Cent ans de conquête de l’air au Grand Palais de Paris

Réaliser l’harmonie entre l’homme, la machine et le vol, tel est l’enjeu du nouveau spectacle (9-14 avril 2016) de la société Amaclio, à l’occasion du centenaire des premiers combats aériens pendant la bataille de Verdun.

Lors de la présentation à la presse le 15 mars, les organisateurs ont rappelé que le premier salon de l’aéronautique s’est tenu au Grand Palais en 1909.

Tradition et innovation. Construit à partir de 1897 pour l’Exposition universelle de 1900, cet édifice, situé au bord de la Seine, accueille des manifestations artistiques et surtout des expositions dédiées à la modernité. Le « salon de la locomotion aérienne » s’y tiendra jusqu’en 1951, avant de changer de nom et de s’installer au Bourget. Le Grand Palais, avec son immense verrière armée de fer et d’acier, son style et son passé, semblait donc tout indiqué pour évoquer la conquête de l’air. Après ses reconstitutions historiques en son et lumière, « La Nuit aux Invalides », « Les Luminescences d’Avignon » et « Les Écuyers du Temps » (Saumur), Amaclio a voulu montrer que, depuis un siècle, « voler » fascine autant le grand public qu’il passionne les ingénieurs, compagnons, mécaniciens et pilotes. Retracer une telle épopée en un spectacle de 61 séquences en 56 minutes sur 360 degrés a nécessité de voir les choses en grand : 3 écrans de 26 m x 16 m ; 3.000 m2 de projection ; 23 vidéos projecteurs ; 5.000 heures de tournage et d’infographie ; 1 avion d’affaires Falcon ; 1 avion de combat Mirage III, conçu en 1950 ; 1 avion Rafale, en service dans l’armée de l’Air et la Marine françaises depuis 2001. Pour assurer deux séances par soirée pendant six jours, Amaclio mobilise 400 personnes, 80 techniciens et 60 camions pour enchanter jusqu’à 3.000 spectateurs à chaque fois.

Dassault franchit le siècle. Diplômé de l’École supérieure d’aéronautique et de construction mécanique en 1913, Marcel Bloch (devenu Dassault en 1949) est mobilisé en 1914 au laboratoire d’aéronautique de Chalais-Meudon. Il dessine, pour son compte, l’hélice « Éclair » l’année suivante, qui sera utilisée par l’aviation militaire française pendant la première guerre mondiale. En 1917, il crée, avec son associé Henry Potez, la Société d’études aéronautiques (SEA) destinée à concevoir et fabriquer des avions d’observation. Les essais n’étant guère satisfaisants, le premier avion, dénommé SEA 1, est abandonné. Ses concepteurs en concluent qu’il ne faut jamais assembler trop d’éléments nouveaux sur un seul prototype. Dorénavant, le futur groupe Dassault adoptera longtemps une politique technique des « petits pas » consistant à intégrer progressivement des innovations sur des éléments connus. Le SEA IV en apporte la preuve : il est commandé à 1.000 exemplaires par le ministre de l’Armement et des Fabrications de guerre dès fin 1917, mais seule une centaine sera livrée. Après une éclipse de dix ans, Marcel Bloch revient à l’aviation dans les années 1930. La saga Dassault reprendra après la deuxième guerre mondiale avec la famille d’avions de combat multirôles Mirage, qui équiperont les forces aériennes d’une vingtaine de pays. Dans les années 1960, le groupe Dassault se lance dans la fabrication d’avions civils pour une clientèle d’affaires, surtout étrangère. Le premier, « Mystère 20 », sera « américanisé » en « Falcon 20 ». Aujourd’hui, 75 % de la production des avions Falcon est exportée et 500 entreprises participent à la construction du Rafale. Le groupe Dassault est maître d’œuvre du programme européen de drone de combat « Neuron ».

Loïc Salmon

L’histoire des Invalides en 3 D

 




Révolution numérique : défis pour le monde industriel

Le domaine numérique englobe d’énormes puissances de calcul et de capacités de stockage de données ainsi que les connections de nombreux utilisateurs et équipements. Pour les exploiter au mieux, les grands groupes industriels concilient données, collectivité et mobilité.

Frédéric Sutter, directeur du programme Transformation numérique chez Airbus Group, l’a expliqué lors d’une conférence-débat organisée, le 21 janvier 2016, par le Forum du futur et l’association Minerve EMSST.

Contexte et perspectives. Le monde numérique est en mouvement rapide et permanent. Les industriels qui en maîtrisent les données seront plus à même d’anticiper les « ruptures » technologiques, qui peuvent venir de n’importe où. La « culture numérique », dynamique caractéristique des « start-up », supprime les frontières à l’imagination. Elle contribue à insuffler une dynamique industrielle, différente de ce qui a été réalisé jusqu’ici. Chez Airbus Group, le service de numérisation rend de nouveaux concepts visibles et en assume le coût. Une même technologie sera testée sur un grand nombre de données par beaucoup de gens, en même temps. Il s’ensuit une création de valeur ajoutée dans les avions et hélicoptères, avec de meilleurs confort, efficacité et qualité, où la  priorité opérationnelle est à cogérer avec les objectifs financiers. En matière numérique, Airbus Group se tient informé de ce qui se développe dans les autres secteurs industriels, car tout va très vite et avec une très grande agilité. Par exemple, le groupe informatique américain Google dispose d’importantes ressources financières (60 Mds$ !) qui le rendent très puissant. Son laboratoire de recherche met en concurrence des plates-formes informatiques sur une technologie de rupture pour une mise en application directe. Il mobilise ainsi dix fois plus de gens qui travaillent dix fois mieux et dix fois plus vite sur des projets innovants : autonomie de voitures et de drones avec différents capteurs ; reconnaissance d’images et cartographie ; avion à énergie solaire, volant à haute altitude et pouvant servir de satellite (projet « Titan Solara ») ; cybersécurité gratuite ; divertissement en vol et dans une voiture sans chauffeur ; connexion à internet à bord d’avions de ligne par des ballons stratosphériques (projet « Loon ») ; logiciels d’intelligence artificielle pour des machines. En échange de publicité sur internet, Google pourrait proposer des transports aériens gratuits, reconfigurant de fait l’aviation commerciale, prévient Frédéric Sutter.

Applications aéronautiques. Airbus Group recrute des « directeurs techniques de l’extrême », qui innovent dans le numérique sans se demander s’ils en ont le droit, quitte à en restreindre l’accès ensuite. Il participe notamment au projet « OneWeb » de mise en service de 720 petits satellites à 500 km d’altitude pour faciliter l’accès à internet dès 2019. Il utilise de nouveaux matériaux composites imprimés en 3 dimensions (3 D), dont toutes les pièces sont certifiées pour éviter la contrefaçon. L’impression en 3 D permet de nouvelles architectures de plates-formes (avions et hélicoptères) et entre dans la fabrication de nombreux équipements et la chaîne logistique ensuite. Grâce à elle, il est possible de faire réaliser, par les utilisateurs d’hélicoptères militaires anciens, des pièces détachées qui ne sont plus fabriquées. Les entreprises américaines et chinoises sont très actives dans l’impression en 3 D. De plus, le processus de fabrication ALM en 3 D s’applique à l’installation des cabines sur l’avion A350 et à la fabrication en série à partir de 2016. Il réalise en une seule pièce ce que les méthodes traditionnelles effectuaient en 30 pièces séparées. Il passe de la conception assistée par ordinateur à la pièce finie, en une seule opération. Le numérique permet aussi d’optimiser le poids des plates-formes pour emporter plus de carburant et augmenter ainsi leur rayon d’action. Les gros volumes de données (« mégadonnées » ou « Big Data ») individuelles d’une plateforme (conception, fabrication, exploitation et maintenance), auparavant sous-exploitées par manque de moyens techniques, sont  mis en réseau par les constructeurs aéronautiques civils, y compris ceux des nouveau pays entrants (Russie, Chine, Japon et Canada). Aucun ne souhaite laisser la main à ses fournisseurs. Airbus Group veut être capable d’une démarche interne au niveau européen dans l’aéronautique, le spatial et l’internet des objets. Enfin, l’intelligence artificielle consiste à « éduquer » des systèmes à discerner des tendances, selon la manière dont est décrit un incident technique, afin de reconnaître ses séquences de manière autonome. Il s’agit d’exploiter ces traitements de l’incident et de les connecter à des éléments, qui ne pourraient l’être par des algorithmes.

