Défense : les contributions des armées aux Jeux Olympiques 2024

Les armées ont déployé 18.000 militaires en appui des forces de sécurité intérieure lors des Jeux Olympiques de Paris (26juillet-11 août). Sur les 64 médailles obtenues par l’équipe de France, 21 ont été remportées par des personnels du ministère des Armées.

Le général Lionel Catar, commandant la 27ème Brigade d’infanterie de montagne et de la « brigade olympique », a présenté un bilan à la presse le 27 août 2024 à Paris. L’armée de l’Air et de l’Espace a déployé une « bulle de protection » pendant la cérémonie d’ouverture et la Marine nationale a contribué à la sécurisation de la rade de Marseille et des épreuves de surf à Tahiti. Outre les 10.000 militaires de l’opération « Sentinelle » contre le terrorisme, le gouverneur militaire de Paris a bénéficié, pour la première fois, du renfort d’une brigade interarmes de l‘armée de Terre, qui a pris l’appellation de « brigade olympique ». Le dispositif est adapté pendant les Jeux Paralympiques du 28 août au 8 septembre.

Sécurisation terrestre. Le déploiement de dispositifs visibles a dissuadé les éventuels perturbateurs des Jeux, qui se sont déroulés sans incident, souligne le général Catar. Plus de 45 régiments ont fourni 5.600 soldats pour renforcer les diverses unités de protection, en collaboration étroite avec les services du préfet de Police de Paris et les autorités civiles des départements de la Grande Couronne. Un détachement d’hélicoptères légers (Gazelle) et de manœuvre (Caïman) a été stationné en région parisienne. Des moyens spécifiques de contrôle de zone ont été mis en œuvre, dont la Seine sur quatre kilomètres. Le dispositif de lutte anti-drones inclut des radars et des brouilleurs. Les patrouilles fluviales avec un détachement spécialisé de l’armée de Terre ont sécurisé le port de Paris et escorté les convois de péniches, notamment de céréales, pendant la période des Jeux. Plus de 60 drones ont effectué 1.500 vols, depuis juillet, pour assurer l’étanchéité du dispositif de protection avec des sonars sous-marins et des barrières fluviales. Un maillage très dense de patrouilles terrestres a permis d’éviter toute intrusion sur les quais aux approches du site, tout en maintenant une grande discrétion pour laisser les 300.000 spectateurs découvrir la cérémonie d’ouverture. Les patrouilles ont été intensifiées au large du château de Versailles et à Eurodisney, en passant par les plateformes de correspondance de transport, dont les gares, surtout après les sabotages du réseau TGV de la SNCF en juillet. Tout cela a été précédé par une longue préparation dès le printemps 2023. Débutée en novembre par l’exercice « Coubertin 23 » à Saint-Germain-en-Laye, la montée en puissance s’est poursuivie avec un séminaire de planification au printemps 2024, un exercice « Drone » en mai, l’installation du PC à l’École militaire et la prise de commandement tactique de la « brigade olympique » sur le dispositif « Sentinelle » en juin.

Médaillés olympiques. Les personnels des armées ont obtenu 4 médailles d’or sur les 16 de l’équipe de France, 6 d’argent (26) et 11 de bronze (22). Voici les militaires : second maître Shirine Boukli, médaille de bronze en judo -48 kg ; soldat de 1ère classe Luka Mkheidze, argent, en judo -60 kg ; maréchal des logis Manon Apithy-Brunet, or, en sabre individuel ; aviateur Nicolas Gestin, or, en canoë slalom ; sergent Thomas Chirault, argent, en tir à l’arc par équipe ; matelot Joan-Benjamin Gaba, argent, en judo -73kg ; adjudant Clarisse Agbegnénou, bronze, en judo -63kg ; sergent Léo Bergère, bronze, en triathlon ; sergent Anthony Jeanjean, bronze, en BMX Freestyle ; maître Charline Picon, bronze, en voile, série 49er FX; sergent Sylvain André, argent, en BMX Racing ; sergent Romain Mahieu, bronze, en BMX Racing ; matelot Johanne Defay, bronze, en surf ; soldat de 1ère classe Cyrian Ravet, bronze, en taekwondo -58 kg ; maréchal des logis Althéa Laurin, or, en taekwondo +67kg ; capitaine Élodie Clouvel, argent, en pentathlon moderne.

