Marine nationale : opération « Arromanches » en Méditerranée et océan Indien

Pour la première fois, le porte-avions Charles-de-Gaulle a été placé sous contrôle opérationnel américain et a assuré la permanence aéronavale d’une coalition engagée dans le golfe Arabo-Persique. L’opération « Arromanches » (janvier-mai 2015) a été présentée à la presse le 7 mai 2015, au cours d’une visioconférence entre le ministère de la Défense à Paris et le contre-amiral Éric Chaperon, commandant la « Task Force 473 » (TF 473), à bord du Charles-de-Gaulle. Au cours de son déploiement, la TF 473 a participé à l’opération « Chammal » à proximité de l’Iran (23 février-18 avril), de concert avec 2 frégates britanniques ainsi que 3 frégates et 1 porte-avions et américains. Outre le Charles-de-Gaulle, la TF 473 a mis en œuvre 2.600 personnels, 12 Rafale, 9 Super Étendard Modernisés, 1 avion de guet aérien Hawkeye, 4 hélicoptères, la frégate de défense aérienne Chevalier-Paul, la frégate britannique anti-sous-marine Kent intégrée à son dispositif, le pétrolier-ravitailleur Meuse, le sous-marin nucléaire d’attaque Améthyste, l’état-major de la TF 473 et un avion de patrouille maritime Atlantique 2. Chaque jour, son aviation embarquée a réalisé 10 à 15 missions de combat dans la profondeur de l’ensemble du territoire irakien, avec des vols de 6 h et à plus de 1.000 km du Charles-de-Gaulle. La disponibilité des Rafale a été de 84 %, un peu moins pour les Super Étendard Modernisés. « La coalition fait tout pour éviter les dommages collatéraux », souligne l’amiral. Selon lui, l’avancée de l’organisation terroriste Daech a été arrêtée, mais l’engagement sera encore long pour les avions de l’armée de l’Air française encore là-bas. En 4 mois de déploiement, la TF 473  aura passé 100 jours à la mer. Mission de présence opérationnelle dans des zones d’intérêt stratégique, l’opération « Arromanches » avait pour but de sécuriser les espaces maritimes et d’offrir aux autorités politico-militaires des options de diplomatie, de défense et de renseignement au Moyen-Orient. En janvier, la TF 473 a participé à des exercices et des patrouilles opérationnelles, en Italie et en Grèce, avec la force navale multinationale de l’OTAN en Méditerranée, composante maritime de sa Force de réaction rapide. Après avoir franchi le canal de Suez (26 janvier), elle a été intégrée à l’exercice « White Shark » avec les forces armées d’Arabie saoudite. Après « Chammal », elle a participé à l’exercice « Vanura » (28 avril-2 mai), avec la Marine indienne, très intéressée par les performances des Rafale Marine. L’Inde a en effet commandé 36 Rafale en avril 2015, après trois ans de négociations exclusives.

Loïc Salmon

Marine et Diplomatie

Marines : coopérations accrues dans les dix prochaines années

OTAN : améliorer la disponibilité et la réactivité




Marine nationale : en opérations sur toutes les mers

En posture permanente de sûreté, la Marine agit, dès le temps de paix, sur l’espace marin de liberté stratégique et de manœuvre. Responsable de l’action de l’État en mer, elle participe aussi aux opérations sur les théâtres extérieurs.

Ce thème a fait l’objet d’une conférence-débat organisée, le 15 avril 2015 à Paris, par le Centre d’études stratégiques de la marine. Y sont notamment intervenus : la contre-amirale Anne Cullerre, sous-chef d’état-major « Opérations aéronavales » ; le capitaine de vaisseau (R) Lars Wedin, chercheur à l’Institut français d’analyse stratégique ; le capitaine de vaisseau Jacques Rivière, chef du bureau « Opérations aéronavales ».

Enjeux et menaces. Outre ses ressources halieutiques et son importance pour le transport de marchandises dans le monde (90 % des échanges), la mer devient un enjeu énergétique, explique le capitaine de vaisseau Wedin. Le parc d’environ 170.000 plates-formes de production d’hydrocarbures (pétrole et gaz) s’accroît de 400 unités par an. S’y ajoutent les éoliennes et hydroliennes (sous-marines), génératrices d’électricité. Or, ces infrastructures affectent l’emploi des radars et les trajectoires de manœuvre des navires marchands pour les éviter. Ces entraves à la circulation maritime se répercutent sur la liberté de navigation. Certains pays riverains, notamment en mer de Chine, créent des zones d’interdiction pour les protéger, notamment des organisations terroristes susceptibles d’utiliser vedettes rapides ou sous-marins de poche pour les endommager, avec des conséquences écologiques et médiatiques. Le commandant Wedin en déduit une stratégie maritime pour le XXIème siècle avec ses composantes économique, financière, industrielle, de défense (OTAN et accords bilatéraux), diplomatique et morale, à savoir la prise en compte de l’importance de la mer par l’opinion publique. L’amirale Cullère rappelle que tous les pays commerçants disposent de Marines militaires pour défendre leurs intérêts maritimes. Ainsi, la Chine et les pays d’Asie du Sud-Est développent leur Marine pour s’assurer la maîtrise des mers environnantes. La guerre froide (1947-1991) semble de retour. Si un bâtiment étranger se rapproche trop près de la Crimée, des unités russes vont immédiatement à sa rencontre. La Russie reconstruit en effet sa Marine, qui montre son pavillon en océan Indien et en Méditerranée. Parallèlement, des avions russes se manifestent le long des côtes atlantiques, indique le capitaine de vaisseau Rivière.

Missions permanentes. Pour garantir la crédibilité de la dissuasion nucléaire, le programme « Cœlacanthe » poursuit la modernisation de la Force océanique stratégique par la mise au format du missile balistique M51 du 3ème SNLE. Pour participer à la protection de ses 80.000 ressortissants français dans le golfe de Guinée, l’opération « Corymbe » combine surveillance maritime et coopération avec les pays riverains pour la prise en charge de leur propre sécurité dans leurs eaux territoriales, explique l’amirale Cullerre. Sur le territoire national (métropole et outre-mer), l’action de l’État en mer (55 missions) inclut la protection des approches maritimes (sémaphores et renseignement). En 2014, 350 personnes ont été secourues, 500 kg de cocaïne saisis et 2.000 engins explosifs neutralisés. En outre, 3.280 marins et gendarmes maritimes ont assuré la sécurité d’enceintes militaires et des installations de la dissuasion. Début 2015, la Marine n’a donc pu fournir de personnels au-delà d’un mois à l’opération « Sentinelle » en Ile-de-France (10.000 personnels mobilisés). En conséquence, l’État-major des armées réfléchit aux nouveaux formats de la défense maritime, opérationnelle et aérienne du territoire. La France participe déjà à la lutte contre l’immigration clandestine dans le cadre de la mission européenne Frontex (renseignement et récupération de naufragés). La France dispose du plus grand réseau d’attachés de défense du monde. Les Commandements supérieurs en Nouvelle-Calédonie (armée de Terre) et en Polynésie française (Marine) remplissent, au sein des pays de l’Asie du Sud-Est et du Pacifique, des missions de rayonnement, mais avec de plus en plus de difficultés car les moyens financiers diminuent. Les escales de deux frégates de surveillance y contribuent, notamment aux Mexique, Chili, Pérou et en mer de Chine. Si le ministère des Affaires étrangères décide, par exemple, l’envoi de secours aux victimes d’un cyclone aux Philippines, la Marine peut déjà en réaliser la planification sur place. En raison de la présence d’entreprises françaises (CMA et Total) dans la région, des bâtiments militaires français  s’y rendent, mais sans prendre parti dans les litiges territoriaux entre les pays riverains et la Chine, qui se pose en rivale des États-Unis. Par ailleurs, la Marine américaine doit assurer, en permanence, l’ouverture des détroits de Bab-el-Mandeb et d’Ormuz, où la Grande-Bretagne a envoyé des unités et la France un chasseur de mines en avril 2015.