Mutation culturelle. Dans la Silicon Valley (Californie), les chercheurs de l’industrie de pointe communiquent entre eux, ne pensent pas à la propriété intellectuelle et font appel aux compétences dans le monde entier, en vue de participer à des projets. Airbus Group y envoie des cadres pendant plusieurs années. Il souhaite en effet modifier sa culture industrielle pour se positionner sur les nouveaux marchés et repenser la façon de travailler ensemble. Pour attirer les fonds sur un projet industriel, les meilleurs ingénieurs sont intégrés à des équipes pluridisciplinaires, qui incluent également des sociologues, des géographes et des mathématiciens. Grâce au réseau social interne, les équipages d’avions et les milliers d’employés d’Airbus Group ont décrit leur expérience, leurs centres d’intérêts et leur savoir-faire. Le ciblage des compétences permet de déboucher sur un appel à projet, susceptible d’être financé à hauteur de 100 M€.  Au sein du groupe, l’accent est mis sur le développement de la culture numérique parmi le personnel. Des plans d’accompagnement sont entrepris, même au niveau des dirigeants qui sont formés au maniement et aux possibilités des nouveaux outils informatiques… par des gens de moins de  30 ans ! Au bas de la pyramide, des questionnaires en quatre langues et des cycles de vidéos, de 30 à 90 secondes sont diffusés pour proposer des « formations métiers », appuyées sur le numérique. Enfin, outre des audits réguliers, la sécurité interne est confiée à une équipe dédiée, sans pour autant freiner l’agilité intellectuelle. Les projets nationaux sont protégés par des systèmes appropriés.

Loïc Salmon

Cyber : au cœur des enjeux de défense et de sécurité

Sécurité : la contrefaçon et ses conséquences économiques, sanitaires et criminelles

Le groupe européen Airbus SE (Airbus Group) a été créé en 2000 par la France, l’Espagne et les groupes Lagardère SCA et Daimler AG sous le nom d’European Aeronautic Defence and Space company (EADS), devenu Airbus Group en 2014. Il est actif dans les  secteurs aéronautique et spatial, civil  et militaire. Avec plus de 144.000 salariés, Airbus Group a réalisé un chiffre d’affaires de 60,7 Mds€ en 2014. La majorité de son capital est coté en bourse depuis 2013. Parmi ses actionnaires, figurent les États français (11 %), allemand (10,90 %) et espagnol (4,10 %) ainsi que la Qatar Investment Authority (6 %) et la société multinationale de gestion d’actifs BlackRock (4,20 %), dont le siège est à New York.




Armée de l’Air : l’École de Salon-de-Provence à fond dans le numérique et l’ouverture

L’École de l’air (EA), située sur la Base aérienne 701 de Salon-de-Provence et désormais unique centre de formation des officiers, mise sur le cyber et l’accès aux sciences politiques et humaines.

Le général de brigade aérienne Francis Pollet, qui commande les deux, a présenté l’école à la presse, le 18 février 2016 à Paris. L’EA délivre un diplôme d’ingénieur accrédité « CTI », catégorie la plus élevée, qui permet de nombreux partenariats.

L’ouverture. Depuis la rentrée du 24 août 2015, les formations initiales d’officiers, jusque-là dispensées par l’École de l’air, l’École militaire de l’air, le Cours spécial de l’École de l’air et le Cours spécial de formation des officiers, sont désormais regroupées au sein d’une seule et unique école reprenant l’appellation originelle : École de l’air. Le cursus de l’EA débouche notamment sur : 4 licences avec l’Université d’Aix-Marseille, à savoir aéronefs d’État, domaine aérien, management public et systèmes informatiques et logiciels ; 3 mastères spécialisés en commun avec l’École supérieure de l’aéronautique et de l’espace et l’École nationale de l’aviation civile (ENAC) ; un mastère « diplôme d’ingénieur, diplôme d’études politiques » avec Sciences-Po Aix, dont 10 % des élèves officiers suivent les cours. Des réflexions sont en cours pour intégrer de nouvelles technologies : gestion de la chaîne logistique ; prototypage rapide ; matériaux d’avenir ; réalité virtuelle ; maintenance du futur ; documentation technique dynamique ; drones ; méga données (big data en anglais) ; optoélectronique ; cyber pour les liaisons interarmées et la liaison sol avec le renseignement aérien. Déjà 70 % des cours sont numérisés, permettant l’enseignement à distance et une économie d’impression de 2 millions de feuilles. La formation est assurée par 60 professeurs, à temps plein, et plus de 200 vacataires, issus de l’enseignement supérieur, de l’industrie et de la recherche. L’EA vise à valoriser l’officier aviateur par une formation tournée vers la responsabilisation et l’engagement. Ainsi, des élèves officiers accompagnent 200 jeunes dans le cadre de tutorats : plan égalité des chances ; aéronautique ; formation militaire élémentaire ; projets de développement personnel, comme le baptême de l’air handicap et le « coaching » (accompagnement personnalisé) sportif. En outre, ils assurent des formations de « construction d’équipe » (team building en anglais) au profit d’écoles de commerce. Enfin, l’EA envoie 70 % de ses élèves en stage dans une trentaine de pays. Un cours spécial est ouvert à certains élèves officiers étrangers.

L’EA en chiffres.

Chaque année, le concours d’entrée à l’EA attire 3.000 candidats pour 93 places, dont 18 pour les filles. Son campus de Salon-de-Provence se trouve à 3 h 30 de Toulouse (siège administratif de l’ENAC) et à 25 minutes de Sciences-Po Aix et de l’Université d’Aix-Marseille. Véritable petite ville de 1.900 personnes s’étendant sur 450 ha, la Base aérienne 701 comprend : 600 élèves, dont 500 aviateurs ; 50 aéronefs ; 62.000 mouvements aériens par an ; 650 logements. Pour la région, l’EA et la base représentent une retombée économique de 55 M€ par an. Elles dispensent 10.000 heures de vol chaque année. Le personnel navigant peut suivre plusieurs formations : vol à voile en vue du brevet de pilote de planeur ; vol moteur sur avion de tourisme Cirrus SR20 et simulateur ; initiation à la voltige aérienne sur avion biplace Grob 120. Le personnel non navigant peut aussi s’initier au vol à voile et au vol moteur sur Cirrus SR20

Loïc Salmon

Armée de l’Air : le combat numérique au cœur des opérations

Armée de l’Air : création d’un « centre de guerre aérienne »




Industrie de défense : exportations, partenariats et concurrence en hausse

La France a augmenté ses exportations d’équipements militaires en 2015, en raison de la contrainte budgétaire nationale et des opportunités sur les marchés extérieurs. Face à la concurrence ancienne et nouvelle, les groupes industriels se réorganisent selon des critères techniques, économiques et stratégiques.