Loïc Salmon

Défense : contributions des armées à la sécurisation des Jeux Olympiques 2024

Défense : le CNSD, pôle d’excellence militaire et sportive

Influence du monde militaire sur les Jeux Olympiques




La Colombie : un pays en quête de paix et de justice

En Colombie, des zones pacifiées et prospères côtoient des territoires aux conditions de sécurité et de développement économique fortement dégradées. Les militaires doivent y combattre les groupes dissidents des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) et les narco-trafiquants.

Une douzaine de membres de l’Association des auditeurs de l’Institut national des hautes études de défense nationale l’ont constaté lors d’un voyage d’études du 19 au 29 mai 2024 et au cours de rencontres avec des responsables civils et militaires, des journalistes et des diplomates.

Une histoire unique en Amérique latine. La constitution de 1991, particulièrement progressiste et adoptée par référendum, se voulait un « modèle », mais le pays n’a pas eu les moyens de ses ambitions. La réforme agraire n’a pas été promulguée, l’éducation gratuite et l’amélioration du système de santé restent à l’état de promesses. Pourtant, la population aspire à vivre et travailler en paix. Depuis son indépendance de l’Espagne en 1819, la Colombie n’a pas connu de coups d’État militaires, sauf pendant quatre ans dans les années 1950. La population, instruite, est attachée à la démocratie et les militaires doivent uniquement protéger le territoire et la nation. Le fonctionnement institutionnel et le développement économique se fondent sur des principes démocratiques stables, où le respect de l’état de droit a toujours été recherché. Toutefois, une recrudescence des actes criminels, sans pourtant de référence idéologique systématique, est constatée et à laquelle s’ajoute le narcotrafic, source inépuisable de revenus.

Le combat contre le narcotrafic. La Colombie ne dispose pas de cadastre, la terre appartenant à de grands propriétaires. Le gouvernement actuel s’est engagé à distribuer 16 millions d’hectares de terre aux paysans, afin de les inciter à produire et commercialiser autre chose que la seule feuille de coca. Cette réforme, jugée trop lente et insuffisante, permettrait de réduire le narcotrafic et la guérilla…qui y trouve une partie de son financement !

Les responsabilités des armées. Configuration inédite, les forces armées colombienne sont parmi les rares au monde à combattre sur leur propre territoire depuis plusieurs décennies. L’armée de Terre assume l’essentiel de la sécurité intérieure sur l’ensemble du territoire, en sus de sa mission fondamentale de défense des intérêts souverains et vitaux du pays vis-à-vis de menaces extérieures. La police relevant du ministère de la Défense, l’armée de Terre assure donc les missions de sécurité extérieure et intérieure, notamment dans les nombreuses zones isolées et/ou en état de guerre. Selon un général, « les priorités sont d’assurer la sécurité de la population, de réduire la menace, de protéger les instances de gouvernance de l’État et également de renforcer les moyens nécessaires aux forces armées ». De son côté, la Marine doit assurer la sécurité extérieure et intérieure sur 2.900 km de côtes sur l’océan Pacifique et la mer des Caraïbes, un million de km² de la Zone économique exclusive et 2.000 km de fleuves et rivières. A la protection du territoire maritime et des infrastructures critiques du pays, s’ajoutent des actions auprès d’autres acteurs de l’État et de la société, à savoir pouvoirs publics centraux et locaux, services étatiques, entreprises publiques et privées, organisations sociales non gouvernementales (communautés religieuses, fondations et associations).

