Exposition photographique itinérante « Femmes de la défense »

Avec 15 % de femmes parmi son personnel militaire en 2012, l’armée française est la plus « féminisée » d’Europe, devant celles de la Grande-Bretagne (9,7 % en 2010) et de l’Allemagne (9,1 % en 2010). Elles servent dans tous les domaines, sauf les sous-marins en raison de la promiscuité à bord. Toutefois, le programme des futurs sous-marins nucléaires d’attaque « Barracuda » prévoit des aménagements pour leur embarquement. Sur les 60.000 femmes du ministère de la Défense, 38 % sont civiles. Les autres, au nombre de 33.000 dans les armées, représentent 6 % des militaires engagés en opérations extérieures. Une exposition photographique itinérante, inaugurée le 29 août 2013 par Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, et Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes et porte-parole du gouvernement (photo), leur est consacrée. Elle en montre 23 dans leur quotidien : pilote de chasse à Saint-Dizier, navigateur en mer Rouge, secrétaire au sein du groupement Terre au Tchad, infirmière militaire en Jordanie, réserviste chef de groupe section Vigipirate à l’aéroport Roissy Charles-De-Gaulle, ingénieur civil expérimentateur navigant à Cazaux, commandant du bâtiment école Panthère à Brest, chef de projet à Paris, gendarme au Bourget, directeur de pont d’envol en océan Indien, mécanicienne armement à Solenzara, chasseur alpin à Paris, commandant supérieur des forces armées en Polynésie française à Tahiti, chef d’équipe appui image drone en Afghanistan, pilote d’hélicoptère à Saillagouse, juriste à Paris, adjoint chef d’escouade transport en Côte d’Ivoire, directeur d’essais à Biscarrosse, convoyeuse de l’air au Mali, chef d’équipe chargée de prévention à Paris, manœuvrier en surveillance maritime au large de la Birmanie, conducteur de chien à Chabeley et… parachutiste en Afghanistan ! Une femme haut fonctionnaire a été nommée à l’égalité des droits en 2012 au sein du ministère de la Défense et un observatoire de la parité établi en 2013 pour appuyer son action. Les femmes peuvent accéder au grade d’officier général : elles sont déjà une dizaine à la Direction générale de l’armement, quelques unes au Service de santé des armées et au Commissariat (service interarmées) et… une dans la Marine ! La voie a été ouverte par le médecin général Valérie André, présente à l’inauguration de l’exposition photographique à l’Hôtel de Brienne (Paris). Résistante et pilote d’hélicoptère, elle totalise plus de 4.200 heures de vol, 129 missions de guerre en Indochine, 365 missions de guerre en Algérie et 7 citations. Titulaire des croix de Guerre 1939-1945 et des Théâtres d’opérations extérieures, de la croix de la Valeur militaire, de la Médaille de l’aéronautique et de la Legion of Merit (Etats-Unis), elle est Grand-Croix de la Légion d’Honneur et de l’Ordre national du Mérite. L’exposition est présentée sur les grilles du 231 boulevard Saint-Germain à Paris, siège du ministère de la Défense et de l’Etat-major des armées. Elle passera notamment à Toulon (15 octobre-7 novembre), Toulouse (7-30 novembre) et Lyon (mars 2014).

Loïc Salmon

Une deuxième femme amirale

Femmes en guerre 1940-1946




Marine nationale : motiver, fidéliser et accompagner

La Marine a entrepris une démarche « marque employeur » par ses actions de recrutement, de communications interne et externe, de suivi du moral, de gestion des carrières, de fidélisation des compétences rares, de formation, de validation des acquis de l’expérience et enfin d’égalité des chances.

Son directeur du personnel, le vice-amiral d’escadre Olivier Lajous, les a présentées au cours d’un atelier organisé, le 20 septembre 2012 à Neuilly (banlieue parisienne), par le cabinet de conseil en recrutement Hudson pour une vingtaine de responsables de ressources humines de grands organismes et entreprises, dont le ministère de la Défense, Valeo, Nespresso, Accor et la Française des Jeux.

