Novices au début de 1918, les « Sammies » (soldats américains) ont fait l’apprentissage de la guerre « moderne » sur le front de Meuse-Argonne, au « prix du sang ».
A l’armistice, ils sont arrivés aux portes de Sedan, nœud ferroviaire permettant le repli de l’armée allemande qui se battait en Champagne et en Picardie. Du 26 septembre au 11 novembre 1918, l’armée américaine a perdu 117.000 hommes, dont 26.000 tués lors de l’opération « Meuse-Argonne ». Un compte-rendu allemand, daté du 28 octobre, leur rend indirectement hommage : « Un front purement américain a surgi du jour au lendemain ».
Les combats préparatoires. Six mois plus tôt, le 20 avril, un raid allemand sur le village de Seicheprey a entraîné la mort, la disparition ou la capture de 650 Sammies. Leur inefficacité au combat est alors exploitée par la propagande allemande. Les généraux alliés estiment alors indispensable de les incorporer dans les unités françaises et britanniques, ce que leur chef, le général John Pershing, refuse. Mais, le 28 mai, la Force expéditionnaire américaine prend d’assaut le village de Cantigny, à la stupeur de l’armée allemande. Pendant tout le mois de juin, elle montre sa ténacité et sa bravoure durant l’assaut du bois de Belleau. Les 12 et 13 septembre, elle réduit le saillant de Saint-Mihiel, y perd 11.000 soldats mais neutralise 7.500 Allemands et en capture 15.000. Le 26 septembre, devenue la 1ère Armée américaine, elle lance l’offensive « Meuse-Argonne » dans le cadre d’un mouvement en avant, généralisé de la mer du Nord à la Meuse. Or, l’espace entre Meuse et Argonne a été aménagé par l’armée allemande au cours des quatre années précédentes. Il est barré par quatre lignes de tranchées, plus ou moins continues, appuyées par de nombreux nids de mitrailleuses, parfois sous casemate, disséminés en fonction de la configuration du terrain. A l’occasion de cette offensive commune avec les Français et les Britanniques, Pershing veut confirmer l’excellence des troupes américaines et affirmer leur rôle. En 10 jours, il fait acheminer 40.000 t de munitions, 4.000 pièces de tous calibres et 400.000 hommes.
La bataille de Montfaucon. Dès 1914, les Allemands ont pris possession du village de Montfaucon situé sur une butte, position cruciale pour l’observation de la bataille de Verdun deux ans plus tard. Le 27 septembre 1918, après 6 heures de préparation d’artillerie, les Sammies gravissent la pente et forcent un passage à la grenade et au fusil et s’emparent de Montfaucon en moins de 48 heures. Le colonel George Patton, qui s’illustrera au Maroc, en France et en Allemagne de 1942 à 1945, commande la 7ème Brigade de tanks qui, trop légers, sont démolis par les artilleurs allemands postés sur la butte. Il rassemble les rescapés et part à l’assaut en « fantassin-pistoléro » avec un pistolet à crosse d’ivoire dans chaque main. Blessé, il recevra la « Distinguished Service Cross » américaine. Le bilan s’établit à la capture de 150 Allemands, 75 mitrailleuses et 11 grosses pièces d’artillerie. Sur les 4.000 Américains partis à l’assaut, plus de 150 ont été tués et plus de 750 blessés.
Le monument. (photo) Au sommet de la butte de Montfaucon et face à la ligne de front, la Commission américaine des monuments de guerre a érigé, en 1937, une colonne de 60 m de haut, surmontée d’une statue symbolisant la liberté, sur un terrain concédé à perpétuité aux Etats-Unis. Les noms des unités engagées dans les combats des hauteurs de la Meuse, de Barricourt et de Romagne et dans la forêt d’Argonne sont inscrits à la base du monument.
Loïc Salmon