La construction de la paix. En 2016, les accords conclus avec les FARC et d’autres organisations armées prévoyaient plusieurs étapes jusqu’au cessez-le-feu définitif et au désarmement de toutes les forces non-gouvernementales. Cependant, la société civile a rejeté ces accords. En 2018, les activités violentes des factions dissidentes des FARC et celles, illégales, des groupes mafieux alimentés par le trafic de drogue ont repris. La crise sanitaire du Covid-19 a réduit l’efficacité des actions de l’Etat et des opérations militaires et a favorisé une remontée en puissance des groupes armés, plus nombreux et plus déterminés. Le trafic de drogue, celui de migrants et l’extraction illégale de l’or génèrent des sommes importantes et donnent aux trafiquants un grand pouvoir d’intimidation et de coercition. Mais ces diverses activités permettent de donner du travail aux populations locales, qui se soumettent à la loi du plus fort. Au cours des cinq premiers mois de l’année 2024, 210 tonnes de cocaïne ont été saisies, soit une hausse de 36 % par rapport à la même période en 2023. Cependant, le processus de construction de la paix reste au centre de la vie politique colombienne depuis de nombreuses années. Les accords de paix de 2016, malgré des difficultés d’application, constituent la base du projet actuel de reconstruction de la société colombienne. La nouvelle présidence de 2022 s’est engagée à faire appliquer les accords de paix de 2016 sur six points : réforme agraire complète ; participation de tous à la vie politique ; fin du conflit ; solution au problème des drogues illicites ; accord sur les victimes du conflit ; mécanismes de vérification des plaintes mettant en place la « Juridiction spéciale pour la paix ». Trois institutions composent le « Système intégré pour la vérité », car sans elle, il n’y a pas de réconciliation possible et le risque d’une reprise des combats par les FARC persiste. Pendant quatre ans, une commission, dite de la « vérité », a recueilli les témoignages de 30.000 personnes et étudié 1.236 dossiers de diverses organisations pour comprendre les faits et les motifs d’une guerre de près de 60 ans. Son rapport final de 900 pages, publié en juin 2022, met en évidence les principales caractéristiques du conflit et formule des recommandations pour un avenir plus serein. Il est divisé en 10 volumes : 6 à caractère général sur les droits de l’Homme, le droit international humanitaire et le droit de la Guerre appliqués à la Colombie ; 4 sur les ethnies, les jeunes (garçons et filles), les femmes et l’exil. La Commission estime à 700.000 les homicides sur un total de 9 millions de morts dus au conflit entre 1964 et 2019, dont 80 % de civils non-combattants. En outre, la « Juridiction spéciale pour la Paix », instance judiciaire, vise à redonner confiance dans les institutions. Elle diffère de la « Commission de la Vérité » et de « l’Unité de recherche des disparus », processus extrajudiciaires à caractère humanitaire. Il s’agit en effet d’un tribunal colombien autonome et non d’une juridiction internationale. Elle doit satisfaire les droits des victimes et dispose de 38 juges et d’une unité d’enquête. Même les auteurs des crimes participent à la recherche grâce à la justice transitionnelle, dite « restaurative » et qui établit un dialogue entre les accusés et les victimes. Par ailleurs, conformément à l’article 6.3.3 de l’accord de paix de 2016, le conseil de sécurité de l’ONU a mis en place une « Mission de vérification des nations unies en Colombie » avec un mandat initial de 12 mois, renouvelable tous les trois ans et dont le dernier remonte à octobre 2023. En outre, le 29 juin 2024, le chef de l’État Gustavo Petro et le groupe dissident des FARC « Segunda Marquetalia» ont signé un accord sur un cessez-le-feu unilatéral dès l’entrée en vigueur du décret présidentiel sur les opérations militaires offensives. Les deux parties doivent établir le calendrier de la désescalade et l’identification des projets sociaux. Le lien entre amélioration socio-économique et stabilisation politico-militaire y est à nouveau souligné. Une véritable réforme agraire avec une répartition équitable des terres, accompagnée de projets de développement menés par l’Etat dans toutes les parties du territoire, permettrait une reconstruction du lien social et diminuerait l’emprise des trafiquants. En dépit de longues années de guerre civile, la Colombie a réussi à préserver ses institutions, basées sur des principes démocratiques et une diversité de partis politiques. Malgré les difficultés restant à surmonter, une pacification totale et la reconstruction d’une Colombie stable et réconciliée apparaît comme un projet ambitieux mais pas utopique.

Hélène Mazeran

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Lutte contre le trafic de drogue : réponse internationale




Les services secrets en Indochine

La reddition du camp retranché dans la cuvette de Diên Biên Phu marque la fin de la guerre d’Indochine (1946-1954). Le commandement militaire français, surpris par la présence en surplomb de l’artillerie nord-vietnamienne, a reproché aux services de renseignement (SR) de ne pas l’avoir averti…alors qu’il l’avait été !