Les ressources humaines de la Marine en 2012 se montent à 44.000 personnels, dont 4.000 civils et 15 % de femmes. Chaque année, 3.000 nouveaux y entrent et 3.800 militaires la quittent en raison de la limite d’âge, du non-renouvellement du contrat ou de l’aide au départ. Les unités opérationnelles emploient 21.000 militaires, dont 5.000 sont déployés en permanence et absents 120 jours par an. Après 15 ans de service en moyenne, 80 % des personnels retrouvent un emploi dans l’année qui suit leur départ de la Marine. Une étude sociologique sur dix ans, soit depuis la suspension du service national, a analysé les motivations des nouvelles recrues. Les jeunes en difficulté scolaire y trouvent un refuge et constituent 70 % des « fidélisés ». Ceux qui veulent faire carrière passent différents brevets et certificats qui leur permettent de monter un « escalier social » valorisant. Les « professionnels », désireux d’apprendre un métier, y suivent diverses filières techniques. Enfin, les « illuminés », qui se croient investis d’une mission salvatrice de la nation, sont les plus difficiles à fidéliser, car rapidement déçus dans leurs espérances. L’enquête a aussi porté sur les motifs de départ. Après une dizaine d’années, les jeunes marins sont souvent en couple, puis parents et veulent accéder à la propriété, donc se sédentariser. Pour les gens de 40-50 ans, chargés de famille et ayant contracté des emprunts immobiliers, il s’agit de gagner plus d’argent. En conséquence et afin de fidéliser son personnel compétent et formé à grands frais, la Marine a trouvé une solution au « célibat géographique » métropolitain : pour éviter dix heures de train entre Brest et Toulon en passant par Paris, une navette aérienne quitte l’un des ports le vendredi soir et y revient le dimanche soir. Pourtant, trop fidéliser risque de trop sédentariser. Comment convaincre de changer de métier des gens qui ont encore au moins une dizaine d’années de vie professionnelle devant eux et ne s’estiment pas capables faire autre chose ? C’est le cas d’officiers supérieurs compétents, mais dont l’espoir de finir leur carrière en beauté risque d’être déçu par suite de la sélectivité accrue de l’accès aux fonctions d’officier général. « Il faut prendre le temps de discuter avec eux », souligne l’amiral Lajous.

La formation technique est primordiale. Les cadres reçoivent un complément éthique : tuer ou mourir au nom de la France, intrinsèque au métier militaire, ne doit pas être oublié. Chaque année, la Marine envoie 15.000 marins se former pendant 23 jours en moyenne à plus de 50 métiers et entretenir 1.000 qualifications. Une frégate, un sous-marin nucléaire lanceur d’engins (SNLE) et un porte-avions constituent des ensembles complexes, dont la compréhension et la sécurité des systèmes sont indispensables à l’accomplissement de leurs missions. Ainsi, un pilote de chasse embarquée coûte 1 M€ en formation pour faire décoller et apponter du Charles-De-Gaulle un Rafale de 70 M€ ! Après avoir été largué d’une altitude de 10.000 m, un nageur de combat doit être capable de « palmer » 20 km, remplir sa mission et maintenir un comportement éthique. Les équipages des grands bâtiments de surface, autrefois de l’ordre de 300 membres, sont réduits à 100. Certains métiers évoluent ou vont disparaître. Ainsi, les « météos », chargés d’analyser l’environnement des radars (en l’air) et sonars (sous la mer) reçoivent désormais leurs informations directement du siège de Météo-France à Toulouse, ce  qui n’était pas le cas il y a cinq ans. De jeunes opérateurs sont formés à l’usage des panneaux solaires, qui équiperont les bâtiments de demain. La Marine doit adapter en permanence les métiers dont elle a besoin et en anticiper d’autres, comme les « maintenanciers ».

