Renseignement et espionnage du Premier Empire à l’affaire Dreyfus (XIXe siècle)

Reconnus par les autorités politiques au cours du XIXème siècle, les services de renseignement montent en puissance en effectifs et sur les plans structurel, cryptographique et technique.

Entre 1792 et 1815, la France et la Grande-Bretagne s’affrontent, directement ou non, sur les champs de bataille et dans une guerre de l’ombre. La première s’appuie sur les réseaux irlandais et la seconde sur les émigrés sur son sol et les réseaux royalistes en France. La Couronne britannique bénéficie aussi de la collaboration du service de renseignement de la banque Rothschild présente à Londres, Paris, Francfort, Vienne et Naples. Grâce aux réseaux diplomatiques, Napoléon dispose d’un éventail de sources pour le renseignement de documentation de niveau politique, à savoir la menace, la connaissance du milieu et l’évaluation des vulnérabilités adverses Pour préparer les interventions militaires depuis Paris, le renseignement de situation sur le futur théâtre d’opérations recherche les indices permettant d’estimer où et quand aura lieu l’événement. En outre, le « cabinet noir » ouvre la correspondance des diplomates et des suspects déjà surveillés. Un autre service se spécialise dans le décryptage des codes adverses. Enfin, le Dépôt de la guerre, à l’origine de l’Institut géographique national, réalise des cartes sur toute l’Europe. A l’époque, la torture n’est pas de mise entre armées régulières. L’interrogatoire des prisonniers nécessite la maîtrise d’une technique basée sur la logique, la déduction, la vivacité d’esprit et une certaine dose d’empathie. Après 1815, la monarchie congédie tous les agents secrets ayant servi la République et l’Empire, désorganisant durablement le renseignement français jusqu’à la défaite de 1870. A partir de la seconde moitié du XIXème siècle, les révolutions industrielles et les conquêtes coloniales décuplent les besoins en renseignement des Etats européens, rivaux sur les plans politique, économique et militaire. La Prusse prend l’initiative d’un service de renseignement permanent et formalise progressive les règles du métier. La guerre de Crimée (1853-1856) ayant démontré l’insuffisance du renseignement extérieur reposant uniquement sur la Marine et le ministère des Affaires étrangères, l’Armée britannique crée le Département de topographie et de statistiques en 1855. Puis un service de renseignement permanent, rattaché à l’état-major général, voit le jour en 1873. Il se structure dans les activités d’espionnage et de contre-espionnage en 1909, sous le nom de « Secret Service Bureau », après les deux guerres « irrégulières » des Boers (1880-1881 et 1899-1902). Pendant le Second Empire (1852-1870), la concertation entre Paris et Londres sur les affaires internationales vise à empêcher l’un de prendre un avantage majeur sur l’autre, notamment sur mer. Dans les ambassades, l’attaché naval, en l’occurrence un officier de Marine, évalue les opportunités de coopération, observe les progrès techniques et cherche à comprendre les intentions de l’Amirauté du pays d’accréditation. Commencé en Grande-Bretagne en 1860, le réseau français se développe selon la modernisation ou la montée en puissance des Marines, à savoir en Italie et Russie en 1886, en Allemagne (1895), au Japon et aux Etats-Unis (1899). Il totalise 10 postes d’attachés résidents et 9 postes de non-résidents en 1913.

Loïc Salmon

« Renseignement et espionnage du Premier Empire à l’affaire Dreyfus (XIXe siècle) », ouvrage collectif. Editions Cf2R Ellipses, 480 p., 29,50 €.

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