Opérations ponctuelles. Avec ses bâtiments, aéronefs (avion radar Atlantique 2 ou Falcon 50 notamment) et commandos (forces spéciales), la Marine participe aux opérations extérieures, dans un cadre interarmées et en coalition : « Chammal » contre Daech en Irak, « Atalante » contre la piraterie en océan Indien et « Serval » puis « Barkhane » dans la bande sahélo-saharienne. Elle dispose de : 3 bases navales à Cherbourg, Brest et Toulon ; 4 stations navales au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Gabon ; 2 bases interarmées à Djibouti et aux Émirats arabes unis. L’opération « Corymbe » dans le golfe de Guinée est dirigée par l’amiral préfet maritime de Brest, également commandant en chef pour l’Atlantique, en coordination avec ses homologues au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Gabon. Auparavant uniquement effectuées en liaison directe avec la présidence de la République, les projections de forces sur des théâtres extérieurs intègrent la communication opérationnelle, en raison de l’accélération du temps « politico-médiatique », souligne l’amirale Cullerre. En échange du soutien des États-Unis à la France en matière de renseignement et de ravitaillement en vol pendant les opérations « Harmattan » (Libye, 2011) et « Serval » (Mali, 2013), le groupe aéronaval français a assuré la relève d’un porte-avions américain au cours de l’opération « Chammal » (Irak, avril 2015).

Loïc Salmon

Asie-Pacifique : rivalités et négociations sur les enjeux stratégiques

L’océan Indien : espace sous tension

Golfe de Guinée : zone de crises pour longtemps

Avec 11 Mkm2 de zones économiques exclusives réparties sur 7.000 km de côtes sur tous les océans, la France dispose du 2ème domaine maritime mondial, après les États-Unis. Sa Marine compte : 10 sous-marins, dont 6 d’attaque (SNA) et 4 lanceurs d’engins (SNLE) ; 42 bâtiments de combat et de soutien ; près de 200 avions de chasse, de patrouille et de surveillance ainsi que des hélicoptères ; 15 unités de fusiliers et commandos Marine ; 34.000 hommes et femmes, dont 3.000 civils. Le taux de féminisation atteint 13,8 %. Dès 2017, l’équipage du premier SNA Barracuda intégrera 3 officiers féminins. Toutes les spécialités sont ouvertes aux femmes, y compris celles de pilote de chasse embarquée et de commando Marine, si elles réussissent les mêmes tests que les hommes.




Renseignement : indispensable à la souveraineté et garant de l’indépendance nationale

Les services de renseignement (SR) français ont connu une grande transformation en France ces dernières années, après la prise de conscience de l’opinion et des pouvoirs publics de la nécessité de leurs travaux.

Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois de l’Assemblée nationale, a fait le point de la situation au cours d’une conférence-débat organisée, le 9 février 2015 à Paris, par l’Institut des hautes études de défense nationale.

Évolution de l’opinion publique. Dans les pays anglo-saxons, les services de renseignement (SR) sont considérés comme utiles et légitimes et leurs agents comme exerçant « un métier de seigneur ». En France, en dehors des conflits armés, le renseignement a longtemps été perçu comme infâmant et comme un mélange de trahison et de surveillance policière. Cette absence de culture de renseignement ne résulte pas du hasard, estime Jean-Jacques Urvoas. La géographie du pays et son autosuffisance économique pendant longtemps n’ont guère incité ses habitants à s’informer sur l’extérieur, la quête de l’unité l’emportant sur la conquête hors frontières naturelles. Peu curieux, le tempérament français a valorisé la connaissance et méprisé le renseignement. Depuis le Moyen-Age, le risque doit permettre la victoire, qui résulte d’un exploit guerrier. La beauté du geste compte, notion totalement étrangère au monde du renseignement. La mémoire collective a retenu les « affaires » louches : Dreyfus (1894-1906), Ben Barka (1965), micros du Canard enchaîné (1973) et Rainbow Warrior (1985). Les dirigeants politiques français ont longtemps mal connu les possibilités et les contraintes des SR, estimant qu’ils peuvent tout, savent tout et ont réponse à tout… immédiatement ! Jusqu’à Nicolas Sarkozy (2007-2012), indique Jean-Jacques Urvoas, les présidents de la Vème République ont gardé une attitude méfiante ou prudente à leur égard. Toutefois, ces sentiments ne sont pas l’apanage de la France. Aux États-Unis, le président John Kennedy, échaudé par le fiasco de « l’affaire de la Baie des cochons » (1961) imputé à la CIA, avait déclaré à son personnel dans le hall de l’agence de renseignement : « Vos succès ne seront pas rendus publics, mais vos échecs seront annoncés à la trompette » ! Pourtant, tout change après les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis par l’organisation terroriste Al Qaïda. Celle-ci, qui ne dépend pas d’un État, peut frapper n’importe où, n’importe quand et n’importe comment. Contrairement à la guerre froide (1945-1991) où les objectifs des SR étaient de grande taille (capacités militaires et économiques adverses), la menace est devenue diffuse. Les renseignements d’origines humaine, technique et satellitaire ne suffisent plus. Il s’agit de détecter les « signaux faibles », cachés probablement au fond d’un ordinateur qui n’est pas connecté à internet. En outre, devant le développement exponentiel de la téléphonie mobile (courriels compris), les défis majeurs résident dans le tri de l’information et la capacité d’analyse. Pour l’opinion publique française, les SR, outils indispensables de l’État, sont devenus des « réducteurs d’incertitude » face à une menace non identifiable.

