L’innovation technologique doit pouvoir donner l’agilité tactique qui surprendra l’adversaire. Elle doit donc « coller » aux besoins des opérations spéciales et se décliner au niveau du combattant.
Le vice-amiral Laurent Isnard, commandant des opérations spéciales, l’a expliqué à la presse, le 21 mars 2019, à l’occasion du salon international des forces spéciales au camp de Souge (Gironde) du 2 au 4 avril 2019.
Aide à la réactivité. L’innovation en matière de renseignement ou de communication donne un temps d’avance dans les déplacements et laisse le choix de la neutralisation de l’adversaire selon la mission. La commission de recherche du Commandement des opérations spéciales profite du retour d’expérience pour planifier à moyen terme, effectuer des achats « sur étagères » et mener des études sur les nouveaux équipements et armements. Elle finance 60 projets par an et s’intéresse aussi aux technologies « duales » venant du monde civil, dont le cryptage. Elle échange des informations avec l’Agence innovation défense sur les technologies dites de « rupture » présentant une utilité opérationnelle. Un dialogue approfondi se poursuit entre les opérateurs des FS, les « start-ups » innovantes et les bureaux recherche et développement des grands groupes industriels. Selon l’amiral, les terroristes font de moins en moins d’erreurs et ne sont pas astreints au respect de normes, contrairement aux forces spéciales (FS) qui doivent pouvoir détecter leurs failles. Cela nécessite une collecte considérable de données et un logiciel performant qui les exploite pour trouver la « bonne » information. Les FS s’intéressent aux logiciels de communication, de navigation et d’aide à la vision. Ainsi, le tireur d’élite dispose de jumelles connectées à un logiciel adapté, qui utilise des informations d’origine spatiale pour suivre sa cible avant de « l’engager ». Un autre logiciel intégré facilitera le tir de nuit. Il existe déjà des munitions « sur mesure » correspondant à une mission particulière. La caméra thermique permet de voir des gens par tous les temps, surtout mauvais, pour agir plus discrètement. Toutefois une trop grande diffusion de chaleur en réduit l’efficacité. A l’occasion d’un séminaire annuel, les forces conventionnelles bénéficient du retour d’expérience des équipements développés pour les FS. Ainsi, les drones du commando Kieffer (marine) ont surveillé l’évolution de la pollution causée par le naufrage du navire de commerce italien Grande-America dans le golfe de Gascogne le 12 mars 2019. Outre l’observation, les drones peuvent servir de relais de communications pour constituer une « bulle » sur zone. Les priorités des FS portent sur la lutte contre le froid, les moyens de voir plus loin et plus rapidement, la guerre électronique et le cyber pour comprendre l’environnement.
« Sofins ». L’édition 2019 du « Special operation forces innovation network seminar » (Sofins) accueille 250 exposants, 50 délégations étrangères et 4.000 visiteurs, dont les membres des commissions parlementaires de la défense qui suivent l’exécution de la loi de programmation militaire 2019-2025. Sofins inclut une journée sur les technologies et innovations au profit des FS et une autre sur la place de l’humain dans un environnement innovant. Il donne l’occasion aux FS françaises et étrangères d’examiner ce qui a bien fonctionné lors des opérations, en vue d’une mise en commun des méthodes. Quant aux nouveaux matériels, l’intérêt porte sur les appareils de vision nocturne, la protection, la balistique et les équipements d’hélicoptère.
Loïc Salmon
Défense : l’AID, interlocutrice des porteurs d’innovation