Ces questions ont été abordées lors d’un colloque organisé, le 16 décembre 2015 à Paris, par le ministère de la Défense, l’université Panthéon-Sorbonne et le Fonds de dotation de l’Institut des hautes études de la défense nationale (IHEDN). Y sont notamment intervenus :  Jean Belin, Fonds de dotation de l’IHEDN ; Étienne de Durand, Direction générale des relations internationales et de la stratégie du ministère de la Défense ; Bruno Cotté, Groupe Safran ; Dominique Moïsi, Institut français des relations internationales.

Facteurs économiques. Avec un montant supérieur à 8 Md€, l’exercice 2014 bat le record des prises de commandes depuis 5 ans et 2015 s’annonce encore meilleur, estime Jean Belin. Les exportations de matériels militaires atteignent 1 % du total des ventes françaises à l’étranger. Les entreprises de défense, qui représentent 23 % des entreprises exportatrices, emploient 165.000 personnes. Elles constituent 11 % des entreprises effectuant de la recherche et du développement (R & D) et prennent en charge 22 % des dépenses dans ces domaines. Ce secteur très technologique entraîne d’importantes retombées sur l’économie nationale : emplois qualifiés de chercheurs et d’ingénieurs  pour la R & D ; performance des entreprises en termes de valeur ajoutée et d’exportations. L’industrie de défense doit supporter des charges en personnel et des créances commerciales plus lourdes et gérer des stocks plus considérables que les entreprises civiles. Activité risquée, ses garanties diminuent, car banques et marchés financiers s’y impliquent peu. Afin de renforcer sa politique industrielle, l’État assure le pilotage de la demande nationale et des exportations ainsi qu’une présence dans le capital des grandes entreprises constituant la base industrielle et technologique de défense du pays. Il finance la R & D aux différents stades de la recherche en raison de : la concurrence internationale accrue ; la nécessaire adaptation aux besoins des différents acheteurs ; la longueur des programmes et la nécessité de maintenir l’innovation dans la durée. La Délégation générale de l’armement coordonne les différents acteurs. Toutefois, souligne Jean Belin, la forte contrainte budgétaire entraîne une baisse de la demande nationale et un déclin de l’effort de R & D défense par les pouvoirs publics sous forme de financements directs.

Partenariats stratégiques. Selon le ministère des Affaires étrangères, la France compte 22 partenaires stratégiques mais seulement 14 pour bien comprendre le monde, indique Étienne de Durand. Cela va des pays alliés, par des traités contraignants, à ceux géographiquement importants pour les zones d’opérations, en passant par les partenaires industriels de défense et les clients réguliers depuis de nombreuses années. Des accords multilatéraux régissent l’OCCAR (Organisme conjoint de coopération en matière d’armement) et l’Agence européenne de défense. La France est le  4ème fournisseur de l’OTAN pour les matériels de commandement et de soutien, après les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Allemagne. La coopération en matière de défense se constitue entre 2 ou 3 pays, rarement 4 comme pour l’EATC (Commandement européen de transport aérien), qui regroupe des moyens allemands, belges, néerlandais et français. Sur le plan bilatéral, la coopération avec les États-Unis atteint un haut niveau pour l’armement et les opérations  dans la bande sahélo-saharienne et au Levant. Avec la Grande-Bretagne, les accords de Lancaster House concernent notamment la mise sur pied de la « Combined Joint Expeditionary Force » (Force expéditionnaire commune) en 2016. Les deux pays coopèrent au sein de l’OTAN en matière d’avions de combat, de missiles et de guerre des mines. Avec l’Allemagne, le partenariat industriel, lancé avec l’hélicoptère Tigre et les missiles antichar Milan et antiaérien Roland, se poursuit avec les satellites d’observation et un projet de drone MALE avec l’Italie. Les équipementiers terrestres Nexter (France) et KMW (Allemagne) ont finalisé une alliance sous l’égide d’une société holding le 15 décembre 2015. La Pologne, qui pourrait acquérir des hélicoptères Caracal, apporte une  coopération opérationnelle en Afrique. Au Moyen-Orient, des relations politiques et de confiance se sont instaurées avec : l’Arabie saoudite, seul pays producteur de pétrole capable d’augmenter ou de réduire sa production avec un impact économique certain ; les Émirats arabes unis, clients et partenaires stratégiques (base française interarmées à Abou Dhabi) ; l’Égypte, client de première importance pour l’achat d’avions Rafale et de bâtiments de surface et la connaissance des Proche et Moyen-Orient. Enfin, la coopération de défense se renforce ave Singapour.

Concurrence accrue. Les contrats français d’armement avec les pays émergents sont passés de la maintenance dans les années 1970 à la sous-traitance (1980), la « co-traitance » (1990) et la coopération (2000). Capables de réaliser des produits finis à partir de 2010, ces pays entendent atteindre la maîtrise d’œuvre en 2030, avertit Bruno Cotté. Chaque année, 700.000 ingénieurs obtiennent leur diplôme en Chine, contre 30.000 en France. L’embargo français (1968) à son encontre a incité Israël à développer son industrie aéronautique militaire, aujourd’hui performante. Celui de l’ONU (1977) sur les ventes d’armes à l’Afrique du Sud en raison de sa politique de ségrégation raciale (« apartheid ») a contraint ce pays à se doter d’une industrie de défense nationale. En vue de consolider leur croissance économique et de conserver leur première place technologique sur le plan international, les États-Unis ont répertorié six secteurs considérés comme stratégiques : aéronautique et transport ; informatique et communication, dont les capteurs et le traitement du signal et le stockage de données ; matériaux électroniques, céramiques et alliages spéciaux ; production, dont micro et nano fabrications ; biotechnologie et sciences de la vie ; énergie et environnement. Le renseignement économique joue un rôle central, conclut Bruno Cotté.

Loic Salmon

Armement : succès du soutien public à l’exportation en 2014

DGA : l’expertise technologique, avenir de l’outil de défense

DCNS : concevoir, développer, construire, équiper, vendre et entretenir un navire de guerre

Selon Dominique Moïsi, le monde connaît des crises, de plus en plus nombreuses et complexes, depuis que les États-Unis ne jouent plus leur rôle de gendarmes du monde. La Russie, qui aspire à redevenir l’URSS, apparaît comme complémentaire dans le jeu des solutions internationales. Dans un monde plus interdépendant, où aucun pays n’est à l’abri du terrorisme, l’Union européenne se manifeste par son pouvoir de convaincre et non de contraindre. La clarté de sa politique dépend de la coopération de trois acteurs : la Grande-Bretagne, l’Allemagne et la France. Celle-ci, aux dires d’un éditorialiste britannique, a remplacé la première comme « shérif adjoint » des États-Unis dans les affaires du monde




DCNS : concevoir, développer, construire, équiper, vendre et entretenir un navire de guerre

Fort de son expérience de constructeur naval, de bout en bout, de tous types de navire de surface et de sous-marin, à propulsion nucléaire ou classique, le groupe DCNS compte faire passer son chiffre d’affaires à l’export de 35 % en 2014 à 50 % à terme.

