OPEX : prise en charge et suivi des grands blessés

Les militaires gravement blessés en opérations extérieures (OPEX) sont rapatriés d’urgence dans les hôpitaux d’instruction des armées (HIA), puis transférés à l’Institution nationale des Invalides (InI) pour  un séjour médicalisé de longue durée. Il existe neuf HIA en métropole et un à la base de défense de Djibouti. Le 16 novembre 2011, l’Association des journalistes de défense a organisé une journée de rencontres avec de hauts responsables de l’HIA Percy (banlieue parisienne) et de l’InI (Paris).

Parmi les blessés en Afghanistan arrivés à Percy en 2010-2011, 72 % souffraient de traumatismes ouverts : plaies par balles et par engins explosifs improvisés (IED) ainsi qu’accidents routiers de véhicules de l’avant blindés. Par mesure de précaution, les combattants doivent porter, dans un véhicule, un masque en polycarbonate qui freine les projectiles ou, quand ils sont à pied, des lunettes de protection. Une blessure de guerre à l’œil se caractérise par une plaie, un corps étranger, un phototraumatisme au laser ou une brûlure chimique. La procédure OTAN en vigueur distingue quatre phases de traitement des blessés: relève du blessé par ses camarades de combat ; transport jusqu’à l’infirmerie de campagne ; évacuation sur l’hôpital militaire de Kaboul, où se trouvent deux chirurgiens, un otorhinolaryngologiste, un ophtalmologiste et deux anesthésistes pour les opérations d’urgence (enlèvement du corps étranger ou greffe de la cornée) ; rapatriement d’urgence en métropole. L’évacuation sur Paris par voie aérienne, jusqu’à sept patients à la fois, est organisée dans les six heures. Dans 70 % des cas, un médecin anesthésiste réanimateur voyage à bord de l’avion médicalisé. A l’arrivée aux aéroports de Villacoublay ou d’Orly, une noria d’ambulances des sapeurs pompiers de Paris achemine les blessés vers les HIA de Bégin, de Percy ou du Val de Grâce. La durée moyenne d’une évacuation sanitaire est de deux jours et quelques heures. Par exemple, le service des urgences de l’HIA Percy est informé de la pathologie des patients avant leur évacuation aérienne pour les diriger le plus rapidement possible vers la réanimation, le centre des brûlés, la salle des radio-contaminés ou le bloc opératoire, tous situés au même étage. En 2010, 83 % des grands blessés souffraient de polytraumatismes. Une fois identifiés avec précision, les patients passent individuellement une demi-heure dans une salle de « déchoquage » pour un examen général par un chirurgien et une infirmière. Enfin, une salle d’accueil est prévue pour leurs familles qui peuvent communiquer avec eux par internet, au moyen de webcaméras.

Le suivi aux Invalides

Une fois leur séjour en HIA terminé, les grands blessés sont pris en charge par l’InI de Paris, unique en son genre dans le monde (voir revue téléchargeable mars 2011, p.7). Quelque 400 personnels civils, encadrés par des médecins militaires, travaillent au centre médico-chirurgical (200 lits). Unité de réparation, rééducation et réinsertion, ce centre accueille aussi les personnes civiles victimes de graves traumatismes. Il fait référence dans le traitement et le suivi des amputés et des paraplégiques et tétraplégiques traumatiques. Le service de chirurgie dentaire assure les soins et la mise en place de prothèses et d’implants aux grands handicapés et traumatisés faciaux complexes (« gueules cassées »). L’unité sensori-cognitive évalue et prend en charge les séquelles de traumatismes crâniens ou de maladies liées au vieillissement et à la basse vision. L’InI dispose de la plus grande piscine d’Europe dédiée à la balnéothérapie, animée par douze kinésithérapeutes. Le traitement dure d’un mois à deux ans avec des séances de 45 minutes dans une eau à 34,5 ° C. En l’absence de pesanteur, le grand blessé acquiert une paix intérieure par une reconstruction interne et une meilleure estime de soi. Mais, sorti de l’eau, il retrouve les difficultés de son handicap. Il passe alors dans une grande salle, dite « plateau technique de rééducation fonctionnelle », où se côtoient une dizaine de patients pris en charge individuellement. L’ergothérapie, assurée par une quinzaine de personnes, constitue la phase ultime pour reprendre une vie presque normale, avec éventuellement un fauteuil roulant, dans un studio adapté avec cuisine et atelier. Un moniteur d’auto-école prépare au permis « grand invalide » sur un véhicule spécifique. Par ailleurs et pour faciliter la réinsertion, un cercle sportif est ouvert à toute personne handicapée. En 2011, il comptait 400 adhérents, dont 300 anciens militaires handicapés. « Il n’y a pas de blouse blanche pour souligner l’étape de réadaptation, car il y a une vie après l’accident », souligne le commandant Gaëtan de la Vergne, paraplégique et chef de cabinet du gouverneur des Invalides. Cinq moniteurs de sport de la Gendarmerie sont affectés à temps plein pour enseigner une dizaine de disciplines, dont l’escrime, la musculation et le tir. Le vélo et la natation se font à l’extérieur et un stage de montage est organisé tous les ans. En avril 2012, 22 blessés militaires se rendront au Centre d’éducation physique et sportive de Bourges, spécialisé pour les handicapés.

Que deviennent les grands blessés reconnus invalides à 85 % et plus ? Fondé par Louis XIV en 1674 pour « ceux qui ont exposé librement leur vie et prodigué leur sang pour la défense et le soutien de notre pays », l’InI les accueille dans son Centre des pensionnaires, à titre permanent ou provisoire, ainsi que les victimes d’attentats, hommes et femmes, civils et militaires. « L’InI est plus une résidence qu’un hôpital », précise son directeur, le médecin général inspecteur Louis Cador. Environ 90 pensionnaires y vivent et leur âge varie de moins de trente ans à… plus de cent !

Loïc Salmon

disciplines, dont l’escrime, la musculation et le tir. Le vélo et la natation se font à l’extérieur et un stage de montage est organisé tous les ans. En avril 2012, 22 blessés militaires se rendront au Centre d’éducation physique et sportive de Bourges, spécialisé pour les handicapés.

Que deviennent les grands blessés reconnus invalides à 85 % et plus ? Fondé par Louis XIV en 1674 pour « ceux qui ont exposé librement leur vie et prodigué leur sang pour la défense et le soutien de notre pays », l’InI les accueille dans son Centre des pensionnaires, à titre permanent ou provisoire, ainsi que les victimes d’attentats, hommes et femmes, civils et militaires. « L’InI est plus une résidence qu’un hôpital », précise son directeur, le médecin général inspecteur Louis Cador. Environ 90 pensionnaires y vivent et leur âge varie de moins de trente ans à… plus de cent !

Loïc Salmon

 

A la sortie de l’Institution nationale des Invalides, un blessé au combat est pris en charge par la Cellule d’aide aux blessés de l’armée de terre (Cabat). Celle-ci leur apporte d’abord une assistance sociale et juridique. Ensuite, elle les aide à définir un nouveau projet de vie, réintégrer une unité militaire ou retourner à la vie civile. Elle agit dans l’urgence et la durée : reconversion des veuves et suivi des orphelins jusqu’à 23-25 ans. L’association Terre Fraternité, présidée par le général d’armée Bernard Thorette, ancien chef d’état-major de l’armée de Terre, récolte des fonds pour compléter les aides de l’Etat. Enfin, des organisations non gouvernementales apportent leur concours, notamment l’Ordre souverain de Malte et l’Union des blessés de la face et de la tête, plus connue sous le nom de « Gueules cassées ».