez (26 janvier), elle a été intégrée à l’exercice « White Shark » avec les forces armées d’Arabie saoudite. Après « Chammal », elle a participé à l’exercice « Vanura » (28 avril-2 mai), avec la Marine indienne, très intéressée par les performances des Rafale Marine. L’Inde a en effet commandé 36 Rafale en avril 2015, après trois ans de négociations exclusives.

Loïc Salmon

Marine et Diplomatie

Marines : coopérations accrues dans les dix prochaines années

OTAN : améliorer la disponibilité et la réactivité




Terrorisme djihadiste : prédominance de la dimension psychoculturelle

Violence aveugle, théâtralisation et médiatisation caractérisent le terrorisme djihadiste, dont la propagande exerce un impact psychologique très fort sur les personnalités fragiles.

Telle est l’opinion d’Asma Guénifi, psychologue clinicienne et auteur d’une étude sur les profils psychologiques des islamistes radicaux. Elle s’est exprimée lors d’une conférence-débat organisée, le 2 avril 2015 à Paris, par l’Association des auditeurs jeunes de l’Institut des hautes études de défense nationale.

Émotions et héritage. Aujourd’hui, l’islamiste terroriste s’est forgé une identité : « Al Qaïda » et « Daech » (« État islamique »). Selon Asma Guénifi, la musique et les mises en scène de leurs sites internet, comme l’écroulement des Twin Towers de New York le 11 septembre 2001, suscitent l’angoisse. Les images télévisuelles marquent plus que l’écrit. L’inconscient enregistre tout ce qu’il y a autour et anesthésie l’intellect. Frapper un pays puissant l’affaiblit, fragilise les autres et provoque la panique, car l’auteur des faits reste inconnu jusqu’à sa revendication de l’attentat. Dans le monde musulman, l’usage de la terreur à des fins politiques remonte au « Vieux de la Montagne », Hassan ibn al-Sabbah (Iran, XIème siècle), fondateur de la secte des « Assassins », soldats drogués au haschich pour remplir leur mission. En fait, Hassan ibn al-Sabbah appelait ses adeptes « Assassiyoun »,  c’est-à-dire les fidèles au « fondement de la foi ». Sa doctrine prône la pureté de l’âme et l’inutilité du corps. Après la mort, les âmes des « purs » vont au paradis, magnifique jardin secret où 70 « houris » (jeunes femmes, belles et vierges) leur servent des mets délicieux. Les méthodes du « Vieux de la Montagne » seront reprises par Hassan el-Banna, qui fonde l’association des « Frères Musulmans » (Égypte, 1928). Cette organisation, qui manifeste son opposition, parfois violente, aux États arabes laïcs et à Israël, est officiellement considérée comme terroriste par le gouvernement égyptien, la Russie et l’Arabie Saoudite. Elle a rapidement diffusé ses idées dans les pays à majorité musulmane du Moyen-Orient, au Soudan et en Afrique du Nord. Le mouvement politico-militaire « Hamas », créé en 1987 dans la bande de Gaza, en est issu. Il prône la destruction de l’État d’Israël et l’instauration d’un État islamique palestinien sur son territoire, la Cisjordanie et Gaza.

Typologie psychologique. D’après Asma Guénifi, les salafistes ignorent toute logique, sauf celle de remettre en cause toutes les autres. Ses recherches l’ont conduite à l’établissement de divers profils psychologiques. Le salafiste « idéologique », choisi par son chef hiérarchique, doit repérer et endoctriner une personne à qui il inspire confiance. Il va l’isoler de son cercle familial et réduire son champ d’activité intellectuelle. Fin psychologue, il parvient à détecter ses faiblesses et traumatismes psychiques éventuels. Le salafiste « délinquant » a d’abord été incarcéré pour délit de droit commun. Il sort de prison, où il a rencontré un autre salafiste, qui lui a parlé de la fraternité des membres de la communauté musulmane où tous sont égaux, quel que soit le statut social ou la couleur de la peau. Cela le renvoie à sa famille perdue, avec le sentiment de vouloir se racheter. Le salafiste « braqueur » va continuer à voler de l’argent pour le donner à l’organisation. Il poursuit donc son activité antérieure, mais avec un sentiment de rédemption. Le salafiste « suicidaire » souffre de psychose : en rupture totale avec la société, il est prêt à passer à l’acte. Pour lui, la vie terrestre n’ayant plus de sens, il croit trouver ainsi la voie du salut. Après un parcours chaotique de son vivant, le « martyr » croit acquérir, par l’assassinat des « ennemis de la foi », la reconnaissance sociale qui lui permettra de rencontrer les 70 « houris » au paradis. Selon Asma Guénifi, quatre leviers peuvent faire basculer une personne psychologiquement fragile dans le terrorisme islamiste : cellule familiale décomposée ; absence d’autorité parentale ; conscience fragmentaire par manque d’esprit critique ; ignorance totale de la religion. Le salafiste « djihadiste » est un électron libre, dont le passage à l’acte reste imprévisible, souligne Asma Guénifi.