Son président-directeur général, Hervé Guillou, et ses principaux collaborateurs l’ont expliqué au cours d’une rencontre avec l’Association des journalistes de défense, le 15 décembre 2015 à Paris.

Enjeux nationaux. « Pays en guerre », la France a pu déployer en quelques jours un porte-avions, un bâtiment de projection et de commandement (BPC), des frégates et un sous-marin nucléaire d’attaque (SNA), souligne Hervé Guillou. DCNS, dit-il, reste totalement disponible pour soutenir la Marine nationale dans cet effort. Parallèlement et depuis 2012, le groupe prépare le grand carénage du porte-avions Charles-De-Gaulle, prévu début 2017 et consistant en 15 mois de travaux et 3 mois d’essais à la mer.  Environ 2.500 personnes vont moderniser le système de combat, changer les capteurs et recharger les 2 chaufferies nucléaires pour la 2ème fois. Le bâtiment passant au « tout Rafale », les catapultes et le pont d’envol seront refondus et les ateliers d’entretien des avions reconfigurés. En outre, le site DCNS Cherbourg a commencé la construction des grands modules embarqués du Suffren, premier SNA du programme « Barracuda », à savoir l’appareil de propulsion et le système d’armes. Conformément à la Loi de programmation 2014-2019 en matière de dissuasion, les études de faisabilité du sous-marin nucléaire lanceur d’engins de la 3ème génération ont débuté, en vue d’une réalisation vers 2030. En outre, pour jouer son rôle de maître d’œuvre, DCNS entreprend un vaste programme de cybersécurité de haut niveau pour protéger les navires, vulnérables à quai et au combat, et évaluer les produits achetés. A titre indicatif, une frégate multimissions FREMM (6.000 t de déplacement) embarque 200 systèmes informatiques. Déjà une frégate de taille intermédiaire (FTI) de 4.000 t est à l’étude pour une livraison de 5 unités à la Marine nationale à partir de 2023. Plus polyvalente que la FREMM, elle sera modulable en fonction des  besoins des autres Marines clientes : vitesse, armement et emport de personnels. Il s’agit de tenir compte de leur niveau d’adaptation et des contraintes du marché. Ainsi pour l’action de l’État en mer, les Marines « matures » à vocation régionale ou mondiale préfèrent des navires aux équipements derniers modèles et servis par des équipages réduits. Les autres se contentent de bâtiments plus rustiques, mais avec un équipage plus nombreux. Quelque 40 pays pourraient se porter acquéreurs de la FTI, dont le Canada, le Chili, la Colombie, le Qatar et l’Arabie Saoudite.

Développement à l’international. Il ne s’agit plus seulement d’exporter mais aussi de s’implanter durablement à proximité de la Marine cliente, afin de créer un tissu économique viable pour DCNS et les marchés locaux. Ainsi avec la Malaisie, un contrat majeur porte sur un transfert de technologie, la formation d’équipages et la construction de 6 corvettes « Gowind » (2.400 t). La première sera livrée en 2017, sous la maîtrise d’œuvre de Boustead Naval Shipyard, partenaire de DCNS. Ce dernier assure aussi le maintien en condition opérationnelle de 2 sous-marins « Scorpène » à propulsion diesel-élecrique, par le biais de BDNC, sa filiale à 40 % en partenariat avec Boustead. De même au Brésil, DCNS et son partenaire Odebrecht ont lancé le programme de conception et de construction de 4 « Scorpène », en France et localement. DCNS apporte aussi son assistance à la réalisation de la partie non nucléaire du premier SNA brésilien ainsi qu’à la construction d’un chantier pour sous-marins et d’une base navale à Itaquai. A Saint-Mandrier-sur-Mer (Sud de la France), la nouvelle plate-forme d’intégration des systèmes de combat permet aux équipes de DCNS et de la Marine brésilienne de suivre les phases de tests et de formation des systèmes de traitement d’information. Avec l’Inde, le transfert de technologie au chantier Mazagon Dock Limited porte sur la réalisation d’une série de 6 « Scorpène », équipés du système de combat de DCNS. Les équipages suivent deux sessions de formation : l’une en Inde sur les systèmes de conduite ; l’autre aux sites de DCNS au Mourillon et à Ruelle sur le système de combat et les tubes lance-torpilles. L’Arabie Saoudite a choisi DCNS, associé à Thales (équipements) et MBDA (missiles), pour rénover 4 frégates et 2 pétroliers-ravitailleurs. Ce programme s’ajoute à celui de maintenance de 3 frégates et celui de fourniture de pièces de rechange et d’assistance technique. En 2014, DCNS a ouvert sur son site de Toulon une plate-forme dédiée à leur gestion avec 70 personnes, qui interviennent en appui des équipes de la filiale locale du groupe. Avec l’Égypte, DCNS a conclu, en juin 2014, un contrat portant sur la fourniture de 4 corvettes « Gowind » avec une option pour 2 unités supplémentaires. La première sera réalisée en France, pour une livraison en 2017, et les 3 autres seront construites à Alexandrie grâce à un transfert de technologie. En 2015, l’Égypte a commandé en février et pris livraison en juin de la FREMM Tahya-Misr. La même année, elle a aussi acquis les 2 BPC destinés à l’origine à la Russie et dont DCNS attend encore le remboursement du manque à gagner, consécutif à l’annulation de ce contrat et estimé à 200 M€. Les équipages égyptiens des BPC recevront, à Saint-Nazaire en 2016, une formation de 4 mois : 2 mois de théorie, 1 mois à quai et 1 mois en mer. La FREMM et les BPC bénéficient d’un contrat de 5 ans de maintien en condition opérationnelle. En Australie, DCNS a ouvert une filiale pour instaurer un partenariat pour les 50 ans à venir et a déjà présenté un projet de sous-marin à propulsion diesel-électrique dérivé du SNA de la classe « Barracuda ». Par ailleurs, DCNS a créé une nouvelle direction internationale et du marketing pour les futurs sous-marins, successeurs des « Scorpène », et les  navires de surface, postérieurs aux « Gowind », à réaliser selon une nouvelle conception et avec une propulsion électrique.

Loïc Salmon

DCNS : défense aérienne pour sous-marins et FREMM-ER

Le sous-marin nucléaire d’attaque : aller loin et durer

Ancien élève de l’École polytechnique, de l’École nationale supérieure des techniques avancées, de l’Institut national des sciences et techniques nucléaires et de l’Institut européen d’administration des affaires (INSEAD), Hervé Guillou entre à  la Direction des constructions navales en 1978. Il y devient notamment responsable du projet de sous-marin nucléaire Triomphant et de la section nucléaire (1981-1989), puis directeur du programme international tripartite (Grande-Bretagne, Italie et France) des frégates antiaériennes Horizon (1993-1996). Il exerce les fonctions de directeur général chez : EADS Space Transportation pour le lanceur Ariane, les missiles balistiques M51 et les infrastructures orbitales (2003-2004) ; EADS/Cassidian pour les systèmes de défense et de communications (2005-2010) ; Cassidian Cyber Security (France, Allemagne et Grande-Bretagne) pour la cybersécurité. Enfin, il est nommé président-directeur général de DCNS en août 2014. Ce groupe, qui emploie 13.000 personnes dans le monde, a réalisé un chiffre d’affaires de 3, 07 Md€ en 2014.