« Mutation » des SR. Le Livre blanc 2008 sur la défense et la sécurité nationale mentionne la nouvelle fonction stratégique « connaissance et anticipation », au même titre que « dissuasion », « protection », « prévention » et « intervention ». Est également créée la communauté du renseignement, qui regroupe 6 SR : Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), Direction du renseignement militaire et Direction de la protection et de la sécurité de la défense rattachées au ministère de la Défense ; Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, police nationale) ; Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (ministère de l’Économie) ; Tracfin (encadré, ministère des Finances). En 2014, le président de la République et le gouvernement ont engagé des mutations juridique et capacitaire des SR, indique Jean-Jacques Urvoas. Un budget supplémentaire de 425 M€ financera les équipements et le fonctionnement. Les effectifs, actuellement de 12.000 personnes, seront renforcés de 1.300 postes. A titre de comparaison, les SR américains emploient 80.000 personnes et les SR britanniques 30.000. En raison de la montée en puissance du terrorisme, le renseignement intérieur a été restructuré. La DCRI a été transformée en « Direction générale de la sécurité intérieure » (DGSI). Le recrutement, auparavant constitué à 66 % de fonctionnaires de police (formation juridique) est ouvert, par des contrats de 3-4 ans, aux informaticiens, mathématiciens (cryptage), traducteurs et analystes financiers. Le maillage territorial est reconfiguré en fonction du risque estimé. La DGSI a accès directement au ministre de l’Intérieur et peut coopérer plus facilement avec la DGSE. Elle peut établir des partenariats avec : la Préfecture de police de Paris pour les recherches sur l’immigration clandestine, les infractions à l’emploi d’étrangers, le terrorisme et l’action violente ; le Service central du renseignement territorial, né en mai 2014, pour le travail de détection en amont de dérives sectaires et de repli identitaire dans les quartiers difficiles ; la sous-direction à l’anticipation opérationnelle de la Gendarmerie nationale, qui dispose de brigades aux échelons départemental, régional et zonal ; le Bureau du renseignement pénitentiaire. En matière d’écoutes téléphoniques, les fichiers de Google et d’Amazon sont plus performants que ceux de la DGSI. En outre, les terroristes, se sachant sur écoutes, ne disent rien au téléphone et ne se parlent que chez eux. Leur domicile doit donc être « sonorisé » et leur véhicule suivi grâce à la pose de balises. Enfin, la loi va bientôt obliger les sociétés étrangères de téléphonie, comme Skype, à coopérer. L’emploi de ces moyens sera validé par une commission de contrôle avec des ingénieurs chargés de la vérification technique, précise Jean-Jacques Urvoas. Enfin, en matière d’espionnage industriel et de pillage de savoir-faire des entreprises, les plus grands prédateurs se trouvent parmi les pays alliés proches, souligne-t-il.

Loïc Salmon

Le renseignement, clé pour la connaissance et l’anticipation

Renseignement : importance croissante en France depuis la première guerre mondiale

Renseignement : cadre législatif à améliorer, selon la DPR

Le service de renseignement financier « Tracfin », qui dépend du ministère des Finances, compte une centaine dagents. Le département de lanalyse du renseignement et de linformation assure lintégration, lenrichissement et la valorisation de linformation. Il entretient des relations avec les professionnels déclarants et les services étrangers homologues. Le département des enquêtes recherche notamment les fraudes financières en matière de jeux et de transferts dargent. La cellule danalyse stratégique exploite les informations disponibles, afin didentifier les tendances en matière de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. Une cellule spécifique traite les affaires de financement du terrorisme. Le pôle juridique et judiciaire assure aussi une mission dexpertise. La mission « système dinformation » est chargée du fonctionnement et des évolutions des systèmes informatiques de Tracfin.  




Exposition « Churchill-De Gaulle » aux Invalides

Cette exposition retrace les destins, hors du commun, de ceux qui ont incarné la résistance pendant le second conflit mondial et dirigé leur pays au début de la guerre froide : Winston Churchill (1874-1965) en Grande-Bretagne et Charles De Gaulle (1890-1970) en France.

A cette occasion, le musée des blindés de Saumur a prêté deux chars de 1940, placés de chaque côté de l’entrée du porche de la façade des Invalides. Le char lourd français BI bis a équipé les bataillons commandés au feu par le colonel De Gaulle. Le nouveau char lourd britannique Matilda II affrontera plus tard l’Afrikakorps du maréchal Rommel. Deux halls retracent le contexte historique. Extraits d’actualités cinématographiques et documents sonores font revivre le général français « à titre temporaire » et le « bouledogue » britannique. L’exposition commence avec l’enfance de ces chefs et se termine par leurs obsèques présentées simultanément, solennelles pour Churchill (30 janvier 1965) et très simples pour De Gaulle (12 novembre 1970). Leur existence aura été partagée entre le métier des armes, la politique et l’écriture.

Les soldats. Le lieutenant Winston Churchill choisit la cavalerie à sa sortie de l’École royale militaire de Sandhurst. Il reçoit le baptême du feu en 1895  à Cuba…au service des forces loyalistes espagnoles pour mater une révolte ! Deux ans plus tard, il sert dans le Nord de l’Inde et obtient son premier commandement au feu contre des tribus afghanes. Pendant la guerre des Madhistes au Soudan, il prend part à la bataille d’Omdurman (2 septembre 1898), l’une des dernières charges de cavalerie de l’histoire militaire britannique. Il participe ensuite à la très meurtrière guerre des Boers (1899-1900) contre l’État libre d’Orange et la République du Transvaal. Capturé, il parvient à s’évader et à rejoindre l’unité de cavalerie « South African Light Horse ». Sa tête est même mise à prix par les Boers pour 25 £, somme importante pour l’époque. Premier lord de l’Amirauté en 1914, Churchill doit démissionner l’année suivante après la bataille désastreuse des Dardanelles. Il revêt alors l’uniforme de lieutenant-colonel pour se battre dans les tranchées des Flandres. Il y rencontre son cousin, le 9ème duc de Malborough. Tous deux échappent à la mort au cours d’un bombardement et gravent leurs initiales sur un éclat d’obus. A l’été 1940, Churchill, Premier ministre, met sur pied un service secret d’action subversive, le « Special Operations Executive » (SOE), composé de deux sections : la « F » avec une organisation et un commandement uniquement britanniques ; la « RF » pour coopérer avec son homologue gaulliste, le « Bureau central de renseignements et d’actions » (BCRA). Entré à Saint-Cyr en 1908, le lieutenant Charles De Gaulle est affecté en 1912 au 33ème Régiment d’infanterie, commandé par le colonel Philippe Pétain. Il reçoit le baptême du feu à la bataille de Dinant, en 1914. Blessé pour la  troisième fois à Verdun en 1916, il est capturé par les Allemands. Malgré cinq tentatives d’évasion, il reste prisonnier jusqu’à la fin de la guerre. Dans les années 1920 et 1930, il sert en Pologne, dans l’armée française du Rhin et au Levant. Devenu colonel, il ne parvient pas à faire adopter son projet de corps blindé mécanisé par sa hiérarchie. Après l’appel du 18 juin 1940, le tribunal de Clermont-Ferrand le condamne par contumace « à la peine de mort, à la dégradation militaire et à la confiscation de ses biens » (2 août).