Symptômes révélateurs. Selon elle, le salafiste « djihadiste » souffre d’une névrose obsessionnelle de la « pureté ». Il pense que la répétition du rituel lui permet de vivre comme le prophète Mahomet, dont le quotidien demeure inconnu. Sa paranoïa lui fait considérer « l’autre » comme un ennemi, avec qui il est impossible de discuter. Privé de repères, il souhaite la mort. Son attitude envers la femme reflète sa frustration sexuelle. Selon l’idéologie salafiste, la femme doit cacher entièrement son corps et son visage découvert correspond à son sexe. Une femme qui travaille avec un homme lui renvoie l’image de sa mère et devient intouchable. Le destin de la femme commence au sein de sa famille, se poursuit dans le mariage et la procréation et se termine au cimetière. Le « Vieux de la Montagne » exigeait de ses adeptes l’oubli des opinions des autres, inhibant ainsi l’évolution de leur conscience. Les salafistes « djihadistes » n’ont guère de bagage intellectuel, mais séduisent certains jeunes. Or, précise Asma Guénifi, la vie psychique de chaque individu importe le plus, car il est très difficile de se reconstruire une nouvelle identité et de centres d’intérêt après un endoctrinement. Celui-ci commence à se manifester quand un(e) jeune collégien (ne) ou lycéen (ne) parle trop de religion et change de comportement. Selon Asma Guénifi, il faut alors engager la discussion et proposer d’autres livres que la propagande salafiste. L’éducation constitue la meilleure solution et la laïcité la seule réponse à apporter à la société pour protéger la jeunesse, souligne la psychologue clinicienne. Son frère a été assassiné en 1994 par le Front islamique du salut, formation politique militant pour la création d’un État islamique en Algérie.

Loïc Salmon

 

Le salafisme, mouvement  fondamentaliste sunnite, revendique un retour à l’islam des « salafs » (prédécesseurs), à savoir le prophète Mahomet et ses compagnons, notamment les quatre premiers califes et les deux générations suivantes. Le salafisme s’inspire des enseignements de trois théologiens : Ahmad Ibn Hanbal (mort en 855), qui condamne les innovations théologiques ; Ibn Taymiyya (mort en 1328), qui prêche un retour à la foi des origines lors des invasions mongoles au Moyen-Orient ; Mohammed ben Abdelwahab (XVIIIème siècle), qui s’allie avec Mohammed ben Saoud, fondateur de la dynastie qui dirige l’Arabie saoudite. La prédication salafiste est centrée sur la piété et la moralité. Toutefois, le salafisme « djihadiste », né en Afghanistan lors de la guerre contre l’occupation soviétique dans les années 1980, refuse de limiter l’action religieuse à la prédication et prône le « djihad » (guerre sainte) pour libérer les « terres d’islam » de toute occupation étrangère. En vue d’imposer un État islamique par la force, ses adeptes veulent renverser les régimes musulmans, jugés corrompus et impies, et entreprennent des actions violentes contre les États occidentaux qui les soutiennent.




Renseignement : indispensable à la souveraineté et garant de l’indépendance nationale

Les services de renseignement (SR) français ont connu une grande transformation en France ces dernières années, après la prise de conscience de l’opinion et des pouvoirs publics de la nécessité de leurs travaux.

Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois de l’Assemblée nationale, a fait le point de la situation au cours d’une conférence-débat organisée, le 9 février 2015 à Paris, par l’Institut des hautes études de défense nationale.

Évolution de l’opinion publique. Dans les pays anglo-saxons, les services de renseignement (SR) sont considérés comme utiles et légitimes et leurs agents comme exerçant « un métier de seigneur ». En France, en dehors des conflits armés, le renseignement a longtemps été perçu comme infâmant et comme un mélange de trahison et de surveillance policière. Cette absence de culture de renseignement ne résulte pas du hasard, estime Jean-Jacques Urvoas. La géographie du pays et son autosuffisance économique pendant longtemps n’ont guère incité ses habitants à s’informer sur l’extérieur, la quête de l’unité l’emportant sur la conquête hors frontières naturelles. Peu curieux, le tempérament français a valorisé la connaissance et méprisé le renseignement. Depuis le Moyen-Age, le risque doit permettre la victoire, qui résulte d’un exploit guerrier. La beauté du geste compte, notion totalement étrangère au monde du renseignement. La mémoire collective a retenu les « affaires » louches : Dreyfus (1894-1906), Ben Barka (1965), micros du Canard enchaîné (1973) et Rainbow Warrior (1985). Les dirigeants politiques français ont longtemps mal connu les possibilités et les contraintes des SR, estimant qu’ils peuvent tout, savent tout et ont réponse à tout… immédiatement ! Jusqu’à Nicolas Sarkozy (2007-2012), indique Jean-Jacques Urvoas, les présidents de la Vème République ont gardé une attitude méfiante ou prudente à leur égard. Toutefois, ces sentiments ne sont pas l’apanage de la France. Aux États-Unis, le président John Kennedy, échaudé par le fiasco de « l’affaire de la Baie des cochons » (1961) imputé à la CIA, avait déclaré à son personnel dans le hall de l’agence de renseignement : « Vos succès ne seront pas rendus publics, mais vos échecs seront annoncés à la trompette » ! Pourtant, tout change après les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis par l’organisation terroriste Al Qaïda. Celle-ci, qui ne dépend pas d’un État, peut frapper n’importe où, n’importe quand et n’importe comment. Contrairement à la guerre froide (1945-1991) où les objectifs des SR étaient de grande taille (capacités militaires et économiques adverses), la menace est devenue diffuse. Les renseignements d’origines humaine, technique et satellitaire ne suffisent plus. Il s’agit de détecter les « signaux faibles », cachés probablement au fond d’un ordinateur qui n’est pas connecté à internet. En outre, devant le développement exponentiel de la téléphonie mobile (courriels compris), les défis majeurs résident dans le tri de l’information et la capacité d’analyse. Pour l’opinion publique française, les SR, outils indispensables de l’État, sont devenus des « réducteurs d’incertitude » face à une menace non identifiable.