« DGA Innovation » : rendre les projets possibles et rentables sur le long terme

La Direction générale de l’armement (DGA) consolide les liens entre le ministère de la Défense, les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises de taille intermédiaire (ETI), notamment par un soutien renforcé à l’innovation pour faire face aux menaces.  Elle organise chaque année un « Forum DGA Innovation », dont la 4ème édition s’est déroulée à l’École Polytechnique, le 26 novembre 2015 à Palaiseau, en présence de Laurent Collet-Billon, délégué général pour l’armement (photo). Ce forum a présenté plus de 100 projets, dont 20 démonstrations dans les communications, les matériaux performants et la santé. Il a accueilli quelque 850 acteurs : dirigeants de PME, représentants des grands maîtres d’œuvre industriels, responsables de laboratoires, chercheurs et doctorants… dont trois ont reçu un prix de 5.000 € !

Financement de thèses. Depuis 2000, la DGA distingue chaque année plusieurs jeunes docteurs ayant bénéficié d’une allocation de thèse financée par le ministère de la Défense. La sélection s’effectue en fonction de l’intérêt des recherches, leur degré d’innovation, la qualité des résultats et l’impact des travaux sur l’insertion professionnelle du docteur. En matière de recherche fondamentale, la DGA finance ou co-finance environ 150 nouvelles thèses de doctorat par an, dont certaines en co-tutelle avec des établissements britanniques, ainsi que des recherches post-doctorales à l’étranger. Ces thèses portent, entre autres, sur l’informatique, l’optique, l’économie, la sociologie ou les sciences politiques. La DGA apporte un soutien aux organismes de recherches sous sa tutelle, comme l’ONERA (Office national d’études et de recherches aérospatiales) ou l’Institut franco-allemand de Saint-Louis. Ce soutien recouvre des contrats d’études amont vers le CNES (Centre national d’études spatiales) et le CEA (Commissariat à l’énergie atomique) ainsi que les subventions de projets de recherches d’entreprises et de laboratoires.

Recherche et technologie. En investissant dans la recherche et la technologie, la DGA vise à : imaginer les futurs possibles ; anticiper menaces et risques ; préparer les capacités industrielles, en détectant les ruptures technologiques ; les faire émerger dans un contexte à applications civiles et militaires. En outre, elle soutient et développe les compétences industrielles clés, notamment celles des PME, pour conserver une longueur d’avance et sécuriser les performances, coûts et délais des projets. Le ministère de la Défense se fournit auprès de 26.000 PME et ETI pour un montant de 2,6 Md€ en 2014, dont 40 % par des achats hors armement. Un budget moyen annuel de 730 M€ est programmé pour des études amont entre 2014 et 2019. Quelque 2.000 PME bénéficient d’un suivi particulier, dont 400 exercent des activités dites « sensibles » ou de souveraineté nationale. Afin de soutenir la croissance des PME, le ministère de la Défense a signé des conventions bilatérales avec sept maîtres d’œuvre industriels : Airbus Group, Safran, Thales, MBDA, Nexter, DCNS et Dassault Aviation. En 2014, l’industrie de défense française a réalisé 8,2Md€ de prises de commandes à l’export. Selon une étude d’impact réalisée en 2014, cela concerne 40.000 emplois, toutes catégories confondues, dans les régions, surtout l’Ile-de-France, l’Aquitaine, Midi-Pyrénées, Provence-Alpes-Côte d’Azur, la Bretagne, Rhône-Alpes et Centre. Les grands maîtres d’œuvre industriels y emploient environ 14.000 personnes directement et quelque 13.000 indirectement chez leurs sous-traitants.

Loïc Salmon

DGA : l’expertise technologique, avenir de l’outil de défense

DGA : bilan 2014 conforme à la loi de programmation




Cyber : le combat numérique, nouvelle dimension militaire

Les forces militaires tentent de définir leur place au sein de la confrontation numérique aux conséquences mondiales et dont les prémices ont déjà commencé.

Cet aspect a été abordé au cours d’un colloque international organisé, le 24 septembre 2015 à Paris, par le ministère de la Défense et diverses entreprises de cyberdéfense. Y sont notamment intervenus : Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense ; le général de corps d’armée Didier Castres, sous-chef opérations de l’État-major des armées ; le vice-amiral Arnaud Coustillière, officier général cyberdéfense ; un lieutenant-colonel (Air) cyber ; un délégué du Centre d’analyse en lutte informatique défensive  (CALID) ; un ingénieur d’Airbus Defence & Space.

Les menaces persistantes avancées. Les logiciels de renseignement russes et américains sont capables de filtrer les courriels, de rechercher les mots clés et de les exfiltrer. Leurs logiciels malveillants passent outre aux antivirus et mettent en place leurs propres systèmes de protection. Par ailleurs, selon un colonel spécialisé cyber, de véritables organisations militaires, liées à des groupuscules ou des mouvements terroristes (Daech) et équipées de moyens spécifiques, partagent leurs compétences. Avec les virus les plus simples, elles cherchent un effet destructeur dans le temps sur une cible, dont elles recherchent les failles. Donc, les forces engagées sur un théâtre doivent être opérationnelles avant l’action du virus et trouver, par le renseignement, le virus que personne ne connaît encore, afin de garder l’initiative sur l’adversaire. Ce dernier va tenter de l’implanter le plus rapidement possible et le garder caché longtemps. Les exercices permettent d’identifier les comportements anormaux des systèmes d’information et de réagir vite. Pour Airbus Defence & Space, il faut pouvoir détecter les logiciels malveillants en évitant un impact sur les systèmes eux-mêmes. Cela consiste à présenter la menace informatique à tout le personnel militaire et à l’accompagner dans sa démarche. Les systèmes d’information, évolutifs, peuvent détecter les nouvelles menaces. Compte tenu de l’expansion des capacités d’attaque, ces systèmes sont sécurisés dès les phases de conception et de production. Ainsi, la sécurisation des systèmes embarqués d’un hélicoptère et de ceux qui restent au sol évolue pendant tout le cycle de vie de l’aéronef. Selon le CALID, de grands exercices internationaux évaluent l’interopérabilité des systèmes et la capacité des participants à réagir. En 2014, « Cyber Endeavor » a mobilisé 2.500 personnels de 40 pays et a permis de tirer des enseignements. En opérations, le déploiement rapide des forces exerce un impact mesurable sur la sécurité de leurs systèmes. Or, des cyberattaques, non prévues dans l’exercice, se sont produites dès le premier jour. La  « défense collaborative » nécessite de partager les méthodes, chose difficile car les moyens militaires présentent des caractéristiques différentes. Il faut aussi connaître l’évolution de la menace dans le monde civil et établir une classification des degrés de confiance entre les différents partenaires. La recherche et le développement portent sur les « logiciels pièges », qui attirent l’attaquant pour qu’il dévoile ses méthodes sans qu’il se sache découvert.

