Forces spéciales

Autonomie, faible empreinte, réactivité et démarche innovante caractérisent les forces spéciales, qui disposent d’un vivier de réservistes opérationnels.

Pendant la guerre du Golfe après l’invasion du Koweït par l’armée irakienne (1990-1991), la France a mis en œuvre des forces spéciales dans l’urgence et sans les moyens adéquats. Pour combler son retard par rapport à celles des États-Unis et de la Grande-Bretagne, elle constitue alors une structure interarmées dédiée, le Commandement des opérations spéciales (COS). Durant la décennie 1990, les forces spéciales (FS) françaises et alliées interviennent pendant la guerre interethnique et religieuse en Bosnie pour des missions de recherche et sauvetage de pilotes d’aéronefs abattus. Ensuite, faute de moyens satellitaires, elles privilégient le renseignement humain dans la recherche de criminels de guerre, grâce à une collaboration internationale étroite, puis procèdent à leur capture par des opérations complexes mobilisant des moyens aériens. Au Kosovo, elles effectuent des missions de renseignement et de sécurisation des sites industriels sensibles avec, parfois, des mesures de coercition et de neutralisation. Selon l’actualité géopolitique, les forces spéciales sont envoyées dans les zones de crises majeures (Somalie, Comores, Sierra Leone, Guinée Bissau, Centrafrique, Rwanda et République du Congo) pour empêcher des massacres ou exfiltrer des ressortissants français. Pendant les années 2000, le COS organise des opérations de neutralisation de djihadistes et de démantèlement de cellules de l’organisation terroriste Al-Qaïda en Asie centrale, au Moyen-Orient et en Afrique. En Afghanistan, la France obtient la certification OTAN de nation-cadre pour la conduite d’opérations spéciales. Par ailleurs, des FS sont associées à la lutte contre la piraterie en Somalie ou contre les narcotrafics (cocaïne et amphétamines), actifs entre l’Amérique latine et l’Europe via les ports africains. Le contrôle des navires de commerce nécessite des gendarmes et des FS, en liaison avec les services régionaux de lutte contre la drogue (États-Unis et États des petites Antilles). Dans la décennie 2010, les FS réduisent en intensité leurs actions militaires en Afghanistan et sont redéployées au Levant et au Sahel. Dès 2013, elles sont envoyées au Mali pour des missions de contre-terrorisme et de neutralisation d’individus « à haute valeur ». Les opérations, effectuées à 90 % de nuit, incluent combats, indentifications, retours à la base d’appui et de soutien puis réengagements sur le terrain après de brève périodes de repos. Les opérations de libération d’otages connaissent des succès, mais aussi des échecs avec des morts et des blessés parmi les FS. En mars 2020, la « Task Force Takuba », composée uniquement de FS européennes (dix pays) mais majoritairement françaises, appuie et soutient l’armée malienne et l’aide à constituer des FS…jusqu’au départ des forces françaises le 30 juin 2022. A l’avenir, les détachements de FS seront amenés à agir dans des « zones grises » militarisées, où l’adversaire cherchera à contester la présence française tout en restant sous le seuil de l’affrontement par des actions « hybrides ». Ils devront apprendre à descendre au niveau tactique des moyens de types cyberattaque, guerre électronique et, éventuellement, d’influence ou d’actions sur l’environnement. Il ‘agira de comprendre les intentions de l’adversaire pour les dévoiler, grâce à une plus grande fusion de tous les types de renseignements et une approche multi-capteurs, tournée vers l’appui à l’action. Selon le Service de santé des armées, la « télémédecine » devrait prendre plus d’ampleur sur fond d’attaque cyber. Compte tenu des retours d’expérience et de la crise sanitaire du Covid-19, l’adversaire pourrait tenter de rendre peu crédible le soutien médical aux FS et ainsi semer le doute parmi elles.

Loïc Salmon

« Force spéciales », ouvrage collectif. Éditions de La Martinière et Musée de l’Armée Invalides, 320 pages, nombreuses illustrations, 35 €

Exposition « Forces spéciales » aux Invalides

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