Les SR assurent un rôle capital dans le processus de décision des acteurs politiques et militaires Toutes les sources ont donc été utilisées, à savoir renseignement humain, infiltration d’agents sur les arrières ennemis, patrouilles, interrogatoires des déserteurs et des prisonniers, écoutes des communications du corps de bataille nord-vietnamien et renseignement aérien quand la météo le permet. Toutefois, lors de la bataille de Diên Biên Phu et des actions précédentes, les SR n’ont souvent rencontré que scepticisme et incrédulité. Dès 1945 après la reddition de l’armée japonaise en Indochine, le 2ème Bureau (SR) des Forces terrestres en Extrême-Orient va progressivement disposer des outils de recherche de la Marine et de l’armée de l’Air. Puis les différents hauts-commissaires créent des organismes de centralisation du renseignement, dont le contrôle devient le point de convergence des conflits entre les différentes autorités régionales d’Indochine et des luttes d’influences politiques en cours entre Saïgon et Paris. Le service de police et de sûreté assure la recherche du renseignement politique. Parmi les divers SR en Indochine, deux jouent un rôle fondamental. Le Service de documentation extérieure et de contre-espionnage (prédécesseur de la DGSE), seul habilité à agir clandestinement sur les territoires ne relevant pas de la souveraineté française, va manifester son omnipotence. En 1953, il se révèle mêlé au trafic de l’opium…comme la République démocratique du Viêt Nam (Nord), qui finance une partie de sa guerre par le contrôle de 80 % de la production de l’opium cultivé par les montagnards à la frontière avec le Laos. Le Service technique de recherche, qui s’occupe du décryptement et de l’exploitation des communications du Viêt Minh (organisation politique et paramilitaire créée en 1941 par le Parti communiste vietnamien), travaille avec le Groupement des contrôles radioélectriques qui intercepte les liaisons radio adverses. Pourtant, malgré les bulletins de renseignement alarmistes, la sous-estimation des capacités ennemies par le commandement français provoque le désastre de la bataille de la Route coloniale 4 lors de l’opération d’évacuation de Cao Bang en 1950. L’une des causes se trouve dans les rapports mitigés entre le corps des officiers et les SR. S’y ajoutent le poids des habitudes, l’orgueil de la profession, le sentiment de supériorité et…l’ignorance des choses du renseignement ! De son côté, le commandement nord-vietnamien a utilisé pleinement le renseignement tactique fourni par ses services. Dès 1951, les autorités politiques et militaires d’Indochine partagent alors une nouvelle lecture du conflit avec la notion de guerre révolutionnaire combinant le choc des corps de bataille et le contrôle de la population. Les commandants en chef vont multiplier les sources de renseignement au plus près du terrain et resserrer le maillage du théâtre d’opérations par l’action des SR, afin de détruire l’appareil militaire adverse. En 1950, sur le plan international, les États d’Indochine (Laos, Cambodge et Sud-Viêt Nam) accèdent à une indépendance limitée et l’Armée de Chine populaire atteint la frontière avec le Tonkin. Le conflit entre alors dans le contexte de la guerre froide (1947-1991). Les dirigeants politiques français vont transformer une guerre néocoloniale en combat pour la défense du monde libre. La guerre de Corée (1950-1953) renforce la politique américaine d’endiguement en Asie du Sud-Est. Puis, les États-Unis interviennent militairement en Indochine de 1955 à 1975.

Loïc Salmon

« Les services secrets en Indochine », Jean-Marie Le Page. Nouveau Monde Éditions, 523 p, 11,90 €.

Renseignement : recomposition des services au début de la guerre froide (1945-1955)

Les services secrets chinois, de Mao au Covid-19

Le livre noir de la CIA




OTAN : 75ème anniversaire, soutien accru à l’Ukraine et partenariats extérieurs

Lors du sommet de l’OTAN tenu à Washington du 9 au 11 juillet 2024, 75 ans après de sa création, les pays membres ont réaffirmé leur soutien à l’Ukraine jusqu’à la victoire contre la Russie. En outre, l’OTAN approfondit des partenariats extérieurs.