« Mutation » des SR. Le Livre blanc 2008 sur la défense et la sécurité nationale mentionne la nouvelle fonction stratégique « connaissance et anticipation », au même titre que « dissuasion », « protection », « prévention » et « intervention ». Est également créée la communauté du renseignement, qui regroupe 6 SR : Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), Direction du renseignement militaire et Direction de la protection et de la sécurité de la défense rattachées au ministère de la Défense ; Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, police nationale) ; Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (ministère de l’Économie) ; Tracfin (encadré, ministère des Finances). En 2014, le président de la République et le gouvernement ont engagé des mutations juridique et capacitaire des SR, indique Jean-Jacques Urvoas. Un budget supplémentaire de 425 M€ financera les équipements et le fonctionnement. Les effectifs, actuellement de 12.000 personnes, seront renforcés de 1.300 postes. A titre de comparaison, les SR américains emploient 80.000 personnes et les SR britanniques 30.000. En raison de la montée en puissance du terrorisme, le renseignement intérieur a été restructuré. La DCRI a été transformée en « Direction générale de la sécurité intérieure » (DGSI). Le recrutement, auparavant constitué à 66 % de fonctionnaires de police (formation juridique) est ouvert, par des contrats de 3-4 ans, aux informaticiens, mathématiciens (cryptage), traducteurs et analystes financiers. Le maillage territorial est reconfiguré en fonction du risque estimé. La DGSI a accès directement au ministre de l’Intérieur et peut coopérer plus facilement avec la DGSE. Elle peut établir des partenariats avec : la Préfecture de police de Paris pour les recherches sur l’immigration clandestine, les infractions à l’emploi d’étrangers, le terrorisme et l’action violente ; le Service central du renseignement territorial, né en mai 2014, pour le travail de détection en amont de dérives sectaires et de repli identitaire dans les quartiers difficiles ; la sous-direction à l’anticipation opérationnelle de la Gendarmerie nationale, qui dispose de brigades aux échelons départemental, régional et zonal ; le Bureau du renseignement pénitentiaire. En matière d’écoutes téléphoniques, les fichiers de Google et d’Amazon sont plus performants que ceux de la DGSI. En outre, les terroristes, se sachant sur écoutes, ne disent rien au téléphone et ne se parlent que chez eux. Leur domicile doit donc être « sonorisé » et leur véhicule suivi grâce à la pose de balises. Enfin, la loi va bientôt obliger les sociétés étrangères de téléphonie, comme Skype, à coopérer. L’emploi de ces moyens sera validé par une commission de contrôle avec des ingénieurs chargés de la vérification technique, précise Jean-Jacques Urvoas. Enfin, en matière d’espionnage industriel et de pillage de savoir-faire des entreprises, les plus grands prédateurs se trouvent parmi les pays alliés proches, souligne-t-il.

Loïc Salmon

Le renseignement, clé pour la connaissance et l’anticipation

Renseignement : importance croissante en France depuis la première guerre mondiale

Renseignement : cadre législatif à améliorer, selon la DPR

Le service de renseignement financier « Tracfin », qui dépend du ministère des Finances, compte une centaine dagents. Le département de lanalyse du renseignement et de linformation assure lintégration, lenrichissement et la valorisation de linformation. Il entretient des relations avec les professionnels déclarants et les services étrangers homologues. Le département des enquêtes recherche notamment les fraudes financières en matière de jeux et de transferts dargent. La cellule danalyse stratégique exploite les informations disponibles, afin didentifier les tendances en matière de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. Une cellule spécifique traite les affaires de financement du terrorisme. Le pôle juridique et judiciaire assure aussi une mission dexpertise. La mission « système dinformation » est chargée du fonctionnement et des évolutions des systèmes informatiques de Tracfin.