Les hommes politiques. Élu député du parti Conservateur en 1900, Churchill occupe divers postes ministériels importants, avant et après la Grande Guerre, jusqu’en 1929. A nouveau Premier lord de l’Amirauté en 1939, il devient Premier ministre en 1940. En juin, il rencontre De Gaulle, alors sous-secrétaire d’État à la Guerre et à la Défense nationale dans le gouvernement Raynaud et envoyé à Londres pour négocier l’aide britannique, afin de pouvoir continuer la guerre. A l’annonce radiodiffusée de l’armistice français, Churchill l’autorise à utiliser le micro de la BBC pour lancer un appel à la résistance. Les deux hommes concluent un accord sur la constitution de la « France Libre », mouvement militaire et entité politique représentant la France, avec son siège à Londres. La plupart des volontaires français combattent aux côtés des armées britanniques. A Brazzaville, De Gaulle institue un « Conseil de défense de l’Empire », afin d’établir des relations d’État à État avec le gouvernement britannique. L’image de chacun se dessine. Churchill se caractérisera par le chapeau, le gros cigare, le nœud papillon et le pistolet mitrailleur. Quant à De Gaulle, sa voix entendue régulièrement à la BBC sera vite associée à un général en uniforme. Malgré le bombardement de la flotte française de Mers-El-Kébir par la Marine britannique (3 juillet 1940) et l’échec de la tentative de ralliement de Dakar par une flotte anglo-française libre (23-25 septembre), Churchill et De Gaulle conservent leur confiance réciproque. Par la suite, leurs relations seront tendues et même au bord de la rupture. Finalement, grâce à l’unification de la Résistance et au soutien populaire, De Gaulle s’impose et écarte le risque d’une guerre civile en France. En 1944, celle-ci se voit attribuer une zone d’occupation en Allemagne. Le 26 juillet 1945, Churchill perd les élections. Six mois plus tard, De Gaulle démissionne du gouvernement provisoire de la République française. Le premier revient au pouvoir de 1951 à 1955 et le second de 1958 à 1969.

Les écrivains. Contre tous les usages, Churchill mène une double carrière d’officier et de correspondant de guerre pendant cinq ans (1895-1900). Ses articles assurent sa renommée en Grande-Bretagne et lui inspirent la rédaction de plusieurs livres, dont il tire l’essentiel de ses revenus. Après 1945, il écrit le premier tome de « La seconde guerre mondiale », qui en comptera six. Il reçoit le prix Nobel de littérature en 1953. De Gaulle publie son premier livre en 1938 : « La France et son armée », rédigé dix ans plus tôt à la demande du maréchal Pétain. Il se remet à l’ouvrage après la guerre et publie ses « Mémoires de guerre » entre 1954 et 1959. Churchill travaille avec une équipe de chercheurs et dicte, la nuit, à sa secrétaire qui tape à la machine. De son côté, De Gaulle écrit à la main et rature beaucoup. Deux ou trois personnes effectuent des recherches et vérifient l’exactitude des événements. Sa fille Élisabeth tape l’épreuve finale, qu’il aura réécrite… plus lisiblement !

Loïc Salmon

Churchill De Gaulle

Parachutée au clair de lune

L’exposition « Churchill-De Gaulle » (10 avril-26 juillet 2015), organisée par le musée de l’Armée avec le concours de la Fondation Charles De Gaulle, se tient aux Invalides à Paris. Elle rassemble photos, tableaux, documents, affiches, lettres, uniformes, appareils et objets provenant notamment du Churchill Archives Centre de Cambridge et du musée de l’Ordre de la Libération. Parallèlement, ont été programmés : des conférences en avril et mai ; un cycle cinématographique « Churchill-De Gaulle » du 4 au 8 juin ; des concerts d’avril à juin dans la cathédrale Saint-Louis des Invalides, pour rappeler la fin de  la seconde guerre mondiale et découvrir les grands compositeurs du XXème siècle, de Benjamin Britten au « Beatle » Paul Mc Cartney. Renseignements : www.musee-armee.fr




Jour-J

Cette bande dessinée, composée d’histoires complémentaires, fait revivre le grand débarquement du 6 juin 1944 en Normandie, avant, pendant et après, vu surtout par des soldats ou sous-officiers britanniques.

Il s’agit de la traduction de 12 numéros petit format de 64 pages d’une même série, publiée chaque semaine depuis juillet 1961 et intitulée « Commando ». Ce terme mythique, qui remonte à la guerre des Boers en Afrique du Sud (1899-1902), désigne les actions de guérilla et de raids des Afrikaners contre l’armée britannique. Les titres de ces récits, captivants et émouvants, parlent d’eux-mêmes : « Embuscade à l’aube », une opération spéciale avec la Résistance française ; « La batterie », autre opération spéciale mettant en lumière la psychologie de conscrits de divers horizons ; « Saut sur la Normandie » de parachutistes américains, qui seront aidés par des soldats russes enrôlés de force dans la Wehrmacht ; « Au mauvais moment, au mauvais endroit », quand un accident dû à de mauvaises conditions météorologiques met en péril l’opération « Overlord » (nom de code du débarquement) 2 jours avant le Jour J ; « Big Joe », le champion de boxe qui n’oublie pas sa spécialité, même au combat ; « Le sang des héros » ou la témérité de fils trop jeunes pour se battre comme leurs pères ; « Les diables rouges », ces parachutistes britanniques au béret rouge qui sèment la terreur chez l’ennemi ; « Opération bulldog », une histoire de chiens comme son nom l’indique ; « La meute des loups », commandos qui traversent la Manche à bord d’une péniche de débarquement le 6 juin ; « L’homme de fer » ou le combattant solitaire ; « le caporal du roi », qui se croit tout permis ; « Les pousse-cailloux », fantassins de la longue bataille de Normandie. Les récits sont émaillés d’utiles fiches techniques : pistolet-mitrailleur britannique Sten et son équivalent allemand Schmeisser ; « Pluto », oléoduc flexible pour acheminer le carburant à travers la Manche ; planeur de transport de troupes ; camion militaire à tout faire ; chasseurs-bombardiers britannique « Mosquito » et américain « Mustang » ; parachutiste britannique avec scooter ou vélo pliant largable avec lui ; homme-grenouille britannique ; torpille chevauchée par 2 hommes et sous-marin de poche britanniques ; char à fascines de branchages pour franchir les fossés et mortier de 290 mm pour percer le béton ; avion britannique d’attaque au sol « Typhoon », pendant du « Stuka » allemand ; le soldat britannique, capable de combattre de façon collective ou seul, face à l’Allemand, très entraîné et discipliné. Ces 12 récits de guerre, rédigés pour la plupart par des anciens combattants qui n’hésitent pas, parfois, à forcer le trait, donnent un aperçu du contexte guerrier de 1944. Ainsi, ils mettent en valeur l’héroïque soldat « anglais », par rapport à l’Écossais toléré, l’Irlandais incapable d’assurer correctement l’intendance et l’Américain condescendant. En face, les soldats allemands sont des brutes épaisses, sauf celui qui sait parler aux chiens, et leurs officiers fanatiques et fourbes, sauf un… qui admire l’esprit chevaleresque d‘un homologue anglais ! Ces récits témoignent aussi de la société militaire britannique des années 1940. Les officiers subalternes sont arrogants ou à peine compétents, sauf ceux sortis du rang bien entendu ! Seuls les officiers supérieurs, plus éloignés de la troupe, apparaissent responsables et expérimentés.