Les capacités nationales. La loi de programmation militaire 2014-2019 et son actualisation consacrent plus de 1 Md€ à la cyberdéfense, afin de recruter 1.000 agents pour les états-majors, la Direction générale de l’armement et les services de renseignement, rappelle Jean-Yves Le Drian. De son côté, l’amiral Coustillière avait présenté l’état de la cyberdéfense militaire à la Commission de la défense et des forces armées de l’Assemblée nationale le 12 juin 2015. Le ministère de la Défense compte actuellement 1.600 personnels, dont 1.200 relèvent de l’État-major des armées, à savoir 300 personnels en charge des équipements de chiffrement et 900 du seul périmètre cyber. Parmi ces derniers, environ 60 s’occupent de l’expertise et de l’audit, 70 de la lutte informatique défensive et tous les autres de la prévention, de l’exploitation ou de l’architecture des systèmes. La protection des réseaux est bien perçue et le mode de renforcement rapide de leur sécurité est maîtrisé. En revanche, la sécurisation des systèmes d’armes et des automates embarqués dans les systèmes automatisés est moins connue. A titre indicatif, une frégate multimissions (FREMM) rassemble 2.400 systèmes d’information ! En cas de cyberattaques, les armées disposent de 200 ingénieurs de très haut niveau, capables d’intervenir en premier. Seuls l’État et quelques grandes entreprises sont capables de posséder et de mobiliser rapidement cette compétence rare. Au deuxième niveau de l’intervention, le vivier redéployable se monte à près de 800 personnes. En matière de contre-espionnage informatique, les pays anglo-saxons ont choisi de confier l’ensemble de leur cyberdéfense à leurs services de renseignement (SR). En France, les tâches sont bien séparées, souligne l’amiral. Les SR caractérisent le contenu de l’espionnage, c’est-à-dire les intentions et les objectifs. L’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information et la cyberdéfense militaire s’intéressent au contenant, à savoir les « métadonnées » (données servant à définir d’autres données). Lors du colloque du 24 septembre 2015, l’amiral a rappelé la création d’un centre de commandement cyber pour les opérations défensives et offensives, dont il a pris la tête en 2011. Ce centre apporte l’expertise technique à la préparation d’une opération militaire, reposant sur les travaux d’anticipation d’une crise à deux ans et la procédure OTAN : J5 (politique et planification), J3 (opérations) et J6 (systèmes d’information et de communications).

Le cyber en coalition. Les « cyber commandeurs » français, américain, britannique, estonien, néerlandais, espagnol et portugais ont présenté leur expérience de cyberdéfense dans une opération militaire en coalition (photo). Ainsi, selon l’amiral Coustillière, sa préparation cyber par étapes prend en compte : le renseignement et la surveillance : les réseaux grand public ; les réseaux nationaux et systèmes d’armes ; ceux de l’Union européenne et de l’OTAN ; ceux d’une coalition ad hoc, instituée spécialement pour répondre à un besoin ; ceux de l’adversaire. La cyberdéfense, conclut-il, est un club comparable à celui des forces spéciales.

Loïc Salmon

Cyber : au cœur des enjeux de défense et de sécurité

Cyberdéfense : bientôt une 4ème armée après celles de Terre et de l’Air et la Marine

Piraterie : encore présente sur mer et en expansion dans le cyberespace

Les influences géopolitiques, la nature des crises et les menaces des adversaires transforment le champ de bataille, estime le général Castres. Elles contractent le temps et étendent les zones « grises » (espaces de dérégulation sociale). Les moyens militaires agissent là où les tensions sont les plus fortes dans les zones de crise, dont la solution dépend des populations concernées. La seule force militaire ne suffit pas pour combattre les idées. Ainsi, Daech, présent sur 2.370 sites internet francophones, reçoit l’appui de 3 millions de « followers » (partisans ou disciples). Par ailleurs, malgré leur supériorité technologique en matière de maîtrise, contrôle, communications, informatique et renseignement (C4I en anglais), les forces armées doivent en permanence garantir la sécurité de leurs systèmes d’armes et de commandement contre le brouillage ou les interférences.

 




Marine nationale : le porte-avions et la mer dans les relations internationales

En raison du libre usage de la haute mer, le groupe aéronaval constitue un outil stratégique pour la France, grâce à son autonomie et sa capacité de résilience. Il agit dans une manœuvre globale intégrant la dissuasion nucléaire, le dialogue avec les grands pays alliés et la participation à la résolution des crises.

Ce thème a fait l’objet d’une conférence organisée, le 23 septembre 2015 à Paris, par le Centre d’enseignement stratégique de la marine (CESM) au profit du magistère « Relations internationales et Actions à l’étranger » de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Y sont notamment intervenus : le contre-amiral Éric Chaperon, commandant de l’état-major embarqué de la Force d’action navale ; le capitaine de frégate (R) Martin Motte, professeur des universités ; Thibault Leroy, professeur agrégé d’histoire.

Le porte-avions en opérations. D’ici à 2020, indique l’amiral Chaperon, 29 porte-avions seront en service dans le monde, dont 14 à catapulte et 15 avec un tremplin pour avions à décollage court. Toutefois, les porte-avions à catapulte donne une allonge très supérieure à l’aviation embarquée, donc une plus grande capacité d’action dans la profondeur. Seules les Marines américaine et française en sont dotées. La répartition de ces « capital ships » (voir encadré) devrait s’établir ainsi : États-Unis, 13 contre 10 en 2015 ; France, 1 (1) ; Brésil, 2 (1) ; Italie, 2 (2) ; Espagne 1 (1 sous cocon) ; Inde, 3 (2) ; Chine, 3 (1) ; Grande-Bretagne, 2 (0) ; Russie, 1(1) ; Thaïlande, 1 (1). Grâce à la similitude de leurs porte-avions, les États-Unis et la France ont, pour la première fois, intégré leurs groupes aéronavals dans le golfe Arabo-Persique, lors de l’opération « Arromanches 2015 » (janvier-mai 2015). Celle-ci entrait dans le cadre de l’engagement d’une coalition internationale contre Daech en Irak, à savoir les reconnaissances et bombardements aériens des opérations « Chamal » (dénomination de la participation française) et  « Inherent Resolve » (appellation générale). Le groupe aéronaval français, centré sur le porte-avions Charles-De-Gaulle, a pu contribuer aux capacités rares : reconnaissance, commandement et contrôle des opérations, où 30 % des vols ont été réalisés depuis la mer. Il a engagé jusqu’à 15 avions en même temps avec 65 heures de vol par jour, pour des missions de 6 heures à l’intérieur du territoire irakien. Les règles d’engagement (ouverture du feu) et les zones d’action sont déterminées en commun, en tenant compte des incompatibilités de certaines missions avec le cadre défini par les autorités politico-militaires. La coordination impose des couloirs aériens séparés et des altitudes différentes pour des appareils évoluant  jusqu’à 100 km de leur porte-avions base. La France a dû obtenir l’autorisation préalable des Émirats arabes unis pour faire décoller ses avions (armée de l’Air) de la base d’Abu Dhabi, alors que le Charles-De-Gaulle a été déployé en toute souveraineté. De leur côté et dès le début de l’opération « Inherent Resolve » (août 2014), les États-Unis ont projeté un groupe aéronaval dans le golfe Arabo-Persique. En outre, pendant « Arromanches 2015 », indique l’amiral Chaperon, le groupe aéronaval français a évalué la situation géopolitique en océan Indien. Ainsi, le golfe d’Aden connaît une concentration sans précédent de navires de guerre de diverses nationalités. Pour la première fois, les Marines des Émirats arabes unis, de l’Arabie saoudite et de l’Égypte se sont déployées au large du Yémen et commencent à prendre conscience de leur rôle de sécurisation des espaces maritimes. En outre, l’Égypte devient un partenaire important avec le rachat à la France des deux bâtiments de projection et de commandement initialement destinés à la Russie (septembre 2015). De son côté, l’Iran affirme sa présence régionale avec la maîtrise de la stratégie navale, comme l’a démontré son exercice « Noble Prophet 9 » dans le golfe Arabo-Persique (février-mars 2015). La Marine russe revient en océan Indien. Enfin, la Marine chinoise, qui connaît un développement exponentiel, y montre son pavillon.

