Renseignement et espionnage de la Renaissance à la Révolution (XVe-XVIIIe siècles)

La nécessité du secret croît avec la puissance du souverain, qui s’entoure de personnes chargées de gagner des batailles à ne pas livrer. Recours à la psychologie et appropriation des savoir-faire étrangers annoncent la professionnalisation de cette activité.

En trois siècles, le renseignement va profiter d’événements importants. La naissance de l’imprimerie, qui révolutionne l’information, transforme le rapport au savoir et à la connaissance. La mise en place de services postaux royaux accélère la transmission de renseignements, qui va de pair avec le perfectionnement de la cryptographie. Les grands conflits internationaux renforcent la nécessité du renseignement militaire, du contre-espionnage et du développement de réseau d’agents chez l’adversaire pour anticiper et perturber son action. Les grandes découvertes, qui repoussent les limites du monde connu, entraînent des rivalités politiques et commerciales. Le renseignement porte sur la surveillance des concurrents, la cartographie, les techniques de construction navale et les instruments de navigation. Suite à l’essor de l’activité marchande, les banques misent sur le renseignement économique, à savoir les capacités des emprunteurs, mais aussi politique pour prévoir les événements pouvant influer sur les cours des monnaies et les marchandises. Toutefois, le renseignement extérieur ne se différencie pas encore de la diplomatie et la reconnaissance militaire ne dure que le temps de la campagne. Parfois, les activités de renseignement extérieur et intérieur relèvent de la même structure, souvent liée à un homme ou à une organisation temporaire, créée pour un objectif particulier. Enfin, la révolution industrielle déclenche une nouvelle compétition caractérisée par l’espionnage technologique. Le statut des professionnels du renseignement varie selon les critères sociaux en vigueur. Ainsi, alors que la Grande-Bretagne les considère égaux et partenaires des diplomates, la France les situe en dessous, dans le monde, interlope mais nécessaire, des policiers et des militaires. Puissance commerciale majeure aux XVIème et XVIIème siècles, la République de Venise dispose de services de renseignements permanents, efficaces et compétitifs par rapport aux monarchies européennes. Quoique dépourvue d’un service spécifique, la papauté profite de la collecte d’informations dans le monde entier, assurée par les prêtres et les ordres religieux. En raison de son ambition de puissance mondiale, l’Espagne finance un service secret dirigé contre l’Empire ottoman, mais aussi contre la France et l’Angleterre. La décision de la France de fonder une colonie de peuplement au Canada est en effet perçue comme une menace pour celles de l’Espagne en Amérique centrale, en cas de conflit entre les deux pays. Pour rétablir le catholicisme en Angleterre et exiger des dédommagements à la piraterie contre ses galions, Madrid tente une invasion navale, qui échoue grâce à une tempête et à l’efficacité du service de renseignement britannique. Par la suite, ce dernier contribue au rattrapage technologique du pays dans le domaine maritime. En France, Louis XI tisse un réseau d’agents secrets dans toute l’Europe. Louis XV crée le « Secret du Roi », en parallèle à la diplomatie officielle. Dès 1797, Talleyrand, ministre des Relations extérieures, anime un service secret…pendant plus de dix ans !

Loïc Salmon

« Renseignement et espionnage de la Renaissance à la Révolution (XVe-XVIIIe siècles) », ouvrage collectif. Editions Cf2R Ellipses, 500 p., 29,50 € ;

Renseignement et espionnage pendant l’Antiquité et le Moyen-Âge

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