Loïc Salmon

Provence 1944

JU 87 « Stuka »

« Jour-J » bande dessinée britannique Commando. Éditions Pierre du Taillac, 780 pages.19,90 €




Armée de Terre : professionnalisme et inquiétude

L’armée de Terre, malgré la réduction de son format, peut remplir ses missions, y compris en coopération. Toutefois, les difficultés budgétaires pourraient l’empêcher de tenir son rang dans la durée.

Telle est l’opinion exprimée, le 11 juillet 2012, par son chef d’état-major, le général d’armée Bertrand Ract-Madoux, devant l’Association des journalistes de défense.

Seules, les opérations de guerre, comme en Afghanistan et en Libye, nécessitent l’engagement d’hélicoptères de combat. En Afghanistan, ils servent à l’appui des unités terrestres et au ramassage des blessés. Il en restera probablement quelques uns sur place après le retrait des troupes fin 2012. « Nos hommes sont courageux et se sont montrés intelligents quand il a fallu s’adapter à une évolution de la stratégie depuis un an ». Les talibans ont abandonné le combat frontal au profit des attaques suicides et des tirs fratricides, qui affectent le lien de confiance entre les troupes afghanes et internationales. Le Service de santé français soigne beaucoup de civils… qui constituent 90 % des pertes ! Les talibans, qui ne tiennent pas à la vie, tirent de façon aveugle. Par ailleurs, pour éviter leur infiltration dans les troupes régulières, les autorités afghanes font converger les activités de leurs services pour filtrer le recrutement. En outre, des soldats français participent directement à la sécurité des instructeurs français. En Libye, même s’il n’y a pas eu officiellement de troupes engagées au sol, 15 hélicoptères et 200 hommes ont participé à l’opération « Harmattan ». Ils ont détruit 600 objectifs de nuit, au cours de raids effectués au ras du sol. « On a eu beaucoup de chance de ne déplorer aucune perte », bien que les équipages soient entraînés à agir en toute discrétion et avec des appareils de vision nocturne. Toutefois, une opération purement aérienne ne donne qu’un résultat partiel, estime le général Ract-Madoux qui ajoute : « Tous les conflits commencent à terre et finissent à terre ». Au Sahel, l’armée de Terre n’a pas été sollicitée pour une planification d’ampleur, qui relève du chef d’Etat-major des armées. Il n’y a guère de communication officielle sur cette région, où sont impliqués les forces spéciales, les services de renseignement et un dispositif diplomatique permanent. La planification d’une opération terrestre serait très complexe en raison des grandes distances à parcourir dans le désert malien, milieu extrêmement difficile. Enfin, une mission en Syrie, entreprise sous mandat de l’ONU, serait plutôt humanitaire au sens large (1), donc très différente d’une intervention offensive consistant à combattre l’un des protagonistes.

Le modèle de l’armée de Terre ne devrait pas connaître de rupture, vu l’absence de bouleversements stratégique depuis 2008. Elle prépare tous les types de missions pour répondre aux besoins exprimés par une organisation internationale ou un pays ami, qui demanderait du secours ou un coup de main. Toutefois, elle va perdre de la visibilité en France, car ses effectifs vont descendre à 100.000 personnels sur une population de plus de 60 millions d’habitants. Elle aura perdu 25.000 postes entre 2008 et 2015 et en aura transféré autant dans les services interarmées. Les économies budgétaires, déjà entreprises depuis quelques années, vont toucher les flux : fonctionnement, soutien et effectifs. « Ce sera très difficile et douloureux, car nous sommes arrivés à un plancher en termes de fonctionnement et d’activités et on devra saupoudrer (les économies) partout ». Faute de capacité logistique (stocks et disponibilité) suffisante, il n’est guère possible de tenir dans la durée les exigences du Livre blanc 2008 sur la défense et la sécurité nationale. Les troupes régulières doivent pouvoir participer à la reconstruction d’un pays… après une phase très dure de combats ! Les forces spéciales doivent alors être ramenées et utilisées en va-et-vient. Quoiqu’intégrant des éléments de la Marine et de l’armée de l’Air, celles-ci complètent les forces terrestres. Par ailleurs, les armes capables de détruire à distance ne suffisent pas pour gagner sur le terrain, souligne le général Ract-Madoux.

La coopération fonctionne bien avec les armées de Terre italienne, allemande et britannique. Des projets sont en cours avec la Grande-Bretagne, en vue de pouvoir engager une force terrestre de deux brigades sous un commandement commun. Les procédures opérationnelles et la langue de travail (l’anglais) sont les mêmes, quoique l’interconnexion des systèmes d’information présente encore des difficultés. Des équipements communs sont à l’étude : drones et canons de 40 mm pour les futurs véhicules blindés. Les drones tactiques correspondent en effet aux besoins des deux armées. Les SDTi (système de drone tactique intérimaire) français ont quitté l’Afghanistan début juillet, après un travail qualifié d’exceptionnel. Les images de certains engagements serviront à préparer les engagements futurs dans de bonnes conditions.

Les réserves devraient être appelées à jouer un rôle accru dans les deux armées. Elles totalisent 10.000 personnels pour une armée de 82.000 militaires d’active en Grande-Bretagne, contre 16.000 pour 100.000 hommes en France. Or, constate le général Racht-Madoux, les réservistes sont surtout des fonctionnaires, car les contreparties accordées aux entreprises ne suffisent pas à compenser leurs pertes occasionnées par les absences temporaires de leurs personnels partis en périodes. Beaucoup de réservistes du secteur privé ne peuvent donc en effectuer que pendant leurs vacances. Il faudrait une adaptation législative et un budget suffisant, alors qu’aujourd’hui il est inférieur à 50 M€ par an. De plus, les crédits des réserves sont rognés après chaque crise. Enfin, souligne le chef d’état-major de l’armée de Terre, « sans garantie de crédits, on ne peut faire de grands projets ».

Loïc Salmon

(1) Un groupement médico-chirurgical est opérationnel à la frontière jordano-syrienne depuis le 14 août.

Le général d’armée Bertrand Ract-Madoux est chef d’état-major de l’armée de Terre depuis le  1er septembre 2011. A sa sortie de l’Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr en 1972, il choisit l’arme blindée et cavalerie. Breveté d’études militaires supérieures, il est auditeur du Centre des hautes études militaires et de l’Institut des hautes études de défense nationale. Il a notamment commandé le 1er Régiment de spahis (1995), le Bataillon N°2 de l’IFOR en ex-Yougoslavie (février-juin 1996) et la 2ème Brigade blindée (2002). Au cours de cette dernière affectation, il a assuré le commandement tactique  des forces françaises en Côte d’Ivoire (octobre 2003-février 2004) dans le cadre de l’opération Licorne. Enfin, il a été le « numéro deux » de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) pendant quatre ans (2007-2011). Titulaire de la croix de la Valeur militaire avec deux citations, le général Ract-Madoux est commandeur de la Légion d’Honneur et de l’Ordre national du Mérite. Bernard Fanucchi (à droite) est président de l’Association des journalistes de défense.