L’environnement professionnel est d’abord perçu par le témoignage d’un proche. L’engagement ferme peut être motivé par le désir de voyager, les mythes du sous-marin et du pilote de chasse embarquée ou l’esprit d’équipage. Une fois dans la Marine, le compagnonnage entre générations transmet les règles de travail et de vie en commun. La féminisation est considérée comme un succès dans la Marine. Les femmes ont accès à presque toutes les spécialités, mais sont surreprésentées dans certaines : les transmissions, les ressources humaines et surtout le service de santé (80 % des médecins). Une exception demeure : les SNLE où les patrouilles durent 70 jours.  Le principal refus de leur présence provient… de la jalousie des épouses de marins ! Dans une large majorité, les personnels de la Marine nationale soulignent la qualité de l’ambiance du travail et des relations avec le commandement ainsi que la clarté de l’information interne et de la concertation. Tous reconnaissent être correctement payés par rapport au monde civil. Enfin, l’attractivité de la Marine se traduit par un sentiment de fierté d’appartenance : 88 % des sondés se définissent d’abord comme étant marins avant d’être militaires ou d’une spécialité précise.

Loïc Salmon

Olivier Lajous, matelot du Service national en 1974 et titularisé dans le Corps des officiers de marine en 1987, terminera sa carrière au grade de vice-amiral d’escadre le 8 novembre prochain. En 36 ans de service dont 17 à la mer, il a participé à des opérations au Liban, en Iran, en Libye, au Tchad, au Yémen, en Erythrée et en Afghanistan. Il a notamment dirigé le Service de communication de la marine (Sirpa Marine) et commandé la frégate De-Grasse (2001) et le Centre d’enseignement supérieur de la marine (2007). Nommé directeur du personnel militaire de la Marine en 2009, il a reçu, trois ans plus tard, le « trophée du DRH de l’année », décerné par le cabinet de conseil en recrutement Hudson (sa représentante à droite sur la photo), la publication Figaro économie et le site internet d’emplois pour les cadres et dirigeants en France Cadremplois.fr. Cette distinction est le plus souvent remise à des directeurs de ressources humaines d’entreprises privées pour leur réalisations et engagements. Actuellement chargé de mission auprès du chef d’état-major de la Marine, il va entrer en novembre au conseil d’administration de la Société nationale de sauvetage en mer, dont il prendra la présidence quelques mois plus tard. L’amiral Lajous est officier de la Légion d’Honneur et de l’Ordre national du Mérite, titulaire de la croix de la Valeur militaire et chevalier du Mérite maritime.




Une deuxième femme amirale

Le capitaine de vaisseau Anne Cullerre deviendra, le 1er septembre 2012, la deuxième « amirale » de la Marine française, après Chantal Desbordes (2 S) en 2001. Officier du Corps technique et administratif  de la Marine (1981), elle est brevetée d’études militaires supérieures (2000). L’embarquement étant ouvert aux femmes en 1993, elle se porte volontaire sur l’un des deux premiers bâtiments à équipage mixte, la frégate anti-sous-marine Latouche-Tréville et y passe deux ans. Par la suite, elle a notamment commandé les bâtiments hydrographique Lapérouse (1997) et océanographique D’Entrecasreaux (2001) et a exercé, à bord du bâtiment de commandement et de ravitaillement Somme, les fonctions de chef d’état-major interarmées de l’amiral commandant de la zone maritime de l’océan Indien (2009). A terre, elle a dirigé le service  « ouvrage cartes et documents centralisés » de Brest (1998), puis la division 7 (entraînement, exercices et retour d’expérience) du Centre de planification et de conduite des opérations (2007) et ensuite du l’OHQ (Operations Headquarters) européen du Mont-Valérien dans le cadre de l’opération « Eufor » au Tchad et en Centrafrique. En 2010, elle est nommée directeur « Plans » de l’état-major multinational des Combined Maritime Forces pour les opérations TF 150, 151 et 152 à Bahreïn. L’année suivante, elle devient chef du bureau Asie-Pacifique à l’Etat-major des armées. Dès sa promotion au gade de contre-amirale, elle prendra les fonctions de commandant supérieur des forces armées de la Polynésie française, commandant du centre d’expérimentations du Pacifique et commandant des zones maritimes océan Pacifique et Polynésie française. Le capitaine de vaisseau Cullerre est chevalier de la Légion d’Honneur, de l’Ordre national du Mérite et de l’Ordre du mérite maritime.

Loïc Salmon