Conseil OTAN-Ukraine. Les 32 chefs d’État et de gouvernement ont souligné « l’entière responsabilité de la Russie dans cette guerre (contre l’Ukraine), « violation flagrante du droit international et notamment de la Charte des Nations Unies ». Ils ont déploré « les souffrances et la destruction causées par la guerre d’agression, illégale et injustifiable, que la Russie a déclenchée en l’absence de toute provocation ». Les Alliés ont lancé le programme « NSATU » de formation et d’assistance à la sécurité en faveur de l’Ukraine, destiné à coordonner les formations et les livraisons d’équipements militaires et aussi à fournir un soutien logistique. Ils ont aussi annoncé l’adoption d’un engagement durable à l’Ukraine pour assurer sa sécurité en incluant un financement de 40 Mds€ pour l’année à venir. Le 11 juillet, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rejoint la réunion du Conseil OTAN-Ukraine, dont les membres lui ont confirmé leur aide pour une adhésion à l’OTAN, lorsque les conditions seront réunies. Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a indiqué que 20 États membres de l’OTAN ont signé des accords bilatéraux avec l’Ukraine et que ce nombre continue d’augmenter. Il a ajouté qu’un centre d’analyse, d’entraînement et de formation, dénommé JATEC et auquel participera l’Ukraine, sera établi en Pologne, afin d’exploiter les enseignements à tirer de la guerre russo-ukrainienne, notamment en matière de résilience.

Partenariats extérieurs. Le 11 juillet, les dirigeants de l’OTAN ont rencontré ceux d’Australie, de Nouvelle-Zélande, du Japon, de Corée du Sud et de l’Union européenne (UE) pour parler de la sécurité commune. Face à l’alignement croissant de la Russie, de la Chine, de l’Iran et de la Corée du Nord, l’OTAN coopère de plus en plus étroitement avec ses partenaires de la zone Indopacifique et avec l’UE pour préserver la paix et protéger l’ordre international fondé sur des règles. Son secrétaire général a expliqué le rôle déterminant de la Chine dans la guerre de la Russie contre l’Ukraine. Le prochain sommet de l’OTAN se tiendra en 2025 à La Haye (Pays-Bas).

Participation française à l’OTAN. En 2024, la France consacre 2 % de son produit intérieur brut à la défense, objectif fixé par l’OTAN. En outre, sa crédibilité se manifeste par l’interopérabilité dans les exercices interalliés. Ainsi, l’exercice « Steadfast Defender », le plus important de l’OTAN, a mis en cohérence des manœuvres multi-milieux (terre, air, mer et espace) et multi-champs (cyber et informationnel) de la guerre hybride à celle de la haute intensité. Il a englobé les exercices : « Joint Warrior », défense navale en mer de Norvège (25 février-5 mars) ; « Dragon », combats de blindés de haute intensité en Pologne (29 février-14 mars) ; « Nordic Response », combats polaires en Norvège et en Finlande (5-14 mars) ; « Springstorm », défense du territoire en Estonie (22 avril-30 mai) ; « Swift Response », opération parachutiste en Roumanie (5-24 mai) ; « Gran Quadriga », défense du territoire en Lituanie (12-31 mai) ; « Dacian Spring », déploiement d’un poste de commandement de niveau brigade en Roumanie (18-26 mai) ; « Neptune Strike » avec les groupes aéronavals français, américain, espagnol, italien et turc en Méditerranée (26 avril-16 mai). S’y ajoutent notamment : la mission « Aigle » avec un bataillon multinational de 1.000 soldats en Roumanie, où la France est nation-cadre (depuis le 28 février 2022) ; la contribution régulière à la police du ciel dans les pays baltes à partir de la Lituanie (4 Rafale de novembre 2022 à mars 2023 puis 4 Mirage 2000-5 de novembre 2023 à mars 2024) ; le système de défense sol-air Mamba déployé en Roumanie (depuis le 16 mai 2022).

Loïc Salmon

Russie : la BITD s’adapte pendant la guerre contre l’Ukraine

OTAN : pouvoir conserver l’avantage opérationnel

Ukraine : le volet français de la défense du flanc Est de l’Europe




Russie : la BITD s’adapte pendant la guerre contre l’Ukraine

Par suite de la raréfaction des livraisons d’armes occidentales, la base industrielle de technologie et de défense (BITD) russe se prépare à un affrontement de longue durée et organise ses approvisionnements à l’étranger.

Isabelle Facon, directrice adjointe de la Fondation pour la recherche stratégique, l’explique dans le numéro de juin 2024 de la revue Défense & Industries.