Combat en zone urbaine : au cœur des engagements actuels

L’armée de Terre dispose d’un « Centre d’entraînement aux actions en zone urbaine » (Cenzub), unique en Europe. Le 28 novembre 2012 au camp de Sissonne (Aisne), elle a organisé une démonstration dynamique devant la presse et des parlementaires des commissions de Défense de l’Assemblée nationale et du Sénat. Pendant une heure, un sous-groupement tactique interarmes (SGTIA) a mis en œuvre drones, hélicoptères, blindés légers et lourds, mortiers et fantassins et pris d’assaut une zone urbaine représentant une ville de 5.000 habitants. Le SGTIA, commandé par un capitaine, regroupe près de 200 hommes et 30 blindés et peut faire appel aux hélicoptères de l’Aviation légère de l’armée de terre. Le Cenzub peut accueillir, en même temps et pendant deux semaines, deux SGTIA qui mettent en pratique les spécificités de ce type de combat. La formation dispensée s’enrichit des retours d’expériences des armées françaises et alliées sur les théâtres d’opérations extérieurs en milieu urbain avec ses menaces spécifiques, dont les engins explosifs improvisés et attaques-suicides. En outre, les types d’engagement les plus probables sont étudiés. Les stagiaires s’entraînent au combat en espace confiné (distances d’engagement de 0 à 100 m, milieu très cloisonné, pièces fermées et zones obscures) et en zone habitée (impacts juridique et d’influence). Ils apprennent à réduire au maximum les pertes dans ce type de combat particulièrement meurtrier. Le Cenzub, où viennent déjà s’entraîner les armées allemande et britannique, doit accueillir un SGTIA des Emirats arabes unis en mai 2013.

Loïc Salmon




Le sous-marin nucléaire d’attaque : aller loin et durer

Le sous-marin à propulsion nucléaire d’attaque (SNA), capable de rester longtemps sur un théâtre lointain, est un projecteur de puissance contre la terre avec le missile de croisière naval et un projecteur de forces pour les opérations spéciales.

Le SNA peut aussi sécuriser un porte-avions et son escorte, devenus trop rapides pour les sous-marins à propulsion diesel-électrique, qui restent quand même une menace sérieuse. Son évolution future a fait l’objet d’une table ronde organisée, le 18 décembre 2012 à Paris, par le Centre d’études supérieures de la marine. Y ont notamment participé : le vice-amiral d’escadre Charles-Edouard de Coriolis, commandant des Forces sous-marines et de la Force océanique stratégique ; les ingénieurs en chef de l’Armement Christian Dugué et Yannick Le Yaouanc de la Délégation générale de l’armement ; le capitaine de vaisseau Marc Ginisty de l’état-major de la Marine ; Christian Dufour du groupe d’armement naval DCNS.

L’opérationnel et le technique. La Russie envoie des SNA dans le Pacifique. L’Inde a loué deux SNA russes de type « Akula » et prépare un projet national. La Chine a construit une nouvelle base navale dans l’île de Haïnan pour que les siens aient accès aux eaux profondes. La Marine française souhaite des « modules » pour ses SNA, en vue de s’adapter à l’évolution des menaces et d’avoir la capacité de s’en prémunir. Ainsi, pour arriver en océan Indien, il faut 17 jours à un SNA de type « Rubis » conçu, pendant et pour la guerre froide (1947-1991), pour la lutte anti-sous-marine et anti-navire de surface ainsi que le renseignement. Sa puissance repose sur sa capacité à durer sur zone,  sa capacité de feu, la qualité de ses capteurs, sa capacité à communiquer et agir dans un cadre interallié. Sa capacité à durer dépend de sa coque, son énergie électrique, son réacteur nucléaire et sa faible vulnérabilité. La capacité de feu du SNA français va augmenter avec l’élargissement du panel de ses armes : aujourd’hui les torpilles et l’embarquement de forces spéciales, demain les drones et le missile de croisière naval pour des frappes en profondeur contre la terre. Or, ces armes, même prévues, vont évoluer selon leur propre cycle de vie. Les capteurs et moyens de communication sont modifiés en permanence et consomment beaucoup d’électricité pour être efficaces et discrets. Ainsi, le sonar, destiné à l’origine à la détection de bâtiments, sous-marins et mines ainsi qu’au guidage des torpilles, intervient aussi dans la navigation en zone littorale peu profonde. Les « mâts » du SNA ne sont plus constitués d’un simple périscope, mais abritent plusieurs capteurs (antennes, radar et caméras numérique et infrarouge) et les systèmes de pointage. D’un poids total de près d’une tonne à hisser de 5 à 10 m discrètement pour ne pas être repérés, ils doivent programmer, capter et analyser en quelques secondes. En fin de compte, les SNA français se sont révélés des outils adaptables et d’emploi flexible sur le long terme. Vu que la durée de vie d’un bâtiment en général peut dépasser celle d’une entreprise ou du moins de sa stratégie, un ingénieur en verra peut-être deux au cours de sa carrière, mais n’en construira qu’un ! En conséquence, il s’agit de prévoir des marges d’évolution des matériels qui, de plus, ne dureront pas de la même façon à bord.

Le programme Barracuda. En vue de déploiements lointains de longue durée, les SNA français devront accroître leur autonomie et la redondance de leurs équipements et aussi  regrouper leurs périodes de maintenance. Leur vie passera de 35 ans pour ceux du type Rubis (74 m de long, 2.600 t) à plus de 40 ans pour ceux du type Barracuda (100 m, 5.000 t). Le premier SNA de nouvelle génération entrera en service actif en 2017 et le  sixième le quittera… vers 2070 ! Chacun sera équipé d’une liaison tactique performante, dérivée de celle des nouvelles frégates multi-missions et adaptée à ses antennes pour le débit (système de données) et les vacations (réception des informations). Afin de pouvoir embarquer des équipements plus grands, l’équipage sera restreint à 60 hommes au lieu de 70 actuellement. Comme les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins de la Force océanique stratégique, chaque Barracuda pourra partir 90 jours d’affilée et disposera de deux équipages qui se relaieront, non au port d’attache, mais dans un port d’appui. Le futur SNA pourra ainsi être projeté très loin pendant six mois. En outre, il aura la capacité d’embarquer 15 passagers, dont deux équipes de nageurs de combat avec leurs propulseurs sous-marins pour effectuer des opérations spéciales à terre. Il sera équipé de mines, du missile anti-navire SM 39, de la prochaine torpille lourde F21 et du futur missile de croisière naval d’environ 1.000 km de portée. Le programme Barracuda, lancé par la Direction générale de l’armement en 1998, est en cours de réalisation par le groupe naval DCNS, qui y mobilise 2.000 personnes dans ses différents sites : Cherbourg pour la coque et la structure d’intégration d’ensemble ; Indret pour la chaufferie et l’appareil moteur ; Toulon pour le système de combat ; Ruelle pour les mécaniques d’armes et de conduite. Les quatre sites participent à l’ingénierie. Le groupe industriel Areva  traite la partie nucléaire. Les travaux ont déjà commencé sur la première série de trois submersibles dénommés Suffren, Duguay-Trouin et Tourville. Enfin, le SNA, qui doit aller là où il se passe quelque chose, souligne l’amiral de Coriolis, occupe une fonction stratégique pour la connaissance et l’anticipation. Il recueille en effet des renseignements d’origines acoustique, électromagnétique et optique, fusionne les données dans la durée et les synthétisent. Il se positionne au plus près des sources, sans que sa présence les alerte et modifie leurs comportements. Ainsi, lors de l’intervention de l’OTAN en Libye en 2011, un SNA français est resté 95 % du temps en immersion périscopique, en zone littorale et par petit fond.

