L’image, toujours fantasmée, de l’agent de renseignement incite les réalisateurs de films de fiction ou de documentaires à tenter de démystifier cette profession. Toutefois, le spectaculaire se vend toujours mieux que la froide et banale réalité.
En France, alors que la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) conserve son autonomie et peut être amenée à travailler en dehors de la légalité française et internationale, la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) recrute des officiers de police judiciaire avec le pouvoir d’arrêter des suspects.
Les mondes du renseignement et du cinéma peuvent-ils se rencontrer ? L’Association nationale des auditeurs jeunes de l’Institut des hautes études de défense nationale a cherché à le savoir en organisant une table ronde le 25 octobre 2011 à Paris. Y ont participé Jérôme Chauvelot (journaliste indépendant, producteur et réalisateur de documentaires), Philippe Haïm (réalisateur, compositeur et scénariste), Nicolas Saada (réalisateur), Jean Guisnel (journaliste et auteur de documentaires), Alain Chouet (carrière à la DGSE de 1972 à 2002) et Jean-François Clair (de 1972 à 2007 à la Direction de la surveillance du territoire, qui a fusionné en 2008 avec les Renseignements généraux pour former la DCRI). En outre, le « chargé de communication » de la DGSE est intervenu.
Pourquoi et comment : l’acquisition de la vérité au moyen du mensonge et de la manipulation fascine, car les Etats n’apparaissent pas. La recherche de base commence par la documentation écrite, audiovisuelle et internet, puis se complète par des conférences sur le sujet et des rencontres avec des journalistes spécialisés. La lecture de livres autobiographiques de responsables de services de l’époque de la guerre froide, avec les conséquences de leur activité professionnelle sur leur vie privée, se révèle instructive. Ainsi, un acteur de cinéma a passé sept mois à lire (en français et en anglais) tout ce qui lui tombait sous la main pour s’imprégner de l’ambiance. Pour pouvoir raconter en images la vie de ceux dont c’est le métier, il faut d’abord capter leur confiance avant de pouvoir les rencontrer effectivement : cela prend du temps ! Dans les années 1980 en France, seul le directeur d’un service de renseignement pouvait s’exprimer publiquement. Aujourd’hui, il ya des gens formés à la communication extérieure. Quant aux services britanniques de renseignement, ils refusent tout contact et renvoient à leur site internet… où se trouvent des offres d’emploi !
La fiction : même si le monde du renseignement ne sert que de toile de fond à une aventure humaine plus ou moins dramatique, il faut d’abord le comprendre. Les gens du renseignement ne comprennent pas comment se réalise un film, dont le tournage discontinu se fait par séquences non chronologiques. Quant aux acteurs, il faut leur rappeler à chaque fois à quel moment de l’histoire ils jouent, afin qu’ils mettent de l’émotion au bon moment. Des spécialistes des mondes du renseignement et du cinéma interviennent également : attachées de presse, vedettes et journalistes. Certaines fictions sont à la limite du documentaire, faute d’action, quand il s’agit d’enquêter sur la vie d’un officier traitant. Le succès n’est guère garanti ! En fait, il convient de se trouver à mi-chemin entre une fiction totale et un certain réalisme.
Le documentaire : des contacts sont pris avec la DGSE, la Direction du renseignement militaire et même le ministre de la Défense. Tous attendent de la compétence et de la connivence. Sinon, ils découragent : « c’est une mauvaise idée », « vous n’y arriverez pas ». Mais, malgré les difficultés et à force de patience et de détermination, cela devient possible. Des « contrats » sont établis pour certaines prises de vues. L’actuel président de la République a donné son accord pour que les gens des services de renseignement parlent. Le travail sur le renseignement se rapproche du journalisme : pas d’achat d’informations, vérification, recoupement, ne pas trahir les gens qui acceptent de parler, ne pas divulguer trop tôt. « Les pros du renseignement trouvent ça bien et, quand on les appelle, ils disent oui ». Mais, un documentaire n’est pas un reportage. Il s’agit d’interviewer les gens qu’on a choisis soi-même et non pas ceux qui se sont proposés pour répondre. Pour conserver leur anonymat, ils sont filmés à contrejour ou de dos ou bien les images sont noircies. Pour la hiérarchie, y compris au plus haut niveau, il ya tout intérêt à ce que ça se passe bien pour présenter le fonctionnement du service et sa finalité. Pourtant, la marge d’erreur est aussi large dans le documentaire que dans la fiction.
La réalité : le monde du renseignement n’est pas télégénique, ni drôle. Il est composé de fonctionnaires inconnus, recrutés par concours et qui n’ont guère besoin de films d’espionnage. Le quotidien du renseignement intérieur consiste à effectuer des filatures et à taper des rapports. « On n’a pas besoin de héros, mais de gens qui font leur boulot ! » Certains sujets sont exclus : les opérations, les méthodes et les sources. A ce propos, le recrutement d’une source ne se fait pas sur un « pur chantage », mais sur le long terme et implique une formation. Une vérification préalable s’impose à l’égard d’un « faux volontaire », peut-être envoyé pour « intoxiquer » le service. Par ailleurs, la « déclassification » d’archives est refusée si elle risque de « griller » une source ou de mettre en péril un agent des services de renseignement. Le délai légal est de 50 ans. Dans le domaine économique, les officines privées d’intelligence économique, souvent composées d’anciens agents des services, sont mal considérées, car elles ne s’intéressent qu’à ce qui, selon elles, peut rapporter de l’argent, alors que les services officiels travaillent sur tout. Aujourd’hui, selon un sondage réalisé par la DGSE, 76% des Français savent ce qu’elle est, 75 % en ont une image positive et 18 % sont sans opinion. Par ailleurs, la loi interdit de divulguer l’identité réelle d’un de ses agents et même son appartenance au service. Ainsi, le ministère de la Défense a entamé une action en justice contre Maurice Dufresse, alias Paul Siramy et ancien membre de la DGSE, qui dévoile des sources dans un livre intitulé « 25 ans dans les services secrets ».
Loïc Salmon
Toutes les aventures de l’agent britannique James Bond ont été portées à l’écran à partir de 1962. En deux ans, le succès rencontré fait de lui une vedette internationale, de même que son interprète Sean Connery. Par la suite, il sera incarné par sept autres acteurs, dont Roger Moore (affiche du film « Rien que pour vos yeux »). D’après les divers livres que Ian Fleming lui a consacrés, James Bond parle aussi le français, l’allemand, le russe et le japonais. Il sert dans la Marine pendant la seconde guerre mondiale et en sort capitaine de frégate. Il entre alors au MI 6 (service de renseignement extérieur) et reçoit le matricule 007, avec l’autorisation de tuer. Ses films d’action sont toujours émaillés de gadgets, de science-fiction et de jolies filles !