L’importance stratégique de la mer. La Marine française s’intègre depuis un siècle à une stratégie terrestre. Ainsi, en août 1914, le transport du 9ème Corps d’armée d’Afrique du Nord vers la métropole a contribué à la victoire de la Marne. De 1940 à 1944, la stratégie de la France Libre a reposé sur les arrières maritimes et coloniaux, condition de la reconquête de la métropole. Pourtant son chef, le général De Gaulle, lâchera l’empire colonial dans les années1960 pour le remplacer par une double stratégie culturelle et de dissuasion nucléaire, estime Martin Motte. Outre son siège de membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU depuis 1945, la francophonie constitue pour la France un atout majeur en matière de relations internationales. Le français, relais d’influence et aujourd’hui 5ème langue parlée dans le monde, représente 4 % de sa population, chiffre qui doublera à terme. D’autre part, avec ses sous-marins nucléaires lanceurs d’engins, la Force océanique stratégique reste le pilier de la dissuasion, sans oublier les Rafale porteurs de l’arme nucléaire et embarqués sur le porte-avions. Le général De Gaulle l’avait anticipé dès 1965 : « La Marine se trouve maintenant et sans doute pour la première fois de notre Histoire au premier plan de puissance guerrière de la France ». Un demi-siècle plus tard, sur les 193 pays membres de l’ONU, 153 ont un accès direct à la mer. L’économie mondiale a connu une « maritimisation » croissante. Le commerce maritime a été multiplié par 8 depuis 1960. Plus de 80 % des échanges mondiaux transitent par la mer, dont un tiers pour les flux pétroliers. Les câbles sous-marins assurent plus de 99 % des flux numériques. Les organisations djihadistes pourraient prendre pour cibles les goulets d’étranglement du trafic  maritime : détroit de Gibraltar ; isthme de Suez ; détroit de Bab-el-Mandeb ; détroit d’Ormuz ; détroit de Malacca. La piraterie a diminué dans le monde, mais n’est pas éradiquée dans certaines zones : mer des Caraïbes ; golfe de Guinée ; golfe d’Aden ; golfe du Bengale ; détroit de Malacca ; mer de Chine méridionale. Enfin la mer devient un réservoir de ressources stratégiques : protéines, pétrole, gaz et minerais rares.

Loïc Salmon

Marine nationale : opération « Arromanches » en Méditerranée et océan Indien

Dissuasion nucléaire : assurer à la France son indépendance

L’océan Indien : espace sous tension

Au début du XXème siècle, la Marine de guerre de la France décline par rapport à celle de la Grande-Bretagne, tandis que celle de l’Allemagne monte en puissance, explique Thibault Leroy. Pour protéger son empire colonial, la Grande-Bretagne entend disposer d’une Marine capable de surclasser les deux autres plus importantes. Or, en 1905, le Japon inflige une sévère défaite à la Russie lors de la bataille navale de Tsushima. Le cuirassé devient alors  le navire principal d’une flotte de combat (« capital ship »). Après la guerre de Sécession (1860-1865), les États-Unis développent leur Marine, qui égale celles de la France et de l’Italie en 1914. Malgré la perte d’une grande partie de leur flotte à Pearl Harbour (1941), ils remportent la bataille aéronavale de Midway (1942), grâce aux radars, dont sont dépourvus les porte-avions japonais. Depuis, le porte-aéronefs a remplacé le cuirassé comme « capital ship », atout déterminant d’une force navale.




Cyber : au cœur des enjeux de défense et de sécurité

Les moyens de défense sont directement exposés à la menace cyber sur les théâtres d’opération et le territoire national. En outre, les capacités du réseau internet sont exploitées à des fins terroristes par des organisations et même des États.

Ce thème a fait l’objet d’un colloque organisé, le 24 septembre 2015 à Paris, par le ministère de la Défense et diverses entreprises de cyberdéfense. Y ont notamment participé : Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense ; Frédérick Douzet, professeure titulaire de la chaire Castex ; Kevin Limonier, chercheur à l’Institut de géopolitique ; le général Thierry Burkhardt de la Coordination nationale du renseignement ; Nicolas Mazzuchi, chercheur à l’Institut des relations internationales et stratégiques ; Alice Lacoye-Matteus, avocate et doctorante.

Une dimension stratégique. En Afghanistan, les forces françaises ont été la cible d’une attaque cyber, qui a temporairement perturbé les liaisons entre les drones et la métropole, a indiqué Jean-Yves Le Drian. Les groupes armés terroristes au Levant, en Afrique et au Maghreb menacent l’espace numérique. Une source de propagande Daech a été identifiée en Syrie avec des relais en Europe, qui utilisent les infrastructures et les opérateurs Internet. Les mafias, qui disposent de moyens du niveau de certains États, travaillent pour elles-mêmes ou vendent leurs services au plus offrant. La cyberdéfense est intégrée à l’État-major des armées, à la Direction générale de l’armement et aux services de renseignement. Le ministre a exposé ses quatre priorités en la matière. D’abord, il faut garantir la protection des réseaux et des systèmes de défense, par l’acquisition de produits et de service de confiance et une conception rigoureuse des systèmes concernés. En outre, la chaîne opérationnelle de cyberdéfense agit en temps réel pour la sécurité des systèmes. Ce volet, déjà intégré aux déploiements des forces militaires au Levant et au Sahel, leur fabrique un bouclier protecteur avec des dispositifs particuliers. Une unité spécialement équipée, dont le noyau est déjà en place au Levant, sera totalement opérationnelle en 2018. De plus, afin d’anticiper les menaces, de caractériser l’adversaire et d’adapter ainsi les systèmes de défense, la Direction du renseignement militaire a récemment créé un centre de recherches et d’analyse cyber. De son côté, la Direction générale de sécurité extérieure développe ses propres moyens depuis plusieurs années. La « lutte informatique active », explique le ministre, consiste à priver l’adversaire de ses systèmes numériques en les neutralisant ou les leurrant, en vue d’un avantage déterminant dans la manœuvre militaire. Un « pôle d’excellence cyber » a été créé à cet effet (voir encadré).

