Défense : face aux menaces, un modèle d’armée complet

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Les armées doivent protéger le territoire national, répondre à une crise dans le voisinage proche, conserver l’ascendant sur tout adversaire non étatique, réagir à une confrontation avec un Etat.

Ces missions, complémentaires de la dissuasion nucléaire avec ses composantes aérienne et océanique, ont été définies dans le document « Revue stratégique de défense et de sécurité nationale 2017 », rendu public le 13 octobre 2017 par le ministère des Armées pour préparer une nouvelle loi de programmation militaire.

Protection. Le territoire national sera mieux protégé par : la modernisation du réseau radar de surveillance maritime Spationav ; la couverture radar 3D de l’espace aérien ; la posture de protection terrestre avec capacité à opérer en milieu nucléaire, radiologique, biologique ou chimique. Les capacités de détection et de neutralisation des drones aériens ainsi que la protection des équipements et des personnels seront développées. Elles complèteront la modernisation des systèmes sol-air, des hélicoptères légers et des moyens navals, sous-marins et aéromaritimes.

Adaptation et coopérations. Sous très faible préavis, les armées doivent pouvoir intervenir simultanément sur des théâtres d’opérations dispersés. La durée variable des engagements nécessite une masse critique suffisante de forces disponibles (hommes, équipements et stocks). Cette capacité repose sur une base industrielle et technologique de défense, qui requiert la participation des armées à des tâches associées à l’exportation. Sur le plan opérationnel, les armées doivent : acquérir et conserver la supériorité au combat dans tous les milieux ; frapper dans la profondeur ; acheminer les moyens en urgence sur un théâtre durci et les protéger contre les menaces conventionnelles ; être mobiles au sein du théâtre ; fournir les appuis feu au contact de l’adversaire ; mener des opérations amphibies, aéroportées, en zone urbaine, montagne, désert ou jungle ; extraire du personnel en milieu hostile. Toutefois, agir de façon autonome dans n’importe quel contexte et détenir toutes les aptitudes au plus haut niveau de performance ou de masse ne semblent guère possibles aujourd’hui. Mais le renoncement, même temporaire, à une aptitude opérationnelle entraîne un risque de perte définitive de certaines compétences. Par ailleurs, faute de capacités suffisantes, la complexité de certaines missions nécessite des partenariats, une fois les conditions politiques réunies. En coalition, l’interopérabilité implique des normes communes, techniques pour les systèmes de commandement et équipements majeurs, mais aussi en matière de concepts, doctrines, tactiques et procédures. Parfois, la France doit pouvoir fournir des capacités discriminantes et un volume de forces significatif pour jouer le rôle de « nation cadre » pour des actions relevant d’aptitudes militaires à haute valeur ajoutée : planification ; génération de forces, commandement et contrôle d’une opération. Dans le cadre de l’OTAN, elle doit fournir les capacités nécessaires au commandement d’une petite opération commune (SJO en anglais) et d’une composante pour une grande opération commune (MJO). Elle participe à la définition des normes OTAN sur l’interopérabilité des matériels et le contrôle politique des nations sur les capacités communes essentielles.

Renseignement. Il s’agit d’investir dans tout le spectre : humain, électromagnétique, radar, optique et numérique. Les plates-formes, capteurs et modes de recueil seront diversifiés : aéronefs habités ; drones ; unités navales ; moyens spatiaux. Leur complémentarité doit permettre l’accès à des cibles liées à tout type de menaces. Pour accélérer les prises de décisions, une meilleure interconnexion entre les différents systèmes améliorera et intégrera des traitements automatisés d’exploitation et d’analyse, intelligence artificielle et « big data » compris. La vulnérabilité croissante des moyens de commandement et de surveillance nécessite de sécuriser les moyens spatiaux et la conduite des opérations en augmentant, notamment, le niveau de protection et de résilience des futurs satellites Syracuse 4. En outre, la capacité d’alerte avancée permettra de mieux identifier une menace balistique, en déterminant l’origine d’un tir et l’évaluation de la zone ciblée.

Systèmes de commandement. L’amélioration de l’homogénéité et de l’interopérabilité des systèmes facilitera l’engagement sur un théâtre avec les Etats membres de l’OTAN et des pays partenaires de circonstance. La boucle décisionnelle sera accélérée par le partage de l’information, tout en en gardant la maîtrise dans le risque cyber. Entrer en premier. Face aux systèmes défensifs de haute technologie et aux capacités adverses de déni d’accès dans les milieux physiques et immatériels, il s’agit de disposer de la capacité de passer outre et de réduire le niveau de la menace, en vue d’y conduire des opérations militaires. Au préalable, celles-ci exigent la supériorité aérienne pour conférer la liberté d’action nécessaire aux forces terrestres et navales. La frappe des centres de gravité ennemis dans la profondeur du théâtre nécessite de pouvoir opérer depuis le territoire national, à partir de bases aériennes projetées, d’emprises terrestres ou depuis la mer par le groupe aéronaval. L’allonge des systèmes d’armes augmentera avec la combinaison entre avions ravitailleurs et armements. La capacité de projection de puissance sera accrue par les missiles de croisière : navals ; aéroportés rénovés ; antinavires à développer avec la Grande-Bretagne. Les capacités des forces spéciales seront renforcées en termes de projection et de mobilité. Les opérations dans l’espace numérique jusqu’au niveau tactique, intégrées à la chaîne de planification et de conduite des opérations militaires, exploiteront la numérisation croissante des adversaires, étatiques ou non.

Combat terrestre futur. Le programme Scorpion de l’armée de Terre permettra d’augmenter la puissance et l’agilité des unités engagées. L’armement des drones aériens apportera une capacité de réaction adaptée à des adversaires plus fugaces et à des espaces étendus. Le successeur du char Leclerc et le futur système d’artillerie seront étudiés en coopération avec l’Allemagne.

Loïc Salmon

La France a souscrit des engagements contraignants dans le cadre du Traité sur l’Union européenne de 2009 (TUE) et du Traité de Washington de 1949. L’article 42.7 du TUE précise : « Au cas où un État membre serait l’objet d’une agression armée sur son territoire, les autres États membres lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir, conformément à l’article 51 de la charte des Nations Unies ». Le TUE rappelle que « les engagements et la coopération dans ce domaine demeurent conformes aux engagements souscrits au sein de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, qui reste, pour les États qui en sont membres, le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en œuvre ». Selon le Traité de Washington, la France doit « assister la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, telle action (jugée) nécessaire, y compris l’emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l’Atlantique Nord ».

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