Réduit au pilote et au chef de bord, responsable de la mission, l’équipage d’un hélicoptère Gazelle de l’Aviation légère de l’armée de terre (ALAT) forme un binôme indissociable, à l’entraînement puis en opération.
La mission rapproche les hommes, puis le combat et le danger les soudent. Les gestes, dix à cent fois répétés, deviennent réflexes pour travailler en équipe et garantir la survie au combat, où le facteur « chance » intervient ou non. Après des mois de préparation, la participation au conflit du moment donne aux pilotes de l’ALAT l’occasion de se confronter à eux-mêmes, au risque au danger et à la mort. Dans cet ouvrage, il s’agit de l’Afghanistan en 2011. L’équipement, ensemble logique et cohérent des outils opérationnels, sauvera peut-être leur vie : casque, optique de nuit, gilet pare-balles, armement, gants, couteau coupe-sangles et documentation. Même si le risque d’être touché par l’adversaire reste faible, l’hypothèse de la panne, du « poser dur » ou de l’écrasement au sol demeure, avec la perspective de se retrouver isolé en zone hostile. Alors que les fantassins de la coalition internationale, engagée dans la lutte contre les talibans, sentent que tous ne reviendront pas d’une patrouille, les pilotes, chargés de les escorter et de les appuyer en cas d’accrochage, ont la certitude inverse. Les rebelles ne disposent en effet que de peu de missiles sol-air et ne les tirent qu’à coup sûr. En outre, un hélicoptère Gazelle, entre 300 m et 600 m d’altitude, reste hors de portée des armes automatiques. Même en vol tactique à moins de 10 m du sol mais à plus de 150 km/h, l’effet de surprise le préserve d’une éventuelle riposte ennemie. Toutefois, sa vulnérabilité s’accroît lors des phases de tir, où il descend et se stabilise quelques instants, et de décollage et d’atterrissage sur des zones à la portée des fusils d’assaut Kalachnikov ou de précision Dragounov et missiles Silkworm. Concentré sur ces manœuvres, particulièrement délicates, l’équipage ne peut riposter aisément. L’expérience des embuscades de la guerre afghane de l’Union soviétique (1979-1989) a débouché sur des règles valables pour les fantassins et les pilotes de l’ALAT : ne jamais repasser au même endroit et ne pas revenir par le même chemin. Cela implique de nombreuses missions de reconnaissance, car insurgés et forces de la coalition adaptent sans cesse leurs tactiques. Pour obtenir la maîtrise du terrain et de leurs missions, avant de voler, l’équipage doit connaître les dernières informations et pièges, les zones favorites de tir des talibans, la topographie, l’aérologie à cause des vents capricieux et redoutables et, bien sûr, l’état de son aéronef. Le chef de bord dispose de photos satellites très précises de la zone de la mission, jusqu’à des carrés de 100 m de côté avec tous les ponts, ruelles et habitations. En vol, le pilote se concentre sur le pilotage, tandis que le chef de bord scrute le terrain avec sa caméra, à la recherche de menaces et d’éventuels départs de tirs dans des zones qu’il sait potentiellement dangereuses. L’obsession du détail constitue le meilleur moyen de revenir vivant. Et pourtant, l’imprévu reste de mise, à savoir le changement soudain des conditions atmosphériques et le manque de réaction de l’hélicoptère, malgré les efforts du pilote. Au moment du « crash », la balise de détresse se déclenche automatiquement. L’organisation du sauvetage, à partir de la grande base américaine de Bagram, entre alors en action. Mais l’équipage n’en revient pas toujours au complet.
Loïc Salmon
« Pilotes de combat », par Nicolas Mingasson. Éditions Les Belles Lettres, 134 pages. 11 €
Lieutenants en Afghanistan, retour d’expérience