Une menace évolutive. Au niveau international, rappelle Frédérick Douzet, les impacts des cyberattaques, lancées par des réseaux anonymes et chiffrés, restent sous le seuil de déclenchement de conflits armés. Or, les données de traçabilité se trouvent entre les mains des grandes plates-formes américaines. Par ailleurs, la cyberguerre s’inscrit dans l’histoire de la Russie conquérante depuis le Moyen-Age avec des combattants irréguliers (cosaques notamment), puis la propagande déstabilisante du régime soviétique à partir de 1920, indique Kevin Limonier. Aujourd’hui, Moscou recourt aux milices politisées qui lui sont favorables, en échange de soutiens financier et logistique (Tchétchénie, 1999 et Ukraine, 2013). Sa stratégie est double : emploi de francs-tireurs (hackers) officiellement non affiliés aux institutions politiques russes (paralysie de l’Estonie en 2007) ; guerre de l’information pour déstabiliser une région (Ukraine depuis 2013). Les organes officiels russes d’information vont à l’encontre des valeurs occidentales via les réseaux sociaux, tandis que des « mercenaires » pro-russes polluent les débats en cours. L’intégration totale du cyber aux opérations conditionne désormais leur succès, souligne le général Burkhard. Les outils techniques sont regroupés dans le centre opérationnel cyber à Balard afin de gagner en synergie. Aujourd’hui, les armées françaises en opérations sont en situation de guerre avec des attaques quotidiennes de désinformation. Or l’intégration du cyber ne va pas de soi, car les armées de Terre et de l’Air, la Marine nationale et le Commandement interarmées de l’espace ont longtemps cru, à tort, pouvoir gagner cette guerre chacun de son côté. En conséquence, l’organisation de la cyberdéfense aux niveaux stratégique, opératif et tactique demande beaucoup de souplesse et d’adaptation. Enfin, la frontière entre les opérations extérieures et la sécurité intérieure s’efface.

Propagande terroriste. Daech, n’est pas seulement une organisation terroriste, mais aussi un « proto-État » avec la notion de territoire et l’utilisation de symboles, estime Nicolas Mazzuchi. Le cyberespace facilite l’action du faible au fort. Par suite des changements fréquents des chefs chez Daech, les nouveaux cadres supérieurs, plus jeunes, comprennent l’usage du cyberespace. Ils ont acquis la capacité de créer des jeux vidéo à la gloire de Daech, imposer son drapeau noir sur un site ou diffuser des atrocités en vidéo. La combinaison avec d’autres moyens leur permet de concevoir des actions terroristes, en raison de l’accroissement des vulnérabilités dues aux « systèmes de contrôle et d’acquisition de données » (SCADA en anglais) sur les victimes ou les futures recrues connectées. Selon Alice Lacoye-Matteus, Daech maîtrise les tuyaux techniques (piratage de TV5 Monde en avril 2015) et l’analyse du contenu des messages. Justifiant sa gouvernance par la religion, il a aussi acquis une assise politico-militaire, qui lui permet de recruter sur les réseaux sociaux 30 % de personnes de moins de 50 ans ayant une expérience du combat. Pour contrer la propagande de Daech, plutôt qu’une censure facile à contourner, Alice Lacoye-Matteus recommande d’exposer, notamment, la contradiction entre son rigorisme religieux et l’opulence matérielle de ses dirigeants ou sa justification religieuse de l’esclavage. Son archétype masculin et guerrier repose sur l’épopée de l’émir Chamil, résistant du Caucase, qui avait négocié sa reddition au tsar en 1859 !

Loïc Salmon

Cyberdéfense militaire : DEFNET 2015, exercice interarmées à tous les niveau

Cyber : de l’omniprésence à l’hyperpuissance

Terrorisme djihadiste : prédominance de la dimension psychoculturelle

Les statuts fondateurs de l’association à but non lucratif « Pôle d’excellence cyber » ont été signés, le 24 septembre 2015 à Paris, par le ministre de la Défense et le président du Conseil régional de Bretagne. Lancé en février 2014 au profit du ministère et de la communauté nationale cyber, ce pôle a pour mission de stimuler le développement de : l’offre de formations (initiale, supérieure et continue) et sécuriser la disponibilité des compétences qualifiées ; la recherche académique ; l’offre de services et de produits de confiance ; la base industrielle et technologique de cyberdéfense. Fort déjà de 50 partenaires qui travaillent en réseau, il regroupe notamment les équipes cyber du ministère de la Défense, des écoles et des universités, des laboratoires de recherche, des grands groupes prestataires et opérateurs d’importance vitale, des petites et moyennes entreprises innovantes et des agences de développement économique.




Armée de l’Air : création d’un « centre de guerre aérienne »

Le Centre d’expertise aérienne militaire, véritable « centre de guerre aérienne » installé sur la Base aérienne 118 (BA 118) de Mont-de-Marsan, a été officiellement ouvert le 1er septembre 2015 par le général Denis Mercier, chef d’État-major de l’armée de l’Air. Il doit permettre de répondre, de manière cohérente et dans des délais réduits au plus juste, aux demandes des états-majors et des forces. Ce centre, directement rattaché au major général de l’armée de l’Air, résulte de la fusion du Centre d’expériences aériennes militaires (CEAM), qui réunit les expertises indispensables à la construction des futures capacités opérationnelles, et le Centre tactique air destiné aux besoins du commandement des forces aériennes. Le Centre d’expertise aérienne militaire rassemble trois types d’expertises sur un même site (la BA 118) et sous un même chef (un général de division aérienne). Le premier type (niveau opératif) concerne les doctrines de l’armée de l’Air : travaux sur les principes fondamentaux ; coordination du retour d’expérience ; conduite d’études exploratoires intéressant directement le commandement et le contrôle d’un théâtre d’opération. Le deuxième type (niveau stratégique) porte sur les expertises technico-opérationnelles nécessaires à la modernisation des équipements des forces : contribution au suivi du développement des nouveaux matériels ; conception et réalisation des expérimentations. Le troisième type (niveau tactique) consiste à capitaliser les meilleures pratiques et à valoriser toute initiative ou réflexion pertinente des unités opérationnelles. Ce triptyque assure la cohérence des capacités opérationnelles et permet de maîtriser la surenchère technologique des équipements. Le Centre d’expertise aérienne militaire entretient des partenariats avec la Délégation générale de l’armement, l’industrie et les universités. Il repose aussi sur un réseau de « référents tactiques » des  unités opérationnelles. Chaque référent aura reçu une formation de haut niveau de 4 semaines, dont les cours sont validés par les centres experts de l’armée de l’Air ou d’organismes externes. La première session a eu lieu en juin 2015 et la seconde est prévue à la fin de l’année. Le stagiaire est immergé dans une « ruche multiculturelle », où il explique les capacités et expertises de son unité d’origine, ses besoins et ses contraintes. En retour, il apprend à intégrer les spécificités des unités des autres stagiaires. De son côté, le commandant d’unité peut faire appel au référent tactique pour solliciter le Centre d’expertise aérienne militaire sur des questions d’ordre tactique, technique ou doctrinal. Il y fait remonter, par son intermédiaire, les bonnes pratiques de son unité, pour les faire partager par d’autres. Enfin, il tient ainsi son unité à jour des changements doctrinaux, techniques et tactiques de l’armée de l’Air. La Base aérienne 118 abrite diverses unités, qui facilitent les activités du Centre d’expertise aérienne militaire : escadrons de chasse et de défense sol-air ; unités d’appui aux opérations (soutien, guerre électronique, liaisons de données tactiques, systèmes d’information opérationnels et génie de l’Air) ; unités d’instruction (contrôle et défense aérienne, formation Rafale et utilisation opérationnelle et technique) ; unités d’expérimentations techniques ; unités de soutiens communs et spécialisés. Toutes participent aux missions permanentes de l’armée de l’Air : protection, dissuasion nucléaire et intervention.

Loïc Salmon

Armée de l’Air : une « smart base » pour créer des partenariats avec le monde civil

Armée de l’Air : engagement opérationnel intense et réforme en profondeur

Dissuasion nucléaire : assurer à la France son indépendance