Tâtonnements et reprise. En septembre 2022, après la mobilisation de 300.000 hommes, le président russe Vladimir Poutine ordonne à l’industrie d’armement de concentrer ses efforts sur les besoins des forces armée engagées sur le front ukrainien. Or la BITD souffre de coûts élevés de fonctionnement et du manque de personnels qualifiés. Loin d’en améliorer l’efficacité, la création de grands groupes industriels, au milieu des années 2000, a favorisé la corruption et le népotisme. Devant l’insuffisance des rythmes de production, des négociations portent sur des achats massifs de drones iraniens et la fourniture de munitions par la Corée du Nord. En outre, des pièces de rechange de chars et de missiles sont rachetées dans l’urgence à l’Inde et à la Birmanie. Rien qu’en décembre 2022, 24 M$ ont été dépensés pour racheter 6.000 télescopes de visée et 200 caméras pour moderniser les chars T-72 en stock. Un missilier russe a racheté au ministère indien de la Défense ses propres composants pour missiles anti-aériens au prix de 150.000 $. Puis, à l’automne 2023, les entreprises russes d’armement accroissent la production de systèmes, d’obus, de lance-roquettes multiples et de munitions guidées. Le budget de la défense passe de 3,9 % du produit intérieur brut en 2023 à 6,7 % en 2024. Pour pallier le manque de personnel qualifié, estimé à 160.000 personnes, de nouveaux recrutés sont formés avant d’être employés sur les chaînes de production. L’économie russe profite des dépenses de l’État pour satisfaire les demandes de l’industrie d’armement, notamment d’acier, de matériels informatiques et électroniques, d’instruments de navigation et d’équipements électriques. La production globale de 2023, supérieure à celle de 2022, inclut les équipements issus des stocks, à savoir chars, pièces d’artillerie et blindés de transport de troupes réparés ou modernisés. Celles des missiles Iskander et Kalibr continuent. Celles des drones de diverses catégories ont considérablement augmenté ainsi que celles des munitions d’artillerie de différents calibres. Selon certains économistes, la Russie peut produire des matériels peu sophistiqués en grandes quantités et sans limite de temps. En revanche, elle subit les conséquences des sanctions occidentales et de la faiblesse de l’électronique nationale pour les équipements plus complexes. Environ 80 % des besoins des forces armées russes sur le front ukrainien sont assurés par le groupe Rosteckh, qui emploie 660.000 personnes et inclut notamment l’entreprise aéronautique OAK, les fabricants de moteurs, la société Hélicoptères de Russie et la centrale d’exportation d’armement Rosoboronexport. Selon le président-directeur général de Rostekh, Seguei Tchermezov, le ministère de la Défense tente de faire baisser les prix d’achat en rognant sur les marges des industriels, qui ne sont plus motivés pour améliorer leur productivité. En outre, la présence des agents de la Sécurité intérieure s’affirme de plus en plus sur les sites industriels. Ceux de la Sécurité extérieure s’efforcent de reconstituer des chaînes d’approvisionnement de matériels de haute technologie et de contourner les restrictions occidentales.

Dépendance mais bonnes connexions. Après l’invasion de la Crimée en 2014 et les premières sanctions occidentales, la BITD russe avait dû élaborer des programmes de substitution de centaines de pièces de rechange et de composants achetés dans les pays occidentaux et en Ukraine. Depuis l’invasion de celle-ci en 2022, le démontage de matériels russes récupérés sur le champ de bataille atteste de l’emploi massif de composants étrangers. La Chine en est devenue le premier fournisseur, y compris pour les machines-outils utilisées. D’autres technologies et matériels, construits en Europe ou aux États-Unis, sont réexportés en Russie par des pays qui ne se considèrent pas tenus de respecter les sanctions occidentales contre la Russie. L’accès aux composants militaires faisant l’objet de contrôles plus sévères, il s’agit en général de produits civils ou à double usage. Ainsi certains d’entre eux, considérés comme « hautement prioritaires » par les pays occidentaux, ont été découverts dans les missiles Kalibr, les missiles de croisière aériens Kh-101, les drones Orlan-10, les munitions rôdeuses Lancet et les hélicoptères Ka-52 Alligator. En 2023, leur nombre aurait à nouveau atteint celui d’avant l’invasion de l’Ukraine en février 2022, avantageant considérablement la Russie dans sa guerre d’attrition contre elle. Par ailleurs, la Russie s’inspire des expériences de l’Iran et de la Corée du Nord, qui parviennent à produire des armements malgré les sanctions internationales de longue durée à leur encontre. La centrale Rosoboronexport anticipe une montée en puissance des partenariats technologiques pour la réalisation de matériels militaires, susceptibles de couvrir jusqu’à 40 % du marché mondial d’ici à 2030. Le partage de technologies et de compétences pour la production d’armements à l’étranger devrait permettre aux pays partenaires de développer leur propre BITD et aux entreprises russes de se concentrer sur la satisfaction des besoins des forces armées nationales. Cela souligne la détermination de Moscou à restaurer, à terme, la place occupée précédemment par sa BITD sur le marché mondial de l’armement. Indépendamment de la guerre en Ukraine, les entreprises russes d’armement anticipent des commandes importantes dans la prochaine décennie, en vue de reconstituer les stocks dans la perspective d’une confrontation militaro-politique de longue durée ave l’OTAN.