Loïc Salmon

Même si elle ne dispose que de SNA, la France a construit pour l’exportation des sous-marins à propulsion diesel-électrique (SMD) du type « Scorpène » : 4 au Brésil, 2 au Chili, 6 en Inde et 2 en Malaisie. Leur propulsion indépendante de l’air (AIP) leur permet des plongées plus longues et améliore leurs performances : vitesse maximale, 20 à 21 nœuds (37/38 km/h) ; autonomie à 19 ou 20 nœuds, 2 à 3 heures ; autonomie à 3 ou 4 nœuds, 15 à 20 jours au lieu de 5/6 j pour les SMD dépourvus d’AIP ; distances franchissables à 8 ou 9 nœuds, 12.000 milles nautiques (plus de 22.000 km). Un SMD AIP, parti de France, peut rallier la Libye en 6 jours, la Syrie en 13 j et la Somalie (environ 3.000 milles) en 24 j et rester 15 j environ sur zone. Par contre, un SNA de type « Rubis », actuellement en service, atteint la Libye en 5 j, la Somalie en 11 j et le détroit de Malacca (6.000 milles) en 17/18 j et reste environ 30 j sur zone. Le futur SNA de type « Barracuda » arrivera dans le golfe Arabo-Persique (5.000 milles) en 10 j et en mer de Chine (7.000 milles) en 19/20 j et pourra rester plus de 40 j sur zone. Enfin, il bénéficiera des dernières études réalisées pour le Scorpène en matière d’invulnérabilité acoustique.




Sauvetage de combat : l’apprentissage des médecins

Les médecins généralistes des armées doivent être capables d’évaluer les blessés graves au plus près du conflit, de les prendre en charge et de faciliter leur évacuation sur un hôpital de campagne. Leur préparation opérationnelle a été présentée à la presse, le 5 avril 2012 à Paris, par le médecin général inspecteur Maurice Vergos, directeur de l’Ecole du Val-de-Grâce.

Depuis la guerre du Golfe (1991), les médecins apprennent  à appliquer automatiquement, en milieu hostile et en situation dégradée, les gestes d’urgence adaptés aux circonstances. L’apprentissage s’articule sur trois niveaux : minimiser les conséquences des erreurs commises ; réévaluer ses actes et ceux des autres ; éviter les erreurs futures par la préparation, l’anticipation et la formation. Le sauvetage de combat nécessite aussi de savoir utiliser les transmissions, pour demander du secours dans un cadre multinational, et de savoir se servir d’une arme, pour défendre les blessés ou soi-même en cas d’agression. Toutefois, le médecin n’est pas un combattant, rappelle le directeur de l’Ecole du Val-de-Grâce. La mise en condition de projection sur un théâtre d’opérations comprend des préparations « santé » et « militaire ». Le futur médecin commence par étudier six ans à l’Ecole de santé des armées de Lyon-Bron, qui regroupe les Ecoles du service de santé des armées de Bordeaux et de Lyon depuis le 2 juillet 2011. Sa formation initiale générale militaire inclut l’école du soldat, le tir et les stages parachutiste et de plongeur. Puis, il va passer trois ans à l’Ecole du Val-de-Grâce en stages hospitaliers dans différents services : urgences civiles (bloc opératoire, service des brûlés et accidents de la route avec le sapeurs pompiers de Paris) ; blessures de guerre d’origine nucléaire, radiologique, biologique ou chimique ; blessés psychiques à identifier, à isoler rapidement, pour qu’ils ne perturbent pas l’équipe soignante, et à évacuer. Des exercices d’opération sanitaire ont lieu sur le terrain, notamment l’échographie d’urgence en cas de situation isolée. Parallèlement, s’effectue une formation continue d’adaptation aux milieux terrestre, aérien et maritime. Le sauvetage de combat prend en compte tous les retours d’expériences. Dans ce domaine, l’Ecole du Val-de-Grâce dispense trois types d’enseignements : une formation initiale spécialisée, des techniques de réanimation de l’avant et la médicalisation en milieu hostile. L’entraînement collectif est validé au sein du détachement d’assistance opérationnelle du camp militaire de Canjuers (Var). Pour sauver le maximum de monde au cours d’une opération, les médecins s’habituent à l’urgence collective. Ils doivent pouvoir donner des informations précises sur l’état de gravité des blessés, en vue de leur évacuation. Les outils de simulation  apprennent à demander les moyens d’évacuation appropriés. En 2011, environ 220 médecins ont participé à plus de 80 stages de préparation opérationnelle santé. Les auxiliaires de santé effectuent également des stages de sauvetage de combat.

La guerre en Afghanistan constitue aujourd’hui le principal terrain d’application. Le médecin soigne les blessés sans distinction. Ses camarades de combat se sont assurés au préalable qu’un taliban blessé et hospitalisé ne constitue plus une menace. Dans l’ensemble, les équipes de liaison et de tutorat opérationnel (OMLT, sigle OTAN) de la Force internationale d’assistance et de sécurité, destinées à conseiller les unités militaires afghanes, disposent de binômes médecin généraliste/infirmier. Toutefois, la ressource étant insuffisante, l’un des membres du binôme se retrouve parfois seul. Les médecins doivent donc savoir former des auxiliaires à la demande. Les spécialistes sont en général affectés à l’hôpital militaire de Kaboul et les réservistes, également spécialisés, à l’aéroport international. Des médecins afghans sont envoyés en formation en France et certains peuvent préparer l’agrégation à l’Ecole du Val-de-Grâce. Par ailleurs, les médecins féminins effectuent les mêmes formations et entraînements que leurs collègues masculins et leurs affectations dans les OMLT ne posent guère de difficultés, indique le médecin général Vergos. Vu le nombre croissant d’étudiantes à l’Ecole de santé des armées, le corps médical militaire français sera bientôt féminisé à 50 %.

« Les stages de préparation opérationnelle avant projection sont indispensables pour les techniques de réanimation de l’avant, conclut le directeur de l’Ecole du Val-de-Grâce, la qualité de la formation est validée par les retours d’expérience. Cet outil de formation a fait la preuve de son efficacité ».

Loïc Salmon

Les militaires gravement blessés au combat doivent être pris en charge en moins d’une heure, avant leur évacuation en métropole. Parmi eux, certains seront amputés. D’ici à 2014, une quinzaine d’amputés d’une main ou d’une jambe vont recevoir des prothèses articulées, actuellement en dotation dans les armées américaine et canadienne. Les « « mains » permettent un mouvement complet de l’articulation du poignet et les « genoux » une marche régulière et la prise en compte d’obstacles. Ces prothèses de dernière génération, d’un coût d’environ 55.000 € pièce, sont financées par un fonds exceptionnel alimenté en majorité par la Caisse nationale militaire de sécurité sociale et l’Office des anciens combattants et victimes de guerre et complété par l’entraide des associations « Solidarité défense » et « Terre fraternité ».




État-major des armées : un chef, une mission et… au-delà

L’outil militaire doit conserver les moyens des ambitions de la France dans la durée. Ses succès sur le terrain doivent se compléter par des avancées en matière de développement, de gouvernance, d’éducation ou de justice.

Telle est l’opinion du général Pierre de Villiers, chef d’État-major des armées (CEMA), exprimée le 30 janvier 2015 à Paris, lors d’une rencontre avec l’Association des journalistes de défense.

Opérations rapidement évolutives. « L’accélération du temps, conjuguée à l’extension de l’espace, est un facteur essentiel pour gagner au combat », déclare le CEMA. Guerre, combat et victoire sont des notions à réactualiser en permanence aujourd’hui et probablement plus vite qu’auparavant. Les crises se sont mondialisées dans les domaines du recrutement des combattants et de leur formation, du financement des actions et de la propagande. «  L’internationalisation du djihadisme est la plus récente illustration de cette contagion des crises avec ses répercussions sur les théâtres nationaux ».  Par ailleurs, la violence ne s’exprime plus uniquement dans les institutions étatiques et ne se confine plus à l’intérieur des frontières. « Aujourd’hui, certains États se comportent parfois comme des bandes armées et des bandes armées comme des États ». C’est notamment les cas de l’organisation djihadiste Daech, autoproclamée « État islamique de l’Irak et du Levant » ou simplement « État islamique » et qui a conquis une partie des territoires syrien et irakien. Le lien entre les sécurités intérieure et extérieure se renforce : «  La violence s’exporte, le terrorisme se franchise ». Le retour en France de ressortissants français et européens, partis faire la guerre en Syrie et en Irak, est une composante des menaces terroristes au Sahel et au Proche-Orient. Les opérations extérieures constituent la « défense de l’avant ». Les moyens militaires sont affectés en priorité au Sahel, où l’autorité des forces françaises est reconnue par les unités des pays africains et occidentaux sur zone. L’opération « Barkhane » y déploie : 3.000 militaires ; 20 hélicoptères ; 6 avions de chasse ; 4 drones ; 200 véhicules blindés ; 200 véhicules logistiques ; 7 avions de transport tactique et stratégique. Le CEMA entretient des liens étroits avec ses homologues du G5 du Sahel pour le développement et la sécurité, créé en février 2014 : Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad. En revanche, la France est équipière dans la coalition menée par les États-Unis contre Daech. Lancée le 19 septembre 2014, l’opération « Chammal », conduite en coordination avec les Alliés, fournit un appui aérien aux forces armées irakiennes au sol par des missions de renseignement, reconnaissance armée et contrôle aérien. Placées sous contrôle opérationnel de l’amiral commandant la zone océan Indien et son état-major interarmées, les forces françaises de « Chammal » regroupent : 600 militaires ; 15 avions de chasse ; 1 avion de ravitaillement en vol C135-FR ; 1 avion de patrouille maritime Atlantique 2. L’objectif de « Barkhane » et de « Chammal » est d’empêcher toute connexion entre les organisations terroristes de Daech, d’Al Qaïda, d’Aqmi (Maghreb), de Boko Haram (Nigeria) et de leurs affiliés. La base avancée de Manama (Nord Niger) a été installée pour gêner leur liberté d’action par des actions transfrontalières et de cloisonnement. Sur le territoire national, l’opération « Sentinelle » déploie 10.500 militaires contre le terrorisme dans le cadre du plan « Vigipirate renforcé attentat ». Au niveau mondial, le général de Villiers observe une banalisation de l’usage de la force avec ses limites et les difficultés à la maîtriser. Il constate que le recours à la force militaire redevient un moyen politique en soi et non plus le simple prolongement d’une politique par d’autres moyens. En outre, l’avance technologique, facteur d’ascendant, ne dissuade plus les groupes terroristes. Fanatisés par leur idéal de mort, ceux-ci emploient des moyens bon marché et facilement accessibles : tireurs embusqués ; engins explosifs improvisés ; attaques suicides ; cyber-attaques. Le CEMA indique que les interventions françaises dans les Balkans, en Afghanistan, en Afrique ou ailleurs durent en moyenne 15 ans. Outre une approche globale, la guerre nécessite une adaptation continuelle des moyens à mettre en œuvre et une compréhension rapide de ses nouveautés.

Armées en pleine transformation. Composantes de la résilience de la nation, les forces armées protègent la population, les valeurs et les intérêts vitaux de la France et lui permettent d’assumer ses responsabilités sur la scène internationale, rappelle le général de Villiers. En outre, la menace du terrorisme sur le territoire national est redevenue une réalité, mais elle n’est pas la seule. Les crises récentes renforcent la pertinence du choix d’un modèle complet d’armée, conformément au Livre blanc 2013 sur la défense et la sécurité nationale, et excluent de baisser la garde. Or, les capacités militaires (armement, formation et entraînement des personnels) demandent du temps sur les plans technologique et opérationnel, pour passer de la conception à l’emploi sur le terrain. Chef des opérations et conseiller du gouvernement, le CEMA assume aussi les responsabilités de la programmation militaire, de la transformation des armées et des relations militaires internationales. L’opération « Sentinelle » rappelle la nécessité de disposer de suffisamment de personnels militaires. En conséquence, le président de la République, chef des armées, a décidé de réduire de 7.500 postes les déflations d’effectifs prévus par la Loi de programmation militaire 2014-2019 (LPM) et ce à partir de 2015. Cette loi prévoit des ressources financières, y compris celles dites « exceptionnelles » par la vente de fréquences notamment. Le CEMA entend garder une cohérence entre missions et moyens et entre ressources et besoins, en accord avec les autorités politiques (président de la République et ministre de la Défense). La LPM sera donc actualisée, mais non pas révisée, précise-t-il. Le modèle d’armée sera mis à jour à partir du cadre stratégique actuel et des principaux enseignements des engagements récents.

Loïc Salmon

« Serval » : manœuvre aéroterrestre en profondeur et durcissement de l’engagement

Libye : retour d’expérience de l’opération Harmattan

Résilience : la survie de la collectivité nationale

Le chef d’État-major des armées (CEMA) est secondé par le major général des armées, dont dépendent notamment les sous-chefs d’état-major. Parmi ces derniers, celui chargé des opérations dirige l’action des forces françaises à l’extérieur et à l’intérieur des frontières sous l’autorité du CEMA, définit les objectifs de préparation opérationnelle et rédige les textes réglementaires d’organisation opérationnelle et du retour d’expérience. Le sous-chef « plans » est chargé de la définition du format des armées et leur cohérence capacitaire ainsi que la planification et la programmation. Le sous-chef « performance » est responsable du pilotage, de la transformation et de l’appui « métiers ». Par ailleurs, le CEMA dispose du Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO) pour la gestion des crises en amont (veille stratégique et planification) et en aval (conduite). Lorsqu’une opération est déclenchée, une cellule de crise est créée pour en assurer la conduite.