Perspectives à l’exportation. La guerre en Ukraine a fortement ralenti l’exportation d’armements russes, dont le montant moyen annuel est passé de 15 Mds$, depuis plusieurs années, à 8 Mds$ en 2022, baisse poursuivie en 2023. Toutefois, Rosoboronexport continue de prospecter à l’étranger en vue de l’après-guerre. Selon elle, l’expérience ainsi acquise stimule l’innovation et l’élaboration de nouvelles solutions techniques pour améliorer les performances des matériels militaires. Comme lors des opérations russes en Syrie (depuis 2015) ou d’exercices nationaux, des équipements ont été expérimentés sur le champ de bataille en Ukraine et modifiés en fonction du retour d’expérience. Selon la presse russe, plusieurs armées étrangères ont signalé leur intérêt pour les matériels suivants, après leur emploi en conditions réelles de combat : drones ; munitions rôdeuses Lancet et Kub ; équipements anti-drones ; missiles aériens, dont missiles antiradars ; hélicoptères de reconnaissance et d’attaque Ka-52 et MI-28N et leurs moyens antichars utilisables à distance du champ de bataille ; missiles Vikhr ; systèmes de protection contre les  « manpads » (systèmes portatifs de défense anti-aérienne) ; véhicules de soutien du char Terminator ; véhicules de soutien d’infanterie ; systèmes anti-aériens ; fusils d’assaut AK-12 ; systèmes Tor contre les munitions de Himars (lance-roquettes multiples américains) ; toute la gamme des moyens d’artillerie jusqu’aux missiles balistiques Iskander à courte et moyenne portées. Malgré le conflit ukrainien, des contrats auraient été signés avec des clients étrangers, en toute confidentialité pour éviter des sanctions ultérieures américaines. En outre, pour contourner les sanctions occidentales sur les institutions bancaires, de nouveaux schémas de paiement sont utilisés ou à l’étude, comme les paiements en monnaies nationales hors dollar et euro, le troc et la cryptomonnaie. Ainsi, la BITD russe disposerait d’un carnet stable de commandes, réalisables après la guerre, estimé à 50-55 Mds$.

Loïc Salmon

Russie : confit en Ukraine, mobilisation partielle et fragilités

Chine et Russie : affirmations de puissance et difficultés internes

OTAN : 75ème anniversaire, soutien accru à l’Ukraine et partenariats extérieurs

 




Commission Mémoire et Histoire

La commission Mémoire et Histoire de l’ANCGVM, dont la formalisation date de l’assemblée générale de Lorient en 2023, présente ses travaux passés et à venir. 

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Cenzub/94ème RI

Héritier du 94ème Régiment d’infanterie le Centre d’entraînement en zone urbaine est titulaire de la croix de Guerre 1914-1918 avec 5 palmes de bronze et 1 étoile de vermeil.

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Frégate Multi-Missions Lorraine

Héritière du cuirassé du même nom, le Frégate européenne multi-missions (FREMM) Lorraine est titulaire de la croix de Guerre 1939-1945 avec palme.

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Lycée militaire d’Aix-en-Provence

 

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Du sens et de l’action, propos de saint-cyriens

Cet ouvrage collectif est écrit par des saint-cyriens tous issus de la promotion «Chef de bataillon Segrétain, 2006-2009».

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